Deux femmes de 60 et 65 ans, accusées de sorcellerie, ont été lapidées puis brûlées en public dimanche dans un village du Sud-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, selon plusieurs sources interrogées lundi.
A la tombée de la nuit, un groupe de jeunes de Nyamutiri “a lapidé ces femmes et brûlé leurs corps après les avoir extirpées de leur domicile”, a indiqué à l’AFP André Byadunia, président de la société civile d’Uvira, chef-lieu du territoire où se sont déroulés les faits.
Il a précisé que ces deux femmes avaient été tuées parce qu’accusées par une partie de la population de pratiquer la sorcellerie et “d’être derrière le décès de plusieurs personnes” de la communauté.
“Les cendres sont en train d’être dégagées du lieu du drame”, a de son côté indiqué Makelele Murande, secrétaire administratif de la chefferie des Bafuliru, où ont été tuées les deux femmes, joint par téléphone sur place lundi en milieu de journée. “La police et l’armée n’ont pas pu intervenir à temps pour sauver ces deux dames”, a déploré l’administrateur adjoint du territoire d’Uvira, Timothée Bakanirwa.
Des manifestations ont éclaté par la suite, organisées par “les gens qui ont tué” les deux femmes, a expliqué Kelvin Bwija, un responsable de la société civile dans la zone. Selon lui, les manifestants se plaignaient que les “présumés sorcières qui sont arrêtées sont toujours relâchées par les services de sécurité”.
Makelele Murande a indiqué que “grâce à l’intervention de l’armée”, les barricades des manifestants avaient été dégagées et que “la situation était revenue à la normale”. Selon Nelly Adidja, de l’Association des femmes des médias (AFEM) du Sud-Kivu, 33 femmes accusées de sorcellerie ont été tuées dans la province en 2023, et “bien d’autres ont été chassées de leurs villages et vivent en errance”.
Le président de la société civile d’Uvira dénonce “des pratiques rétrogrades”, qui selon lui doivent être abandonnées. M. Byadunia demande que les “coupables de cet acte” soient poursuivis et déplore “devoir enterrer des femmes lynchées”, alors que débute “le mois de la femme”.
En 2021, le Pr Bosco Muchukiwa, sociologue et directeur général de l’Institut supérieur de développement rural (ISDR) de Bukavu, observait “une résurgence du phénomène” qu’il attribuait à une faillite de l’Etat dans “ses missions régaliennes”, car selon lui, “la police et la justice ne font pas leur travail”.