Synthèse du débat de la semaine du lundi 30 septembre 2023 : que pensez-vous de l’allocution du ministre Colonel Abdoulaye Maiga à la tribune des Nations Unies?

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Ce discours va il contribuer à apporter au Mali plus de solidarité internationale dans sa lutte contre le terrorisme ou le contraire ? Quelles conséquences peut-on attendre de ce discours?

1/ que pensez-vous de l’allocution ?

– Pour la seule contribution favorable à l’allocution,

il est important de situer ce discours dans son contexte et ses circonstances : le Mali a jugé utile de partager avec le reste du monde certaines de ses préoccupations sur le plan géopolitique et sécuritaire. La sécurité du Mali doit-elle dépendre des humeurs de l’Algérie ? Les sorties infantilisantes de l’Algérie sur le Mali sont-elles éloquentes et fraternelles ? Revenir sur les actions engagées par la transition est-il contraire à la nature de la tribune ? En ce qui concerne le choix des mots, effectivement différentes lectures seraient possibles. Etc.

– Pour toutes les autres contributions qui sont  défavorables à l’allocution,

Il y a une contradiction majeure entre féliciter le Président algérien et traiter ensuite son ministre des affaires étrangères et son représentant à l’ONU “d’énergumènes ” quand on sait que les affaires étrangères sont du domaine réservé du Président.

Comme d’habitude nous attaquer  toujours à nos voisins immédiats, la CEDEAO et l’Algérie ne nous  mènera  nulle part. Ce qui demeure vrai est qu’aucun grand discours à la tribune des Nations Unies n’a réglé les problèmes d’un pays .Nous savons tous que l’ONU est un machin dans la main des grandes puissances avec laquelle on doit agir avec tact. On peut dire ce que l’on veut en choisissant les bons mots. On peut  faire les constats  suivants sur le discours :

1- la constance de ce régime dans le vocabulaire de la niaiserie et du bellicisme qui font ombre à toutes les bonnes choses que nous avons à proposer au monde notamment notre humanisme.

2- la constance à vouloir blanchir nos propres fautes dans les maladresses et inimitiés de pays étrangers.

3 – l’incohérence dans notre commentaire du rôle supposé ou réel de l’Algérie dans l’actuelle rébellion armée dans notre Pays.

4 – le manque de propositions de solutions innovantes relatives à la thématique de l’année de l’AG.

5- le manque de solution lisible et pragmatique de sortie de crise au Mali pour lequel solliciter l’appui de l’ensemble des partenaires internationaux est nécessaire.

6- un style diplomatique contre-productif qui par ses manières ravive les tensions sous régionales et cristallise la diversité des conflits pour notre Pays.

Le  constat est que   le Mali est tombé plus bas que terre avec cette sortie du ministre Maïga qui a choisi manifestement de persister dans la puérilité et de s’abandonner à ce qu’on peut appeler le  syndrome ” choguelien “. En effet depuis que  le fameux aphorisme ” abandonné en plein vol ! ” a raflé la mise dans l’opinion, il est devenu une sorte de référence dont chaque responsable malien s’inspire pour tenter de marquer l’histoire des passages à la tribune des Nations Unies. La constance du refrain incline à en déduire une doctrine voire le credo des autorités de transition que leur impose leur instinct naturel de conservation politique et de maintien au pouvoir par un cycle de scandales interminables. Une sorte de ” scandalisme “qui consiste à chaque fois faire le plein quand le réservoir à scandales qui alimentent la machine se vide. Pour ce faire il faut faire feu de tout bois souvent au mépris de toutes les conséquences éventuelles qu’on juge négligeables par rapport aux desseins de bas étage.  C’est de  cette posture que procédait déjà la gestion radicale d’affaires comme celle des 49 soldats ivoiriens , du sort de la Minusma et des ONG financées par la France , de notre sortie de la CEDEAO et du G5 Sahel ainsi que bien d’autres artifices révélateurs des facettes les plus hideuses de la diplomatie malienne et qui ne sont point désintéressées. Et pour cause cela pourrait participer notamment d’une tendance des autorités à se soustraire de toute obligation de redevabilité multilatérale ou même bilatérale.

Ce faisant il est évident que le Peuple paie plus le tribut de l’isolement qui en découle que ceux qui décident aveuglement de son sort sans être mandatés pour cela.

