Avocats Sans Frontière Canada, Wildaf Mali et le Collectif Cri de cœur ont co-animé, hier lundi, à Bamako une conférence de presse pour exprimer leur vive préoccupation sur la situation des victimes et survivantes des violences sexuelles en temps de conflit. Les trois organisations ont interpellé l’Etat du Mali, à travers le pôle judiciaire spécialisé, à diligenter les poursuites et des enquêtes contre les auteurs-présumés de ces crimes odieux.
Au Mali, l’avocat sans frontière Canada et la société civile ont profité de la journée internationale de l’élimination des violences sexuelles en temps de conflit pour interpeller à nouveau le gouvernement sur la situation des victimes et survivantes des crimes sexuels perpétrés en 2012 dans le nord du Mali. Les trois organisations ont vivement appelé le Ministère de la Justice et des Droits humains à saisir le Pôle Judiciaire Spécialisé enfin que le Procureur s’engage activement à prendre des mesures urgentes et idoines pour résoudre ces situations tant inquiétantes pour les victimes et survivantes. Elles estiment que depuis 2014 les survivants attendent une réponse judiciaire et se questionnent sur ce qui peut être réalisé en termes de réparations administratives.
« Nous profitons de cette journée pour exprimer notre vif mécontentement concernant la grande lenteur des poursuites judiciaires relatives à ces infractions au Mali », a déclaré Me Mariam Traoré, avocat au compte de Wildaf Mali, poursuivant que «l’absence de répression à l’encontre de ces violations envoie un signal contradictoire dans la lutte contre l’impunité de ce type de violation des droits humains au Mali et en Afrique ». L’avocate insiste auprès du pole judiciaire spécialisé à poursuivre avec détermination et rigueur les enquêtes afin de mettre fin à l’impunité qui entoure, selon elle, ces crimes pour offrir une justice et réparation des victimes.
Le Directeur pays ASFC Mali, Brian Ménélet, s’apitoie sur le sort des victimes en déclarant que les victimes souffrent non seulement de blessures physiques mais aussi de traumatismes psychologiques profonds difficilement réparables. « Ces actes ne sont pas le fait d’auteurs isolés », affirme Brian Ménélet, soulignant que c’est une stratégie délibérée visant à déstabiliser les communautés et à maintenir un climat de peur et terreur. Il plaide pour un renforcement des cadres juridiques et institutionnels, seuls gage pour garantir la traduction des auteurs des violences sexuelles liées aux conflits en justice.
Dans son sillage, Me Mariam Traoré estime qu’en rendant justice aux victimes, l’Etat du Mali contribuera à la réconciliation nationale et à la reconstruction sociale. « Les communautés vont commencer à guérir lorsque les crimes sont reconnus et la justice est rendue », a-t-elle dit. Ce faisant, elle préconise une mobilisation des ressources nécessaires et la coopération entre le Pôle judiciaire du Mali et les organisations internationales, les experts en matière de violence sexuelle.
Le représentant du collectif Cri de Cœur, Ali Keïta, pense que l’existence de la justice transitionnelle, sans volet judiciaire, ne devrait pas être un frein au recours des mécanismes judiciaires. Selon lui, les victimes ont droit de bénéficier de ces deux types de mécanismes pour obtenir une justice complète et équitable.
« Activer les mandats d’arrêts »
Au terme de son mandat, la commission vérité, justice et réconciliation a enregistré 3 900 cas de victimes des violences sexuelles liées aux conflits au nord et au centre, selon la présidente de la commission nationale des crimes du Nord, Mme Fatoumata Touré. Cette commission a déposé un rapport auprès des autorités maliennes qui demande justice et réparations pour les victimes. La plupart des victimes, selon toutes les parties prenantes de cette question, sont des femmes, des mineures et des hommes. Des dizaines de plaintes ont été déposées contre les auteurs et les auteures morales de ces crimes. La société civile malienne rassure l’opinion de sa détermination à alerter les autorités pour le respect des droits humains. C’est pourquoi, Me Mariam Traoré a encouragé l’Etat à activer les mandats d’arrêts et à rechercher les auteurs.
Siaka DIAMOUTENE/Maliweb.net