Justice Internationale : Ce qu’il faut savoir de la demande de libération anticipée d’Al Hassan à la CPI dont l’État du Mali s’oppose et ….

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Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud e

Le 12 mars 2025 une requête a «été faite par la défense d’Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud en vue de la réduction de sa peine dont il a été déclaré coupable de huit chefs de crimes contre l’humanité et crimes de guerre par jugement rendu le 26 juin 2024 de la Chambre de première instance  et le 20 novembre 2024, il fut condamné par le même tribunal à 10 ans d’emprisonnement avec déduction du temps de la détention estimé aux deux tiers de la peine prononcée.

Dans les normes juridiques Al Hassan après avoir purgé les deux tiers de sa peine, il a déjà le devoir de faire une demande de sa libération anticipée, il reste à savoir si cette demande sera acceptée par les juges de la CPI. En effet, il a fait la demande de sa libération anticipée car dans ses calculs, il décida d’abandonner  en appel  sa condamnation à 10 ans de prison car il savait déjà qu’avec les deux tiers, il peut demander une libération anticipée. Alors s’il allait en appel et qu’il était condamné pour violence sexuelle, esclavage sexuelle et  mariage forcé, il aurait pu prendre plus que 10 ans, c’est la raison pour laquelle il a abandonné son appel et demander une libération anticipée en vertu du Statut de Rome.

À la suite de requête de réduction de la peine dans l’affaire Le Procureur de la CPI C/AL HASSA AG ABDOUL AZIZ AG MOHAMED AG MAHAMOUD 5 ICC-01/12-01/18), trois juges de la chambre d’Appel ont été nommé (Mme la Juge Luz del Carmen Ibáñez Carranza, Juge président M. le juge Gocha Lordkipanidze et M. le juge Erdenebalsuren Damdin. `

Dans le cadre de l’examen de la question d’une réduction de la peine d’Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud (« Al Hassan ») en application de l’article 110 du Statut de Rome (« le Statut »), le 20 mars 2025 les trois juges de la Chambre d’Appel de la Cour pénale internationale (« le collège de juges ») ont ordonné au Greffier qui déposera des observations sur les critères exposés aux dispositions a) à e) de la règle 223 du Règlement au plus tard le 3 avril 2025. Au besoin, il consultera au sujet de ces critères tout État disposant d’informations qui pourraient être pertinentes. La République du Mali, pour autant qu’elle dispose d’informations pertinentes, a été  invitée à présenter des observations écrites au sujet des critères exposés aux dispositions b) à d) de la règle 223 du Règlement au plus tard le 3 avril 2025, conformément à la norme 33-1-d du Règlement de la Cour. Ces observations écrites ne devront pas compter plus de 10 pages et seront conformes aux dispositions de la norme 36 du Règlement de la Cour. Les parties et les représentants légaux des victimes, eux aussi ont été invités à présenter des. Observations écrites ne comptant pas plus de 15 pages, conformes aux dispositions de la norme 36 du Règlement de la Cour, au plus tard le 11 avril 2025, conformément à la norme 33-1-d du Règlement de la Cour. Ces observations écrites pourront porter sur : a) Les critères applicables à l’examen de la question d’une réduction de peine énoncés aux paragraphes a) à c) de l’article 110-4 du Statut et aux dispositions a) à e) de la règle 223 du Règlement, b) Les observations du Greffier et de la République du Mali, le cas échéant, c) La question de savoir s’il est nécessaire ou non de tenir une audience en application de la règle 224-1 du Règlement.

En précisant que si les parties ou les représentants légaux des victimes ont besoin de plus de temps pour préparer leurs observations, ils peuvent demander une modification du délai prévu à la norme 35 du Règlement de la Cour.

L’État du Mali devrait rejeter la demande de réduction de peine, comme non fondée

C’est suite à cette décision d’Ordonnance portant calendrier relative à l’examen de la question d’une réduction de la peine d’Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud que l’État du Mali a transmis ses observations écrites le  14 avril 2025 à travers  le Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme.

Selon l’analyse juridique du Mali, la réduction de peine est une mesure qui dispense la personne détenue d’effectuer une partie de la peine de prison à laquelle elle a été condamnée et qui lui permet de retrouver la liberté avant le terme de sa condamnation. Cette réduction est prévue par les dispositions de l’Article 110-4-a du Statut de Rome et la Règle 223 et 224 du Règlement de procédure et de preuve de la Cour Pénale Internationale. Les observations sollicitées ici par les juges désignés portent sur la recevabilité de la demande de réduction (1) et sur le bien-fondé de cette réduction de peine.

Sur la recevabilité de la question de la réduction de peine, le Mali dira que l’action est dite recevable lorsqu’elle remplit les conditions nécessaires pour qu’elle soit reçue par le juge et examinée dans ses moyens et conclusions…Ajout ‘il qu’en l’espèce, le nombre élevé de victimes commande que les juges s’assurent que toutes les victimes, mais toutes, aient été impliquées dans cette procédure d’examen de la peine. Toute chose qui parait difficile aux regards du nombre de victime et des délais trop courts accordés aux représentants des victimes pour présenter les observations. Ce délai ne permet pas aux représentants légaux de toucher les nombreuses victimes. Les observations contenues dans la demande d’extension de délais des représentants des victimes déposée le 20 Mars 2025, conduit à la conclusion suivante : L’État du Mali doit invoquer l’irrecevabilité de l’examen de la réduction de peine tant que l’ensemble des victimes et leurs représentants n’ont pas été consultés dans la mesure du possible.

