Le ministre de l’Agriculture, Lassine Dembélé, était l’invité de la Rencontre professionnelle du Conseil national du patronat du Mali (CNPM) qui s’est tenue le jeudi 4 avril 2024 dans les locaux de l’organisation axée sur “Les entreprises agricoles au Mali : cadre légal, centre d’intérêt et mode d’emploi ?” C’était en présence du président du CNPM, Mossadeck Bally, et les responsables des différents secteurs professionnels de notre pays.
Après les mots de bienvenue du président du Patronat, le ministre de l’Agriculture, Lassine Dembélé, a expliqué l’écosystème institutionnel et normatif de l’agriculture au Mali. Et d’ajouter que le cadre réglementaire est composé, entre autres, de : la loi n°06-045 portant Loi d’orientation agricole, la loi n°008 relative au contrôle de qualité des engrais, la loi n°10-031 portant création du Fonds national d’appui à l’agriculture (Fnaa), la loi n°2011-040 portant statut des exploitations et des exploitants agricoles, la loi n°2017-001 portant sur le foncier agricole.
Evoquant la fiscalisation du secteur agricole notamment, à travers l’impôt sur les bénéfices agricoles (IBA), il dira que celle-ci est prévue par l’article 99 (et suivants) du Code général des impôts. Cependant, précisera-t-il, cet impôt ne frappe que les bénéfices des exploitations non traditionnelles (immatriculées). Cette application conditionnée, selon lui, fait perdre plus de 90 milliards de nos francs à l’Etat parce que, selon les statistiques, sur plus 5710 entreprises agricoles seulement moins de 5 % sont immatriculées.
Pour inverser cette tendance, il a proposé de faire une liste exhaustive
de toutes les entreprises agricoles qui favorisera l’implication de l’Etat, car une entreprise doit être immatriculée pour prétendre bénéficier l’appui de l’Etat. Il a aussi relevé la nécessité d’adopter un arrêté interministériel précisant les conditions d’application de l’IBA. Et de poursuivre que le projet de cet arrêté interministériel n’est pas encore élaboré par le ministère de l’Economie et des Finances.
Faire du Mali un moteur de l’économie agricole de la sous-région
Selon le ministre de l’Agriculture, faire du Mali un moteur de l’économie agricole de la sous-région, passe par la modernisation de l’agriculture pour assurer l’autosuffisance alimentaire, la valorisation de notre chaîne de valeur afin de livrer des produits de qualité aux consommateurs parce que les agriculteurs doivent se conformer aux exigences des consommateurs ; l’intensification des projets d’aménagement des terres pour en élever le niveau d’utilisation de ceux-ci qui est très faible ; la sécurisation des espaces agricoles afin que les gens puissent avoir accès aux ressources financières et mettre en place des mécanismes pour les investisseurs dans le secteur agricole ; la préservationdes espaces agricoles à travers des textes réglementaires.
En termes d’actions prioritaires, il a laissé entendre que les actions prioritaires de son département, pour l’année en cours, portent sur l’amélioration du Conseil agricole à travers l’adoption de la Politique nationale de conseil agricole et l’institution du Système national du conseil agricole ; l’adoption de la Loi de programmation des investissements dans le secteur agricole ; le Recensement général agricole (RGA) ; l’intensification de l’irrigation de proximité à travers l’adoption et la mise en œuvre du PNIP2 ; le développement des Agropoles pour promouvoir l’entrepreneuriat agricole ; le maintien et l’amélioration de la fertilité des sols à travers la promotion de l’agroécologie et l’élaboration d’une carte de fertilité de nos sols. “Les actions mises en œuvre par l’écosystème institutionnel de l’agriculture visent à faire du Mali une puissance agricole sous-régionale, où le secteur agricole sera un moteur de l’économie nationale, assurant la sécurité alimentaire des populations urbaines et rurales et générant des emplois et des revenus significatifs dans une logique de développement durable, respectueux de l’environnement”, a-t-il renchéri.
En perspectives, le département de l’Agriculture entend entre autres : développer et la promouvoir l’irrigation de proximité ; aménager 5800 ha à M’Béwani à travers le Projet d’aménagement commercial ; équiper les exploitants agricoles avec un focus sur l’acquisition des technologies adaptatives ; promouvoir l’accès aux marchés à travers l’agro-industrie, exiger le respect des normes sanitaires et phytosanitaires ; sécuriser les exploitants agricoles ; sécuriser les terres d’expérimentation et de recherche agricoles ; introduire les technologies climato-intelligentes dans les systèmes de productions (agriculture, élevage, pêche et aquaculture) ; adapter la mécanisation du secteur agricole et la promotion d’une agriculture de transformation.
Mettre de l’ordre dans le secteur de la distribution d’engrais
A la suite du ministre, un intervenant a exprimé ses inquiétudes sur les différents litiges fonciers qui menacent le secteur agricole. Avant de préciser que la justice vers laquelle les parties se dirigent les départage, mais n’éteint pas malheureusement les conflits. Donc, selon lui, il est nécessaire d’envisager d’autres moyens de règlement des conflits. Un autre a révélé qu’il est impossible de booster l’agriculture sans développer le secteur semencier. Et d’ajouter la nécessité de mettre en place un système de production des semences.
Pour sa part, le président du CNPM, Mossadeck Bally, a laissé entendre qu’il faut mettre de l’ordre dans le secteur de la distribution d’engrais qui est aujourd’hui très mal en point. Car, déplorera-t-il, lors des campagnes, les vrais acteurs ayant une expertise très pointue dans le domaine de la distribution des engrais sont écartés dans l’octroi des marchés au profit d’autres non spécialisés. Il a aussi déploré le manque de visibilité dans le secteur agricole. Avant d’ajouter qu’il faut identifier les filières porteuses pour attirer beaucoup d’investisseurs, car le Mali est une puissance agricoles endormie.
Boubacar Païtao