Gestion du Projet MERIT : Le flou et l’informel !

0

 

Passation irrégulière de marchés par entente directe ; non-application des pénalités de retard pour un montant de 526 307 FCFA ; achat fictif pour un montant de 220 000 FCFA ; constitution irrégulière des commissions d’ouverture et d’évaluation des offres et élimination irrégulière d’un candidat pour motif infondé… Autant de pratiques qui écornent, aujourd’hui, l’image du Projet Multi-Energies pour la Résilience et la gestion Intégrée des Terroirs (Projet MERIT). Du moins, si l’on en croit, une enquête du Vérificateur sur la gestion de ce projet pendant les exercices 2022 et 2023 (30 septembre).

La gestion du Projet MERIT était au cœur de la controverse depuis sa création en 2022. L’argent coulait de source et dans d’autres sources. Et même s’il y avait un décaissement, c’était sans rapport avec les besoins réelles du projet.

Le Projet MERIT n’a pas seulement perdu de sa superbe. Il est vidé de son âme, vendu au diable. Et jusqu’aujourd’hui, l’ancien Coordinateur du projet Moussa Camara, n’affiche qu’une image de ruine et de désolation. Et pour cause, révèle le rapport du Vérificateur, la mauvaise gouvernance au sein du projet a dépassé l’entendement. En bloc, la gestion du projet MERIT sous le coordinateur Camara est comparable à celle d’une épicerie.

Le Projet MERIT à vau-l’eau

Jugé, pourtant, stratégique dans la politique de l’Etat malien sur le plan de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, la réduction de la pauvreté et la résilience climatique, le Projet MERIT n’échappe pas  à l’appétit vorace de ses responsables. Par petite touche, ils « sucent » les caisses, érigent le népotisme en mode de gestion. L’espoir tant suscité auprès des populations, a viré au cauchemar.

Lors  du contrôle de la gestion du Projet Multi-Energies pour la Résilience et la gestion Intégrée des Terroirs (Projet MERIT), l’équipe de vérification a constaté des irrégularités financières liées à la passation des marchés par entente directe irrégulière, à la non-application des pénalités de retard sur des marchés et à des achats fictifs.  Le montant total des irrégularités financières au sein du Projet MERIT s’élève à 746 307 FCFA.

A en croire, le vérificateur général, l’ex Coordinateur du Projet, Moussa Camara et le Responsable Administratif et Financier du Projet, Mahamadou Bouaré, ont passé des marchés par entente directe irrégulière.

Afin de s’assurer du respect des procédures de passation des marchés, l’équipe de vérification a examiné les dossiers de marchés.  Elle a constaté que le Coordinateur  du Projet MERIT, Moussa Camara et le Responsable Administratif et Financier, Mahamadou Bouaré, ont passé quatre (4) marchés par entente directe irrégulière. En effet, ils n’ont ni requis l’Avis de Non-Objection de la DGMP/DSP ni satisfait aux conditions préalables permettant la passation desdits marchés par entente directe, notamment la capacité technique du prestataire, et l’emploi d’un brevet d’invention, d’une licence ou de droits exclusifs détenus par un seul entrepreneur, un seul fournisseur ou un seul prestataire.

Il s’agit de : – Marché n°004459/CPMP/MDR/2022 du 04 janvier 2023 relatif à l’acquisition de mobiliers de bureau pour le compte du Projet MERIT passé par entente directe pour un montant de 37 955 000 FCFA HT qui avait été déclaré infructueux par la commission car la présentation des spécifications techniques du DAO (dossier d’appel d’offres) ne permettant pas d’évaluer, équitablement, les soumissionnaires. Le prestataire retenu n’était pas le moins disant lors de l’appel d’offres national mais une entente directe a été conclue entre lui et le projet MERIT sur la base de sa proposition initiale négociée à la baisse.

– Marché n°002497/CPMP/MDR/2022 du 20 avril 2022 relatif aux travaux de rénovation des bureaux du Projet MERIT pour un montant de 28 595 000 CFA HT a été passé par entente directe en évoquant l’urgence qui n’est pas une condition de passation par entente directe.

– Marché n°002742/CMP/MDR/2022 relatif au recrutement de consultant pour l’élaboration du manuel d’exécution technique du Projet MERIT d’un montant de 8 500 000 CFA, a été conclu par entente directe en évoquant les délais impartis et le contexte politique du pays.

– Marché n°01940/DGMP/DSP/2023 du 1er juin 2023 relatif au recrutement d’un cabinet pour l’audit financier et comptable du Projet MERIT, d’un montant de 21 535 000 F CFA, a été conclu par entente directe en évoquant l’urgence qui n’est pas une condition de passation par entente directe.

