Il y a des moments où il vaut mieux se taire. Le ministre de l’Économie et des Finances, Alousséni Sanou, a raté cette occasion en tentant de justifier, sur les ondes de l’ORTM, les nouvelles taxes qui viendront encore alourdir le quotidien des Maliens. Télécommunications, recharges téléphoniques, transferts d’argent mobile : tout y passe. L’argument avancé ? Une prétendue demande des citoyens eux-mêmes pour contribuer à l’effort national. Une justification aussi grotesque qu’indéfendable.
Une escroquerie fiscale
Depuis plusieurs années, les Maliens réclament une réduction drastique du train de vie de l’État, une gestion plus vertueuse des deniers publics et une transparence budgétaire digne de ce nom. Et que leur offre-t-on en retour ?
Des institutions dont les budgets explosent, des dépenses somptuaires en hausse et, comble de l’ironie, un ministre qui nous explique que c’est le peuple qui demande à être davantage taxé ! Qui sont donc ces Maliens qui, étranglés par l’inflation et la précarité, souhaitent voir leurs maigres revenus encore plus ponctionnés sans contrepartie ?
Il y a un proverbe bien connu qui dit : « Lorsque le mensonge prend l’ascenseur, la vérité prend l’escalier ; elle met plus de temps, mais elle finit toujours par arriver. » Monsieur Sanou a beau multiplier les justifications, la réalité est là : cette avalanche de taxes est une manœuvre désespérée pour combler des caisses vides, sans véritable vision économique.
On nous parle de 2 milliards FCFA de contributions volontaires récoltées pour soutenir les finances publiques. Fort bien. Pourquoi ne pas rester dans cette logique du volontariat ? Pourquoi imposer de nouvelles taxes à une population qui peine déjà à joindre les deux bouts, comme si la galère qui frappe des miliers de foyers ne suffisait pas? la seule réponse plausible est que cette contribution volontaire n’a pas eu l’effet escompté. Pourtant, au lieu d’en tirer les leçons, l’État choisit la facilité : ponctionner de force les consommateurs.
Un hold-up organisé sur les communications et les transactions financières
Derrière le jargon technocratique et les justifications bancales du ministre, la réalité est simple : chaque recharge téléphonique, chaque abonnement, chaque retrait de transfert d’argent mobile sera dorénavant soumis à une ponction de 2 %, répartie équitablement entre les opérateurs et l’État. Le pire ? Ce prélèvement ne sera pas visible sur les factures ou les SMS de confirmation. Vous pensiez recharger 1000 FCFA et en bénéficier pleinement ? Détrompez-vous : le crédit s’affichera bien à 1000 FCFA, mais la durée de communication, elle, sera réduite. Un tour de passe-passe digne des pires arnaques.
Les Maliens, quant à eux, n’ont jamais demandé cette taxation déguisée. Ce qu’ils réclament, c’est bien plus simple : des cartes d’identité biométriques, des services publics fonctionnels, une gouvernance responsable. Mais visiblement, ces préoccupations ne sont pas prioritaires pour un gouvernement plus soucieux de remplir ses caisses que de répondre aux véritables attentes de ses citoyens.
Il n’y a rien de plus révoltant que d’être trompé avec ses propres ressources. Montesquieu écrivait : « Un empire fondé sur les armes a besoin de se soutenir par les armes ; un empire fondé sur la justice se soutient par la justice. » En multipliant les ponctions sur une population déjà exsangue, les autorités de la transition prennent le risque de fragiliser encore davantage leur propre crédibilité déjà entamée. Un pouvoir ne se maintient pas par la spoliation, mais par la confiance.
Des institutions toujours plus gourmandes, un peuple toujours plus saigné.
Pendant que l’on demande aux Maliens de se serrer la ceinture, les budgets des institutions explosent. La Présidence de la République, le Conseil National de Transition (CNT) et d’autres structures se gavent de crédits publics, sans la moindre retenue. Les conseillers du CNT, eux, s’octroient de nouvelles indemnités en toute impunité.
L’un d’eux s’est même permis de railler les critiques en déclarant : « Doromè ti bo ala » – comprendre « Pas un franc de moins pour nous ». Un mépris affiché, un cynisme insupportable.
Et pendant ce temps, l’électricité se fait rare, les infrastructures s’effondrent, les hôpitaux manquent de tout et l’éducation est à l’agonie. Où va l’argent des impôts déjà existants ? À quoi servent ces contributions forcées si ce n’est à alimenter un gouffre budgétaire opaque et insatiable ? Surtout quand on sait que ce même gouvernement s’est lui-même exempté de toute redevabilité à travers un décret de mai 2023 élargissant à l’infini la notion de secret défense et d’intérêt essentiel en matière de passation de marchés aux ministères de la Défense et de la Sécurité, ainsi qu’à la présidence. Ce décret exclut de tout contrôle l’essentiel des dépenses de ces structures budgétivores. Tout se saura, c’est une question de temps.
Au lieu de provoquer l’hémorragie du peuple avec de nouvelles charges fiscales, pourquoi les autorités ne diminueront pas de 50% le budget des institutions surtout quand on sait que certaines ne servent à rien? Pourquoi c’est toujours au peuple on demande des efforts alors que les gouvernants dans un luxe insultant?
Il y a un adage qui dit : « Quand le tambour change de rythme, la danse doit s’adapter. » Le peuple malien ne peut plus continuer à danser sur la même musique pendant que les gouvernants jouent une autre partition.
Trop, c’est trop ! Do kera sa !
Il serait grand temps que les autorités comprennent que la résilience des Maliens a des limites. On ne peut pas continuellement leur demander des sacrifices sans leur offrir en retour des services publics dignes de ce nom. La confiance entre gouvernants et gouvernés est au plus bas, et ce genre de décisions fiscales arbitraires ne fait qu’attiser la défiance.
Le ministre Sanou et ses collègues devraient méditer sur une vérité simple : le peuple n’est pas une vache à traire éternellement. À force d’opacité, de mépris et d’accaparement des ressources, le fossé ne cesse de se creuser. Et quand viendra l’heure des comptes, il ne suffira plus d’un discours télévisé pour éteindre l’incendie.
Un citoyen qui a forcé notre admiration
Plutôt d’accord même si il faut bien des impôts pour payer les services publics, mais vu l’opacité de ce “gouvernement”, on peut se poser des questions sur la destination de ces fonds.
Je reviendrais juste la dessus : “des cartes d’identité biométriques,”
Les maliens demandent ça ? c’est vraiment une priorité ? en tout cas pour moi, ce n’est pas essentiel pour l’instant.