Justice et lutte contre l’impunité : Comment déjouer cet autre piège ?

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La population carcérale augmente à un rythme exponentiel. Ce qui peut rendre les gouvernants un tant soit peu impopulaires.

La Transition en cours aura battu le record de procédures judiciaires, sous le motif de la lutte contre l’impunité

En effet, au fur et à mesure que cette Transition se poursuit, les lieux de détention ne cessent de voir leur population augmenter. C’est ainsi que parmi les pensionnaires, on peut citer des noms d’anciens ministres comme le Général Salif Traoré, l’ancien président de l’Assemblée nationale, Issaka Sidibé, l’ancien Questeur de l’Hémicycle, , Mamadou Diarrassouba, l’ancien Maire du District de Bamako, Adama Sangaré, un ancien Secrétaire général de la présidence, un ancien conseiller aux affaires économiques du président IBK (qui vient de retourner en prison, après y avoir séjourné un moment), Dr Etienne Fakaba Sissoko, l’ancien président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali, Youssouf Bathily et bien d’autres cadres, dont deux cadres proches du Premier ministre, Dr Choguel Kokalla Maïga, Abdel Kader Maïga et Bouba K. Traoré. La liste est loin d’être exhaustive. Si les uns sont poursuivis pour de présumés crimes et délits économiques, donc dans le cadre de la lutte contre la délinquance financière, d’autres sont privés de liberté pour des infractions relatives à la sureté de l’Etat ou des formes d’atteintes présumées au « crédit de l’Etat ». De nombreux détenus, souvent sans aucune notoriété, sont également incarcérés dans le cadre des procédures liées à la cybercriminalité. Ce qui touche le concept des libertés d’expression ou d’opinion…

Dans tous ces cas, ce qui est notoire est une forme de banalisation des « mandats de dépôt ». Ce qui pousse les experts à se demander ce qui explique cette facilité avec laquelle les juges d’instructions placent si rapidement sous mandat de dépôt, ouvrant si grandement les portes de nos prisons à des compatriotes. La seule politique de lutte contre l’impunité suffit-elle pour cette grande diligence à priver des justiciables de liberté ? Alors la liberté est la règle et sa privation l’exception.

Il faut admettre que cet engorgement des prisons ne semble pas servir le pouvoir en place. Car, dans tous les cas, l’opinion publique finit par se dire que ce sont les dirigeants du pays qui sont à la base de ces détentions. Et certains n’hésitent pas à voir derrière certaines procédures judiciaires des mains invisibles de hautes personnalités. Surtout que le discours officiel consiste à déclarer que « personne n’est au-dessus de la loi, force doit rester à la loi ! ». Ce qui peut conduire à discréditer le pouvoir, comme un véritable ennemi des libertés. Certains vont jusqu’à faire croire que c’est le chef de l’Etat qui a ordonné que tel ou tel soit jeté en prison ou qu’il y soit maintenu. Ces déductions hâtives sont plus que de mise si les détenus concernés sont des acteurs politiques.

A la longue, tout semble mis en œuvre pour susciter une certaine impopularité des plus hautes autorités du pays. 

Il s’agit donc d’un piège que les  dirigeants doivent vite percevoir, pour user de leurs pouvoirs pour déjouer. Les autorités judiciaires ne doivent pas s’y méprendre. Elles doivent être sensibles au contexte sociopolitique assez fragile que vit le pays, avec de gros défis existentiels et ne pas se fourvoyer sur les dangers d’une gouvernance trop répressive.

Boubou SIDIBE/maliweb.net

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