Politique : Le Niger joue la décrispation

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La junte au pouvoir à Niamey promet une transition courte vers un régime démocratique, poursuivant le dialogue avec la CEDEAO. Malgré les difficultés de financement, le gouvernement adopte un budget ambitieux pour 2024, espérant une levée des sanctions.

Amorce de dialogue national, remise en « liberté provisoire » du fils de l’ancien président Bazoum, la junte au pouvoir tente de faire meilleure figure auprès de la population et des instances internationales. La réunion qui devait se tenir ce 10 janvier avec la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) est finalement repoussée, probablement au 25 janvier. Ce, à la demande du gouvernement nigérien, qui souhaite tirer les conclusions de son Forum de dialogue national.

Incontestablement, l’heure est plutôt à la détente avec la CEDEAO, qui a apprécié, lors d’une réunion récente, la promesse d’une « transition courte » vers un État démocratique. Ce calendrier sera défini avec précision avec la société civile, lors du Forum prévu, puis présenté formellement à l’institution panafricaine, représentée ici par le président du Nigeria, Bola Tinubu.

C’est dans ce contexte de crise que le gouvernement a promulgué son budget 2024. Dont la crédibilité reste à démontrer, compte tenu des révisions de 2023.

Autre signe de détente, donc, la libération de Salem Bazoum, le 8 janvier. L’étudiant de 22 ans, Fils de Mohamed Bazoum  toujours en résidence surveillée, en compagnie de son épouse Khadija –, a rejoint Lomé, la capitale du Togo, le soir même. D’ailleurs, sa libération a été obtenue grâce à l’intervention du président togolais, Faure Gnassingbé et de celui de la Sierra Leone, Julius Maada Bio. Les deux chefs d’État étaient mandatées par la CEDEAO. L’institution faisait de cette libération un préalable avant toute levée des sanctions économiques contre le Niger.

Si les menaces de CEDEAO n’ont pas réussi à faire infléchir le pouvoir de Niamey, les sanctions et la méfiance des opérateurs économiques ont mis à mal l’économie du pays. La population doit faire face à la pénurie des denrées de base, à la hausse des prix, et aux difficultés de l’État à payer les fonctionnaires. Ce, malgré une forte révision en baisse du Budget 2023 (-40%) décidée en octobre. Les banques manquent de liquidités, les ménages subissent chaque jour les délestages du réseau électrique. Et l’État est dans l’incapacité de se financer sur les marchés.

Un Budget en équilibre

Dans le même temps, le contexte sécuritaire reste tendu. Les combats se poursuivent dans la zone des « trois frontières ». Dans la nuit du 6 janvier, des frappes de l’armée régulière contre des « terroristes » près de la frontière du Burkina Faso ont entraîné plusieurs « victimes civiles », a reconnu le CNSP (Conseil national pour la sauvegarde de la Patrie) au pouvoir. Il est donc essentiel pour les autorités de Niamey de montrer des signes d’ouverture afin de bénéficier d’un allègement des sanctions.

C’est dans ce contexte de crise que le gouvernement a promulgué son budget 2024. Dont la crédibilité reste à démontrer, compte tenu des révisions de 2023. La loi de finances 2024, équilibrée en recettes et en dépenses à plus de 2 653 milliards de F.CFA (4,04 milliards d’euros), selon un communiqué du secrétariat général du gouvernement. Qui note que ce budget 2024 s’inscrit dans un contexte marqué au plan mondial par des tensions inflationnistes et le durcissement des politiques monétaires.

Le gouvernement table sur une croissance du PIB réel de 7,9 % en moyenne, sur la période 2024-2026. L’activité serait portée essentiellement par l’industrie, qui enregistrerait une croissance moyenne de 10,8%, suivie des secteurs primaire (+7,2%) et tertiaire (+5,8%).

Du côté des dépenses, les domaines du développement économique et social représentent de 59% des crédits budgétaires, « ce qui traduit la volonté du CNSP et du gouvernement nigérien à ne ménager aucun effort pour réduire les souffrances des populations nigériennes », selon le communiqué.

Les dépenses d’investissement sur les ressources internes ressortent à 476,96 milliards de F.CFA en 2024 (727 millions d’euros) contre 257,68 milliards de F.CFA en 2023. Le gouvernement veut ainsi favoriser le développement à travers le financement des investissements prioritaires identifiés dans le Programme de résilience pour la sauvegarde de la patrie (PRSP) ; ce, financé essentiellement par les ressources propres.

Enfin, les traitements et salaires progressent de 17,97 milliards de F.CFA pour atteindre 363,90 milliards de F.CFA (555 millions d’euros) en 2024. Le gouvernement a prévu un programme de recrutement dans les secteurs prioritaires, notamment l’éducation et la santé et pour le compte des autres ministères sectoriels, en vue de faire face à la baisse sensible des effectifs des Administrations publiques.

Par Laurent Allais

magazinedelafrique.com

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