Le Peuple en fait davantage les frais et en paie les conséquences par le choix  d’abuser de sa résilience en s’arrogeant le droit d’éclipser sur une tribune aussi précieuse ses aspirations et préoccupations réelles au profit des désidératas et objectifs factices des décideurs de fait.

On peut dire aussi que le discours du ministre d’Etat du Mali était un discours pour une consommation locale , écrit et prononcé à l’usage du public malien donnant ainsi du grain à moudre aux vidéomen et autres cybergriots de l’intérieur et de l’extérieur qui alimentent la machine à propagande en place depuis 2021 .

Le spectacle de la mise en scène de l’arrivée du ministre au siège des Nations Unies accompagné par le tapage d’un groupe de jeunes mobilisés à cet effet ne laisse aucun doute.

Faute de résultats probants en matière de sécurité ou de gouvernance après plus de quatre années de règne sans partage cette équipe de putschistes a fait de l’invective, la défiance et l’arrogance envers la communauté régionale et internationale,  les pays voisins et anciens partenaires du Mali les principaux instruments et arguments de son néo souverainisme plutôt incantatoire pour impressionner,  marquer et embrigader nos compatriotes crédules.

Aussi, ce discours à la 79eme session de l’AG des Nations Unies, a manqué de saveurs diplomatiques et a semblé être une énième occasion ratée de fumer le calumet de la paix avec notre grand voisin l’Algérie. Mieux, cette tribune aurait dû servir de cadre pour le Mali de redorer son blason et de sortir de l’isolement diplomatique croissant. D’abord les conciliabules dans les couloirs ensuite une bonne explication du bien-fondé des choix politiques du Mali, enfin  lancer un appel à la solidarité internationale dans la lutte contre le terrorisme. La montagne a encore une fois de plus accouché d’une maigre souris car les véritables défis auxquels le Mali est confronté ont été relégués au second plan en accordant une large place aux invectives et autres critiques acerbes rendant tout rapprochement avec nos voisins difficile. A-t-on besoin de rappeler qu’aucune paix durable au nord du Mali ne peut être construite sans  l’implication de l’Algérie ? Ne pas vouloir faire la paix avec l’Algérie, c’est faire le choix de ne pas voir la partie septentrionale du Mali apaisée et pacifiée.

Autres faits qui ressortent de ce discours, c’est non seulement le style relâch , discourtois et non diplomatique, mais aussi son caractère partisan qui ne fait plus du Mali un pays non aligné mais un pays qui a totalement basculé dans le camp anti occidental. Il n’est désormais plus exclu que notre territoire devienne un champ de confrontation entre grandes puissances. Décidément le bout du tunnel est encore loin.

Au demeurant,  Le discours est de bas étage et le langage est loin d’être courtois alors que la diplomatie comme nous le savons est l’art de l’élégance, de l’éloquence, du savoir -vivre, du savoir-faire et du faire -savoir ! La politique étrangère du Mali déclinée en provocations  en attaques frontales contre des plus forts que nous ne pourrons jamais prospérer.

Sommes-nous conscients de l’état réel du Pays ? Avec une économie à terre,  une sécurité qui révèle des faiblesses etc…. Pour la diplomatie nous devons revenir aux fondamentaux avec en ligne de mire la courtoisie, le respect  et la considération de tous les partenaires. On attend de la diplomatie malienne la mobilisation de fonds, celle des partenaires et investisseurs en les rassurant du respect des grands  principes qui fondent leurs activités. Il devient évident que, ce gouvernement n’apporte rien pour la bonne conduite de la transition. Le ministre Diop malgré sa grande expérience dans la diplomatie est devenu méconnaissable juste pour faire plaisir au prince du jour. Il s’agit aujourd’hui de travailler pour soigner l’image du Mali et cette situation est sans surprise avec une gouvernance sans contenu réel.

Enfin,  l’allocution prononcée le 30 septembre au nom du Mali déroge à toutes les règles et pratiques diplomatiques.

L’allocution prononcée aussi  le 23 septembre à l’occasion du sommet du futur était tout aussi inadaptée pour la circonstance et le contexte.

Le thème de la 79eme session de l’Assemblée générale : ” Ne laisser personne de côté : agir ensemble pour la paix, le développement durable et la dignité humaine des générations présentes et futures “, qui répond parfaitement à nos aspirations en matière de relations internationales n’a pas bénéficié de notre contribution. Pourtant Dieu sait si nous aspirons à un nouvel ordre international plus juste, plus inclusif.