Des combines et des combinards

Le Coordinateur sortant du Projet MERIT, Moussa Camara et le Responsable Administratif et Financier, Mahamadou Bouaré, n’ont pas appliqué des pénalités de retard sur des marchés. Après avoir rapproché la date de réception prévue dans les contrats de marché à celle des PV de réception, l’équipe de vérification a décelé que le Coordinateur et le Responsable Administratif Financier n’ont pas appliqué les pénalités de retard sur six (6) marchés dont la livraison a accusé du retard. Ils n’ont pas pu fournir aucune preuve de l’application des pénalités de retard sur les marchés exécutés en retard pendant la période sous revue. Le montant total des pénalités de retard s’élève à 526 307 FCFA.

Suite aux travaux de la mission de vérification, l’Unité de Coordination Nationale (UCN) du Projet MERIT a envoyé une correspondance au fournisseur du marché n°004458/ CPMP/MDR/2022 lui indiquant que le montant de la pénalité de retard de 1 486 480 FCFA sera déduit de la retenue de garantie. Le fournisseur a donné son accord pour ce prélèvement.

Plus grave, le Coordinateur Camara et le Responsable Administratif et Financier, Mahamadou Bouaré ont procédé à des achats fictifs. Afin de s’assurer de la régularité des dépenses, l’équipe de vérification a analysé les pièces justificatives des achats. Elle a également procédé à des entrevues avec les Responsables du Projet. Du coup, elle a constaté que le Coordinateur et le Responsable Administratif et Financier ont procédé à des achats fictifs.

Rapproché par l’équipe de vérification, le prestataire indique non seulement n’avoir pas connu le Projet MERIT mais aussi n’avoir effectué aucune livraison, encore moins avoir reçu de paiement relatif à l’achat de produits d’entretien des locaux de l’Unité de Coordination National. Ledit chèque n°3150777 du 21 février 2022 d’un montant de 220 000 FCFA a été émis au nom du RAF du Projet MERIT, en la personne de Mahamadou Bouaré. Le montant total des achats fictifs est de 220 000 FCFA.

Et comme si cela ne suffisait pas, le RAF du projet, Mahamadou Boauré  a, irrégulièrement, présidé des commissions d’ouverture et d’évaluation des offres.  Pour  s’assurer du respect de ces dispositions, l’équipe de vérification a analysé les rapports d’ouverture et d’évaluation des offres.  Elle a constaté que le Responsable Administratif et Financier (RAF), le Sieur Bouaré a irrégulièrement présidé des commissions d’ouverture et d’évaluation des offres. En effet, il a présidé les travaux de la commission d’ouverture et d’évaluation des offres pour l’attribution de certains marchés, en lieu et place du Coordinateur ou de son représentant.

Il s’agit des Marchés suivants : – n°001717/CPMP/MDR/2022 du 03 août 2022 relatif à l’acquisition de matériels bureautiques au compte du Projet Multi-Energies pour la Résilience et la gestion Intégrée des Terroirs (MERIT) ; – n°001718/CPMP/MDR/2022 du 03 août 2022 relatif à l’acquisition et l’installation du réseau Informatique ondulé à l’UCN du Projet Multi-Energies pour la Résilience et la gestion Intégrée des Terroirs (MERIT) ; – n°001719/CPMP/MDR/2022 du 03 août 2022 relatif à l’acquisition et l’installation du système de vidéoconférence à l’UCN du Projet Multi-Energies pour la Résilience et la gestion Intégrée des Terroirs (MERIT) ; – n°001720/CPMP/MDR/2022 du 03 août 2022 relatif à l’acquisition de didactiques et audiovisuel au compte du Projet Multi-Energies pour la Résilience et la gestion Intégrée des Terroirs (MERIT) ; – n°01940/DGMP/DSP/2023 du 1er juin 2023 relatif au recrutement d’un cabinet pour l’audit financier et comptable du Projet MERIT.

Par ailleurs, les membres de la commission d’ouverture et d’évaluation des offres ont irrégulièrement éliminé un candidat pour motif infondé.  Ainsi, après un examen minutieux des rapports d’évaluation des offres établis par les commissions, l’équipe de vérification a constaté que les membres de la commission d’ouverture et d’évaluation de l’Offre n°001 du 15 juillet 2022 ont éliminé un candidat, sans motif réel. En effet, dans le cadre de la Demande de Renseignement et de Prix à compétition Restreinte (DRPR) relative à l’acquisition de matériels bureautiques au compte du Projet MERIT, ils ont rejeté l’offre du pli n°5 pour non-fourniture du certificat de non-faillite alors que ladite pièce figure dans les dossiers.

Face à de telles pratiques érigées en mode de gouvernance au Projet MERIT, le Vérificateur, a transmis une dénonciation de faits au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême et au Procureur de la République chargé du Pôle National Economique et Financier.

Jean Pierre James

Commentaires via Facebook :

REPONDRE

Please enter your comment!
Please enter your name here

Leave the field below empty!