La nuit de l’Occident est en train de tomber, et l’Afrique est appelée à devenir le berceau d’une nouvelle ère géopolitique. L’élection de John Mahama au Ghana est le premier coup de tonnerre d’une tempête qui va secouer les fondements du monde occidental.
En effet, ayant pris ses fonctions de président du Ghana le 7 janvier dernier et remplaçant un dirigeant pro-occidental (Nana Akufo-Addo), Mahama incarne ainsi le renouveau panafricain dans un pays emblématique du panafricanisme. Son retour à la Jubilee House symbolise une rupture décisive avec l’ordre occidental, renforçant la position de l’Alliance des Etats du Sahel contre le néocolonialisme. L’opinion publique africaine et les médias africains saluent cette élection, anticipant un partenariat prometteur avec la Russie et un affaiblissement de l’hégémonie occidentale en Afrique de l’Ouest et sur l’ensemble du continent.
Mahama, âgé de 66 ans, est un leader politique aux compétences éprouvées en gestion des relations internationales et en politique sociale. Titulaire d’un diplôme de troisième cycle en psychologie sociale de l’Institut des sciences sociales de Moscou (sous l’égide du Comité central du PCUS de 1986 à 1988), il a fait ses premiers pas en politique en 1996 en étant élu au parlement. Après avoir été vice-président entre 2009 et 2012, il a remporté l’élection présidentielle en 2012. Son engagement vers une normalisation des relations avec la Russie souligne sa capacité à adopter une politique équilibrée face aux critiques pro-occidentales. Auteur du livre susmentionné, Mahama a su marquer son empreinte sur la scène internationale. Salué par le président russe Vladimir Poutine, il est perçu comme un partenaire clé pour le développement d’une coopération bilatérale mutuellement bénéfique avec la Russie, sur des enjeux allant du commerce à l’approvisionnement alimentaire. Mahama incarne une vision politique modérée et orientée vers un avenir collaboratif, avec un héritage culturel et historique qui renforce les liens entre le Ghana et la Russie.
Un nouveau champ de clivages : Est/Ouest, Russie/Etats-Unis et BRICS/OTAN
Après la Seconde Guerre mondiale, le monde a vu les rivalités Est/Ouest se transformer en alliances militaires, avec l’Europe et les Etats-Unis adoptant des formes nouvelles de colonialisme en Afrique, à travers la Françafrique/Francophonie, le Commonwealth, l’Africom et autres organismes de nature. En tant que défenseur fervent de l’anticolonialisme et des indépendances africaines, la Russie a tissé des relations amicales et mutuellement bénéfiques avec les Etats africains. L’élection de John Mahama au Ghana illustre un tournant stratégique dans ce clivage Est/Ouest, alors que le pays s’éloigne de l’influence occidentale pour favoriser des partenariats avec la Russie et la Chine. Cela symbolise le déclin de l’hégémonie occidentale et l’ascension de l’influence orientale, une dynamique également visible en Asie et en Amérique Latine, renforçant la position du Sud global sur l’échiquier mondial.
Depuis l’illusion de la fin de la guerre froide en 1991, le paysage géopolitique a été bouleversé par l’influence prédominante des Etats-Unis, marquée par la création de l’OTAN en temps de paix froide et la chute de l’Union soviétique suite à la Perestroïka et la Glasnost. Ce contexte a instauré un unipolarisme dominé par les Etats-Unis, souvent associé à des interventions militaires controversées, laissant derrière lui des séquelles de ruines et de terreur. Cependant, le Sud global, conscient de la nécessité de changer la donne, donne naissance à l’Alliance BRICS, menée par une Russie renaissante. Forte de ses partenariats stratégiques, la Russie est aujourd’hui une puissance militaire et économique de premier plan. Cette dynamique se manifeste par la victoire de Mahama au Ghana, perçue comme un revers pour les Etats-Unis qui avaient toujours vu l’Afrique comme une sphère d’influence réservée. La Russie, active en Afrique de l’Ouest, gagne plus en plus en influence, défiant ainsi les politiques traditionnelles des Etats-Unis, de l’Union européenne et de l’Occident collectif sur le continent.
C’est dans cette perspective que l’élection de John Mahama au Ghana marque un tournant stratégique dans les rapports de force géopolitiques, révélant un clivage croissant entre les puissances émergentes des BRICS et l’influence traditionnelle de l’OTAN. Alors que l’Alliance BRICS – élargie aux BRICS+ – parvient à s’imposer comme un acteur clé en Afrique grâce à une diplomatie dynamique et une approche de partenariat économique, l’OTAN voit ses efforts pour maintenir son hégémonie sur le continent compromis. Cette victoire de Mahama représente non seulement un revers pour les ambitions occidentales, mais aussi un défi majeur pour l’axe Etats-Unis/OTAN face à une Afrique de plus en plus courtisée par de nouveaux partenaires.