2/ Ce discours va il contribuer à apporter au Mali plus de solidarité internationale dans sa lutte contre le terrorisme ? Quelles conséquences faut-il attendre ?

A ce sujet, Nous aurions pu décliner notre vision à l’occasion de nos deux discours, au lieu de cela nous avons choisi la défiance, l’incrimination, les invectives en désignant nommément des États, cela est devenu notre pratique diplomatique depuis septembre 2021. En le faisant nous ratons l’occasion de peser dans la balance des réformes des Nations Unies.

Nous faisons du suivisme en supportant des positions qui sapent les fondements de notre organisation sans être un acteur majeur dans la définition du nouvel ordre. Nous détournons de nous de possibles soutiens en ressassant les mêmes accusations sur le même ton de défiance. Notre manière d’aborder les sujets défie totalement les us diplomatiques faits de courtoisie, de respect de l’autre partie qui est tout aussi souveraine. Une démarche désobligeante, suscite au mieux le silence, au pire l’animosité. Elle ne suscite nullement la sympathie encore moins le soutien. Le soutien dont notre Pays pourrait bénéficier dans ces conditions c’est un soutien minimal d’assistance humanitaire d’urgence, pas de soutien à nos plans d’investissement ou de développement. Le soutien en matière de sécurité ne viendra pas des Nations Unies, sauf dans l’hypothèse extrême d’un droit d’ingérence humanitaire.

Dans les relations d’Etat à État, aucun partenaire traditionnel ne sera en soutien ni même nos voisins. Le soutien sera exclusivement assuré par les nouveaux ” partenaires stratégiques “:( Russie, Chine,  Turquie, Iran, Venezuela,  Corée du nord, AES ) avec les équipements et peut être les agents des compagnies paramilitaires sauf pour la Chine où de telles organisations n’existent pas. Pire, nous courrons le risque de faire de notre Pays le terrain de confrontation Est / Ouest dans la mesure où nous avons pris fait et cause pour une doctrine au détriment même du groupe des pays africains présidé par la République du Congo.

En termes de diplomatie et de politique étrangère  ces discours et ces gesticulations nous rapporteront  au mieux de l’indifférence, au pire de la méfiance et de la lassitude de la part de la communauté internationale. La conséquence la plus fâcheuse pourrait résider dans l’ouverture des hostilités avec l’Algérie.

3/ Que doit faire le Mali ?

Le Mali doit sortir de sa posture belliqueuse et du tout militaire pour l’option diplomatique surtout avec l’Algérie pour deux raisons : d’abord l’Algérie est le deuxième pays après la Mauritanie partageant la plus longue frontière avec le Mali , ensuite son sud correspond au nord du Mali qui est l’épicentre des conflits entre le Mali et la coalition djihado-indépendantiste. En plus l’Algérie et le Mali abritent les mêmes populations de part et d’autre de leurs frontières ce qui fait de l’Algérie un pays incontournable dans la résolution de cette sempiternelle crise et qu’aucune paix durable n’est possible sans l’implication de ce grand voisin.

Le  Mali doit favoriser la désescalade : promouvoir sa vision des relations internationales sans invectives ni récriminations.

– contribuer substantiellement à la réforme des Nations Unies afin que celle-ci prenne en compte ses aspirations.

– participer à l’élaboration des fondements et principes d’un nouvel ordre au cas où son désir est de nous débarrasser de l’ordre actuel. Quel que soit le choix cela devra se faire dans la courtoisie et dans le respect de la souveraineté des autres  Nations, toutes choses auxquelles nous aspirons nous mêmes. Aussi et surtout, le Mali doit éviter de créer des tensions avec tous ses voisins immédiats  notamment l’Algérie au grand détriment de ses propres populations frontalières ou installées dans ces pays.

Éviter à tout prix d’en arriver à une confrontation militaire avec l’Algérie qui serait catastrophique pour nous.

Revenir impérativement aux fondamentaux de la diplomatie malienne à savoir :

– Le non alignement

– La politique de bon voisinage

– La non-ingérence dans les affaires intérieures

– l’amitié entre les Peuples

– Le panafricanisme non exclusif !

Rassemblés et synthétisés par Malick Touré

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