La Transition que dirige le colonel Assimi Goita depuis le 7 juin 2021, a décidé de mener des réformes en profondeur pour une refondation de l’Etat. D’où les Assises nationales de la refondation, tenues du 11 au 30 décembre 2021 sur l’ensemble du territoire
Depuis la rectification de la trajectoire de la Transition le 23 mai 2021, les nouvelles autorités se sont engagées dans un vaste chantier de réformes politiques et institutionnelles qui connaît des avancées importantes. Ces réformes qui visent à corriger les dysfonctionnements de notre architecture politico-institutionnelle, tirent leur origine des Assises nationales de la refondation (ANR).
Ces Assises auront démontré l’engagement collectif et la détermination du peuple malien à faire face à l’avenir sur de nouvelles bases qu’il aura lui-même défini. Elles ont formulé 517 recommandations traduites en actions gouvernementales dans le Cadre de refondation de l’État (CSRE) structuré autour de cinq axes stratégiques. Ces axes touchent l’ensemble des aspirations des Maliens et sont ainsi définis : « gouvernance, réformes politiques et institutionnelles », « défense, sécurité, paix, réconciliation et cohésion sociale », « croissance économique et développement durable », « capital humain, genre ». et inclusion sociale» et «jeunesse, sport, culture, artisanat, tourisme et construction citoyenne».
Les recommandations de l’ANR ont été réparties en trois catégories. La première est constituée de 55 actions prioritaires prévues pour être réalisées pendant la Transition. La deuxième est un panier de 153 actions prioritaires complémentaires qui doivent connaître un début de mise en œuvre pendant la Transition et se prolonger au-delà. La troisième se compose de 309 actions non prioritaires pour la période de la Transition.
55 ACTIONS PRIORITAIRES- Selon le rapport annuel 2023 du Comité indépendant de suivi-évaluation de la mise en œuvre des recommandations des Assises nationales de la refondation (Cinsere-ANR), à la date du 31 décembre 2023, sur les 55 actions prioritaires, 20 ont été réalisés et 33 sont en cours de réalisation. Sur les 153 actions prioritaires complémentaires, 10 ont été réalisées alors que 110 autres connaissent un début de mise en œuvre.
Pour revenir aux actions prioritaires déjà réalisées, l’on ne peut passer sous silence l’élaboration d’une nouvelle Constitution adoptée par référendum par le peuple malien le 18 juin 2023. La promulgation, le 22 juillet 2023 par le président de la Transition, le colonel Assimi Goïta, de la nouvelle Loi fondamentale consacre la 4è République au Mali. La nouvelle Constitution apporte des changements majeurs au niveau des institutions dont elle redéfinit, allège et/ou renforce les missions. Ainsi, le président de la République et le gouvernement demeurent. Et c’est désormais le premier qui détermine la politique de la Nation, nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions.
Quant au Parlement, il sera, au terme de l’article 95 de la nouvelle Constitution, bicaméral c’est-à-dire qu’il comprendra deux chambres : l’Assemblée nationale et le Sénat. Alors que la Cour suprême et la Cour constitutionnelle subsistent et verront à leur coté la Cour des comptes. Par ailleurs, le Conseil économique, social et culturel se voit attribuer une nouvelle mission, celle de s’occuper également des questions environnementales. Il devient de ce fait «Conseil économique, social, culturel et environnemental (CESCE)».
FIN DU NOMADISME POLITIQUE- La nouvelle Constitution consacre en outre la disparition de la Haute cour de justice et du Haut conseil des collectivités. Elle met fin au nomadisme politique en cours de mandat et prévoit la relecture de la loi électorale, la mise en place d’un organe unique de gestion des élections, le choix de l’échelon région ou cercle comme circonscription électorale des législatives et l’ intégration des besoins liés aux secteurs de la sécurité et de la défense dans les priorités de la diplomatie. Dans le premier axe figurent également le renforcement et le financement de la justice, l’organisation des états généraux de la migration, la relecture des textes de la décentralisation, la réorganisation du territoire sur la base des critères de populations, des potentialités économiques, socioculturelles. et géographiques.
Au niveau du deuxième axe, on peut noter la militarisation de la police devenue une réalité depuis octobre 2022, l’attribution au président de la République pour les besoins de la lutte contre le terrorisme, de la sécurité et de la défense du territoire, le pouvoir de prendre un décret pour mobiliser les forces paramilitaires, déployer des officiers supérieurs sur le terrain. Toutes les mesures sécuritaires auxquelles s’ajoutent l’instauration du service militaire obligatoire pour les nouvelles recrues de la fonction publique, la poursuite de l’équipement des Forces armées maliennes (FAMa).
Le troisième axe défini est : « croissance économique et développement durable ». Dans ce chapitre, l’on retient l’informatisation et la digitalisation de l’administration des recettes fiscales et non fiscales pour lutter contre la fraude et la corruption, l’augmentation de la participation de l’État au capital des sociétés minières. Toutes choses qui vont réellement améliorer les recettes de l’État.
Autant les trois premiers axes connaîtront de sensibles mises en œuvres et impulseront un sang neuf dans l’architecture politique, administrative, institutionnelle et économique du Mali nouveau, autant les deux derniers apporteront leur pierre à l’édifice de la modernisation et de la refondation de nous ne payons pas.
Au niveau de l’axe 4, certaines recommandations de l’ANR ont été mises en œuvre. D’autres sont en cours. Ainsi, l’on peut noter la réinstauration du service civique, l’organisation d’une conférence sociale pour négocier un Pacte de stabilité et de croissance, la moralisation du concours d’accès à la fonction publique à travers l’application de critères d ‘équité et de transparence, l’application de l’article 18 du statut général des fonctionnaires concernant le recrutement des personnes vivantes avec un handicap à titre exceptionnel. Ici encore la justice et l’équité sociale, le façonnage d’un nouveau type de Malien débarrassé de certaines habitudes peu appréciées dans notre société sont des objectifs ciblés.
Grâce à la volonté des autorités de la Transition, tout laisse croire que les réformes politiques et institutionnelles porteront leurs fruits. Ainsi, l’ANR a fortement recommandé, entre autres, la relecture de la Charte des partis politiques avec une réaffirmation du statut de chef de file de l’opposition, la révision des compétences de la Cour constitutionnelle en matière électorale.
La mise en place du Sénat et de la Cour des comptes qui a été fortement recommandée. L’ouverture au citoyen de la saisine de la Cour constitutionnelle, l’élaboration d’un mécanisme constitutionnel de destitution du président de la République en cas de forfaiture ou de non-respect de son serment sont prévus par la Constitution du 22 juillet 2023.
Elle prévoit également la participation des Maliens établis à l’extérieur aux élections législatives, l’organisation des élections municipales avant les législatives et la présidentielle, l’intégration de l’imprescriptibilité des infractions en matière de délinquance financière dans le Code de procédure pénale, l’élaboration des modules de formation sur nos valeurs sociétales dans les écoles notamment le Programme national d’éducation aux valeurs (Pnev). Comme on peut le voir, le chantier de la refondation du Mali prend forme. À chacun des citoyens de l’accompagner en s’appropriant sa lettre et son esprit.
Dieudonné DIAMA