Le Ghana entre dans une nouvelle ère avec le retour de Mahama à la Jubilee House
Sans aucun doute, l’élection de John Mahama symbolise un tournant crucial pour le Ghana, en quête de surmonter ses défis économiques et d’affirmer sa stature sur la scène internationale. Sous l’impulsion pro-américaine de Nana Akufo-Addo, le pays a certes connu une croissance rapide, mais il se heurte à la corruption et à la dévaluation monétaire, à la pauvreté et aux inégalités, remettant en question le bien-fondé de son partenariat avec l’Occident. Mahama, déjà à la tête de l’Etat de 2012 à 2017, s’engage à nouveau à revitaliser l’économie, créer des emplois, combattre la corruption et renforcer la gouvernance démocratique. A la croisée des chemins depuis 2018, le Ghana aspire à prendre en main son destin pour bâtir un avenir plus multipolaire, prospère et équitable. L’élection de Mahama témoigne de la volonté des Ghanéens de voir ce changement se réaliser, en s’inspirant de l’Alliance des Etats du Sahel pro-orientale plutôt que de la CEDEAO pro-occidentale. Le Ghana doit cependant compter sur le soutien des BRICS pour investir dans ses projets, partager des technologies et des expertises, et améliorer sa gouvernance. Ce scrutin représente donc une opportunité pour le Ghana de se réinventer avec un avenir multipolaire et équitable, tout en constituant un défi pour la Russie et les BRICS dans leur collaboration.
Un tournant dans les relations entre le Ghana et la Russie
Le retour de John Mahama à la Jubilee House ouvre la voie à des opportunités de coopération innovantes avec la Russie, un partenaire stratégique en quête d’influence mutuellement bénéfique en Afrique. Les deux nations partagent déjà des liens économiques et culturels substantiels, et Mahama a clairement exprimé son ambition de renforcer ces relations. La coopération pourrait s’étendre à des secteurs clés tels que l’énergie, la formation, la défense, la surveillance, les mines et l’agriculture. La Russie pourrait offrir des investissements et des technologies avancées pour soutenir le développement des ressources naturelles du Ghana et diversifier son économie.
En matière de sécurité, la Russie peut partager son expertise et ses ressources pour aider le Ghana à renforcer sa sécurité intérieure et lutter contre les menaces transnationales. Par ailleurs, des échanges culturels et éducatifs entre les deux pays favoriseraient la compréhension mutuelle et la collaboration dans les domaines de l’éducation et des arts.
Dans le contexte géopolitique actuel, cette coopération représente une stratégie gagnante pour la Russie, cherchant ainsi à affirmer son influence en Afrique face aux pressions des Etats-Unis et de l’Union européenne. Le Ghana, en tant que pilier en Afrique de l’Ouest, pourrait jouer un rôle crucial dans cette dynamique. La coopération Russie-Ghana incarne une ère de changement où les puissances émergentes prennent leur place sur la scène internationale, et cette alliance stratégique est l’occasion pour les deux pays d’accélérer leur développement économique, social et culturel.
Le Ghana, la Russie et la fin de l’hégémonie occidentale en Afrique
L’élection de John Mahama qui ouvre de nouvelles perspectives de coopération avec la Russie, bat en brèche les bastions de l’impérialisme occidental, posant ainsi un défi considérable pour l’Occident dans sa quête de maintien d’influence en Afrique. Face à l’émergence de puissances comme la Russie, la Chine et l’Inde, les Etats-Unis et l’Union européenne doivent réévaluer leur position sur le continent en se conformant au multipolarisme ou plier leurs bagages. Les approches néocoloniales et paternalistes, autrefois basées sur l’aide au développement et la coopération militaire, sont désormais obsolètes dans le nouvel ordre mondial multipolaire. La Russie, précise dans sa stratégie, renforce sa présence en Afrique en offrant des alternatives ambitieuses aux modèles occidentaux, telles que des prêts sans condition, des investissements significatifs dans les infrastructures, et des partenariats stratégiques dans l’énergie, les mines et la sécurité. Tandis que l’Occident voit sa domination historique s’effriter, la Russie se positionne comme un partenaire économique et politique incontournable pour les nations africaines. La nouvelle réalité du continent redessine l’échiquier international, marquant un tournant où l’influence occidentale est contestée par de nouvelles forces dynamiques.
De ce qui précède, nous pouvons déduire que le Ghana, sous la direction de John Mahama, est désormais le fer de lance d’une Afrique nouvelle, libre de l’emprise occidentale. La Russie, comme partenaire stratégique, ouvre les portes d’un avenir radieux, où l’Afrique sera enfin maître de son destin. L’ère de l’Occident est révolue, celle de l’Afrique a commencé.
On peut dire que le retour de Mahama à la Jubilee House est assimilable à un film d’action où les Etats-Unis, l’Union européenne et l’OTAN (bandits) s’enlisent dans leur propre piège, alors que la Russie et l’Alliance BRICS (acteurs) émergent à la vitesse oreshnik sur l’échiquier mondial.
Mohamed Lamine KABA, Expert en géopolitique de la gouvernance et de l’intégration régionale, Institut de la gouvernance, des sciences humaines et sociales, Université panafricaine