Affaires Kaou N’DJIM et JOLIBA TV : Le retour au délit d’opinion ?

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L’initiateur de la candidature d’Assimi Goita pour Koulouba est au cœur de la polémique au nom des consignes souverainistes de l’AES. Issa Kaou N’Djim entraîne dans son sillage Joliba TV, avec laquelle il partage une infortune révélatrice de l’AES sous des traits plus hideux qu’attractifs dans le domaine des libertés.

Pour avoir critiqué la junte burkinabé, cet opposant tantôt favorable au pouvoir est au cœur de la polémique et embarque dans son sillage Joliba TV. Quant au confrère, qui a le soutien massif de la corporation, il n’en était déjà pas à sa première démêlée avec la HAC, depuis une première suspension de ses programmes, en fin 2022. Il fait manifestement encore les frais d’une période d’exception faite d’intolérance de la liberté d’expression, sous le règne du Général Assimi Goïta.

Issa Kaou N’Djim a été arrêté, mercredi dernier, sur fond de pression des autorités burkinabé, lesquelles jugent inadmissibles les réserves qu’il a émises, dans l’émission «LE RENDEZ-VOUS DES IDÉES», sur les circonstances d’une tentative de déstabilisation du Burkina-Faso telles que décrites par les officiels de ce pays.

Depuis cette énième incarcération du président de l’ACRT par le cyber-Procureur, la polémique bat son plein. Et pour cause, l’ancien du CNT est l’invité le plus omniprésent sur les plateaux de Joliba TV, avec des apparitions au-delà l’émission RDI (Rendez Vous des Idées) où il est constant. Il est également régulier sur d’autres programmes du même média dont JOLIBA FOCUS ou ÉDITION SPÉCIALE où il décortique seul sur le plateau l’actualité malienne. Idem pour la version en bambara dénommée JOKONO où il défiait récemment son rival de la Commune 4, Moussa Mara, à approuver formellement la criminalisation de l’homosexualité dans le code pénal malien. Une fois toutes les semaines, le gendre de l’Imam Mahmoud Dicko apparaît dans une session en direct sur la page officielle du confrère. La régularité de ses apparitions médiatiques en fait manifestement un redoutable acteur de la scène publique, quoiqu’il prenne soin ses interventions sulfureuses d’épargner le président de la Transition dont il magnifie les actes, au contraire du Premier ministre et de son gouvernement, des pouvoirs de Ouaga et même de Dakar qu’il n’a de cesse de fustiger.

Cette mesure de prudence n’aura pas épargné au ” buveur de lait”, expression consacrée pour afficher sa lucidité, une inculpation pour offense à un chef d’État étranger et injures via un système de communication. En clair, le mandat de dépôt contre sa personne n’est que la conséquence du doute émis sur le narratif officiel de la «tentative de déstabilisation du Burkina Faso», qu’il a qualifiée de «montage» dépourvu de preuves. L’infraction est vraisemblablement prévue dans les textes en vigueur, mais son application bancale n’aura échappé à aucun observateur avisé de l’impunité sélective en la matière. Les offenses aux chefs d’Etat étrangers étant manifestement tolérées ou châtiées selon le parti qu’en tirent les autorités et la nature des rapports qu’elles entretiennent avec les cibles.

En sacrifiant somme toute à cette solidarité de faveur, le parquet de la cybercriminalité révèle l’AES sous des traits aussi étranges que hideux : un nivèlement de ses systèmes judiciaires par le bas, sur fond de tendance répressive périlleuse pour les précieux acquis en termes de libertés fondamentales.

Certes la procédure d’Issa Kaou N’Djim est habilement dissociée du vecteur médiatique de son message incriminé, mais il n’en demeure pas moins que la démarche tient d’une audacieuse banalisation de la liberté d’expression et de la presse, avec ses relents de recul imminent vers la résurrection des délits d’opinion. Au demeurant, dans le sillage de l’inculpation de son invité, Joliba TV News en découd également avec la Haute Autorité de la Communication, qui s’est inspirée de la même logique confédérale pour soumettre le confrère Attaher Halidou et ses employeurs à un interrogatoire musclée sur le même élément dénoncé par les autorités burkinabé. Il en résulte l’avènement d’un espace sous-régional où la chape de plomb l’emporte largement sur les libertés et l’imminence d’une dérive liberticide décrite par le journal «Le Témoin» dans sa parution numéro 421 du lundi 1er Août 2024 sous le titre ‘Jusqu’où pourrait aller L’AES ? ‘: «…À l’allure où ça s’accélère, on est en droit de s’inquiéter d’un domaine dans lequel les régimes de l’AES partagent la même posture mitigée sur fond d’indifférence : l’intégration des systèmes judiciaires et la place des droits et libertés de l’individu. Certes on ne parle pas pour l’heure de Cour de justice commune, mais il n’est point exclu que la similitude des régimes et la convergence des enjeux et interits déteignent sur les libertés publiques par une extension de leur restriction ainsi que des sanctions pénales y afférents à un degré supranational. Doit-on craindre, par exemple, que les «atteintes au crédit de l’Etat» nigérien ou burkinabé soient poursuivables au Mali et réciproquement ? »

I KEÏTA

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