Sur le bien-fondé la réduction de peine au profit de Al  Hassane, une analyse des dispositions pertinentes de l’Article 110 du Statut de Rome et la Règle 223 du Règlement de procédure et de preuve, fait ressortir que lorsqu’ils examinent la question de la réduction d’une peine en vertu des paragraphes 3 et 5 de l’article 110, les trois juges de la Chambre d’appel prennent en considération les critères énumérés aux alinéas a) et b) du paragraphe 4 de l’article 110, ainsi que les critères prévus par la règle 223 du Règlement de procédure et de preuve en ses points suivants: Le fait que le comportement de la personne condamnée en détention montre que l’intéressé désavoue son crime;  Les possibilités de resocialisation et de réinsertion réussie de la personne condamnée;  La perspective que la libération anticipée de la personne condamnée ne risque pas d’être une cause d’instabilité sociale significative; Toute action significative entreprise par la personne condamnée en faveur des Victimes et les répercussions que la libération anticipée peut avoir sur les victimes et les membres de leur famille ».

L’État du Mali dira qu’en l’espèce, il n’a été observé en aucun moment que le condamné répond aux critères prévus par la règle 223 du Règlement de procédure et de preuve ci-dessus citée en ses points a), b) et d). En outre, s’agissant du point c) de la règle 223, il apparait que la libération anticipée de AL HASSANE risque d’être une cause d’instabilité sociale significative ; En effet. Jusqu’à ce jour, le Mali connait le terrorisme et les nombreux témoins et complices des faits, pour lesquels, AL HASSANE est condamné, courent toujours. AI. HASSANE n’a en aucun moment permis de mettre fin à ces faits graves qui continuent de semer la mort au Nord, au centre comme au sud du pays, il n’a jamais désavoué les faits. En fin, de nombreuses victimes attendent d’être indemnisées et en aucun moment, il n’a entrepris des actions en faveur des victimes qui peuvent être impactées par cette libération anticipée. Des représailles sont possibles comme le pays en a connu suite à des arrangements en 2013 qui avaient vu des membres de groupes armés libérés ou pour certains les mandats d’arrêt levés et qui sont retournés pour s’attaquer à des témoins et victimes. Le contexte donne ne milite point pour une réduction de cette modique peine.

Pour le Mali, AI HASSANE a été déclaré coupable de faits graves de crimes contre l’humanité et crimes de guerre, la peine de 10 ans apparait comme dérisoire au regard des peines prévues par le Code Pénal au Mali pour les mêmes faits. En effet, les dispositions du titre I du livre III du Code Pénal au Mali relatives aux crimes internationaux prévoient à l’Articles314-1: «Tous les crimes prévus dans le présent titre sont punis de mort. Ils sont imprescriptibles et ne peuvent faire l’objet d’amnistie ou de grâce. De même, toute peine prononcée en répression de ces crimes est imprescriptible et ne peut faire l’objet d’aucune amnistie ou de grâce ». Ainsi, il est impensable qu’avec seulement 10 ans, AL HASSANE puisse encore bénéficier de réduction de peine, la loi malienne étant assez sévère en la matière.

En conclusion, l’État du Mali dira qu’il est donc évident que pour mieux lutter contre l’impunité des crimes internationaux, la peine aussi faible puisse être purgée sans réduction. Ceci est important pour les criminels encore à l’œuvre, mais aussi rassure les victimes. Pour cela le Gouvernement du Mali donne son avis à l’irrecevabilité de la demande de réduction tant que l’ensemble des victimes n’a pas été consulté conformément à la règle 224 du Règlement de procédure et de preuve ; Si les juges passaient outre, cette exception d’irrecevabilité, le Gouvernement du Mali devrait solliciter le rejet de la demande de réduction de peine, comme non fondée et enfin dans tous les cas, le Gouvernement du Mali ne doit pas donner un avis favorable à la réduction de peine soumise à l’appréciation des juges.

Que dit  l’article 110 du statut de Rome

Article 110/ Examen par la Cour de la question d’une réduction de peine

  1. L’État chargé de l’exécution ne peut libérer la personne détenue avant la fin de la peine prononcée par la Cour.
  2. La Cour a seulement le droit de décider d’une réduction de peine. Elle se prononce après avoir entendu le condamné.55
  3. Lorsque la personne a purgé les deux tiers de sa peine ou accompli 25 années d’emprisonnement dans le cas d’une condamnation à perpétuité, la Cour réexamine la peine pour déterminer s’il y a lieu de la réduire. Elle ne procède pas à ce réexamen avant ce terme.
  4. Lors du réexamen prévu au paragraphe 3, la Cour peut réduire la peine si elle constate qu’une ou plusieurs des conditions suivantes sont réalisées :
  5. a) La personne a, dès le début et de façon continue, manifesté sa volonté de coopérer avec la Cour dans les enquêtes et poursuites de celle-ci ;
  6. b) La personne a facilité spontanément l’exécution des décisions et ordonnances de la Cour dans d’autres cas, en particulier en l’aidant à localiser des avoirs faisant l’objet de décisions ordonnant leur confiscation, le versement d’une amende ou une réparation et pouvant être employés au profit des victimes ; ou
  7. c) D’autres facteurs prévus dans le Règlement de procédure et de preuve attestent un changement de circonstances manifeste aux conséquences appréciables de nature à justifier la réduction de la peine.
  8. Si, lors du réexamen prévu au paragraphe 3, la Cour détermine qu’il n’y a pas lieu de réduire la peine, elle réexamine par la suite la question de la réduction de peine aux intervalles prévus dans le Règlement de procédure et de preuve et en appliquant les critères qui y sont énoncés.”

 

Bokoum Abdoul Momini/maliweb.net

 

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