Les ministres des Affaires étrangères du Mali, Abdoulaye Diop, celui du Burkina Faso, Karamoko Jean Marie Traoré et le chef de la diplomatie nigérienne, Bakary Yaou Sangaré ne semblent pas être à la hauteur des défis et enjeux diplomatiques auxquels les trois pays de l’AES font face. Cela fait plus d’un an maintenant que les autorités des trois pays de l’Alliance des Etats du Sahel, l’AES, ont pris la décision de se retirer de la CEDEAO avec effet immédiat. L’Organisation sous régionale, conformément à ses textes a donné un an de délai aux trois pays afin qu’ils révisent leur position sans quoi elle actera la demande de retrait, ce qui fut fait après l’expiration du délai statutaire. Les chefs d’Etats de la CEDEAO n’attendent plus que le sommet ordinaire prévu en juin pour répondre aux Etats du sahel, par des mesures déjà annoncées par le Président de la Commission le gambien Aliou Touray. Malgré l’épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des pays de l’AES, leurs diplomates ne font pas grand-chose. Du passeport, à la pièce d’identité AES ; en passant par la libre circulation aucune mesure n’est prise pour pallier à d’éventuels tracas que pourraient subir les citoyens des trois pays. Ne Faudrait-il pas blâmer les chefs de la diplomatie des Etats de l’AES pour leur manque de promptitude et d’anticipation ? Les ministres des Affaires étrangères ont-ils été sincères avec leurs présidents en évoquant les éventuelles conséquences de certaines décisions et surtout de l’isolement diplomatique de trois pays ?
C’est seulement maintenant que la diplomatie des Etats de l’AES se met en branle pour commencer les négociations avec la CEDEAO et certainement chaque pays de l’organisation sous régionale, dans le cadre des relations bilatérales. Ce réveil brutal de la diplomatie de l’AES serait certainement consécutif au rejet par certaines chancelleries du passeport estampillé AES. Et pourtant tous les grands analystes avaient prédit des difficultés que les trois Etats allaient rencontrer après leur brutale décision de retrait de la CEDEAO. On peut être légitimement surpris de s’apercevoir que les ministres des Affaires étrangères des trois pays n’ont pas pris le taureau par les cornes depuis plus d’un an, en engageant une active diplomatie de séduction, et de persuasion pour minimiser les conséquences de l’isolement des trois pays. Le refus par certaines chancelleries de reconnaitre le passeport de l’AES, parce qu’il ne répond pas aux normes requises ne serait que le début des multiples tracas et désagréments auxquels les citoyens seront confrontés. Les Etats de la CEDEAO joueront- ils le jeu ou poseront ils des obstacles ne serait-ce que pour dissuader d’éventuelles velléités sécessionnistes ? La CEDEAO prendra t elle des mesures coercitives pour punir ces trois Etats que certains chefs d’Etat qualifient de rebelles afin de maintenir la cohésion au sein de l’organisation sous régionale?
Ne Faudrait-il pas blâmer les chefs de la diplomatie des Etats de l’AES pour leur manque de promptitude et d’anticipation ?
Les Ministres des Affaires étrangères des pays de l’AES sont vraiment blâmables pour trois raisons essentielles. La première pour leur manque de courage, car malgré l’expérience, en matière de diplomatie de ces trois ministres et surtout les conséquences d’un éventuel isolement ils n’ont pas voulu ou pu dissuader les trois présidents du Mali, Burkina Faso et Niger de prendre cette inopportune décision de retrait de la CEDEAO. Qu’il soit dit en passant le seul fait de créer l’AES ne viole nullement les principes de la CEDEAO. La deuxième raison est que ces trois ministres des Affaires étrangères ont manqué de promptitude et d’anticipation. Ils auraient dû parer au plus pressé pour prendre certaines décisions afin d’éviter de tomber chaque fois dans une situation défensive où l’on entend que le mot réciprocité. Ils pouvaient commencer les négociations d’abord sur le plan bilatéral, d’Etat à Etat ensuite sur le plan multilatéral en formant un ensemble homogène pour négocier avec les grands blocs sous régionaux, régionaux et même internationaux. La troisième raison est non la moindre est la passivité des diplomates de l’AES, au lieu d’adopter une diplomatie pro active tous azimut, ils ont plutôt fait le choix d’une diplomatie sélective en classant les pays entre les amis de l’AES et ses irréductibles ennemis. Ils auraient dû se dire qu’un pays n’a pas d’amis il n’a que des intérêts. En comptant leurs amis, les pays de l’AES ont, à coup sûr, multiplié leurs ennemis.
Les ministres des Affaires étrangères ont-ils été sincères avec leurs présidents en évoquant les éventuelles conséquences de certaines décisions et surtout de l’isolement diplomatique de trois pays ?
Nul besoin d’être diplomate ou d’avoir un master en relations internationales pour imaginer les conséquences des choix de politiques étrangères faits par les trois pays de l’AES. Parmi ces choix on peut citer entre autres le retrait de la CEDEAO, l’expulsion des forces étrangères et surtout les attitudes vexatoires contre certains pays voisins comme la Côte d’Ivoire, l’Algérie, le Benin, le Nigéria pour ne citer que ces quelques têtes de proue. Le diplomate de carrière qu’est Abdoulaye Diop aurait dû convaincre ses homologues de deux autres pays afin de dissuader les trois présidents à agir de la sorte, malheureusement ils ne l’ont pas fait. Maintenant les trois pays font face aux conséquences du manque de courage de leurs ministres des affaires étrangères. Le vin est tiré il faut le boire, les trois pays gèreront maintenant les conséquences des choix politiques faits par leurs dirigeants.
En somme, rien ne saurait justifier le retrait de trois pays de l’AES de la CEDEAO. Ce qui est frustrant c’est la fuite de responsabilité des diplomates, car il parait inimaginable que c’est au moment où les grands ensemble se forment pour faire face aux plus puissants comme les pays continents comme les USA, la Chine, la Russie et l’Inde que l’Afrique se fracture en plusieurs morceaux. Tant que le continent africain ne réalise pas le vœu des pères des indépendances, à savoir les Etats Unis d’Afrique, le continent restera à la traine en dépit de ses immenses richesses.
Youssouf Sissoko