Le Conseil de sécurité des Nations unies a rejeté ce vendredi 22 mars le texte porté par les Etats-Unis, principal allié d’Israël, soulignant «la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat et durable pour protéger les civils de tous côtés» mais sans y appeler précisé.
Un nouvel échec pour le Conseil de sécurité, une fois de plus paralysé par les bras de fer diplomatique entre les grandes puissances. Le Conseil de sécurité de l’ONU a rejeté, ce vendredi 22 mars, une résolution portée par les Etats-Unis sur un « cessez-le-feu immédiat » dans la bande de Gaza, où plus de 31 000 personnes ont été tuées depuis le début de la guerre le 7 octobre , selon le ministère de la Santé dans l’enclave, contrôlé par le Hamas.
En substance, le texte soulignait « la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat et durable pour protéger les civils de tous côtés, permettre la fourniture de l’aide humanitaire essentielle […], et dans cette optique, soutient sans équivoque les efforts diplomatiques internationaux pour parvenir à un tel cessez-le-feu en lien avec la libération des otages encore détenus ». Onze pays, dont les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne ont voté pour, trois nations – Chine, Russie et Algérie, seul pays arabe au Conseil – s’y sont opposées, la Guyane s’est abstenue.
Principal allié de l’Etat hébreu, Washington s’était jusque-là opposé à l’utilisation du terme « cessez-le-feu » par l’organisation internationale. A trois reprises, les Américains avaient même bloqué des résolutions onusiennes en ce sens en utilisant leur droit de veto au Conseil de sécurité.
Mais le soutien des Etats-Unis s’est atténué au fil des semaines, en raison de la violence de l’offensive israélienne contre un territoire ravagé par les bombardements et menacé par la famine, mais aussi sous l’effet de la pression de la gauche américaine , qui pousse l’administration de Joe Biden à infléchir sa position à quelques mois de l’élection présidentielle. Le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, arrivé ce vendredi en Israël dans le cadre d’une nouvelle visite diplomatique, avait décrit mercredi soir la résolution portée par Washington comme un « signal fort ».
«Deux raisons profondément cyniques»
Seulement, la résolution américaine demeurait un texte timide, qui se contentait d’évoquer la « nécessité d’un cessez-le-feu immédiat » sans l’exiger précisé. La Russie s’en était émue publiquement, menaçant d’utiliser à son tour son droit de veto. « Nous ne sommes pas satisfaits par quelque chose qui n’appelle pas à un cessez-le-feu immédiat », avait déclaré jeudi, face aux journalistes, l’ambassadeur russe adjoint à l’ONU Dmitry Polyanskiy. L’ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield s’était dite « optimiste » pour une adoption, mais la Russie a finalement mis sa menace à exécution, rejointe par son allié chinois.
Les votes de Moscou et Pékin «s’expliquent par deux raisons profondément cyniques. Premièrement, la Russie et la Chine n’ont toujours pas pu se résoudre à condamner les attaques terroristes du Hamas du 7 octobre […], l’attaque la plus meurtrière contre les Juifs depuis l’Holocauste. Ce n’est pas seulement cynique, c’est aussi mesquin… La Russie et la Chine ne veulent tout simplement pas signer une résolution émise par les États-Unis, parce qu’ils préfèrent nous voir échouer plutôt que de voir ce Conseil réussir» , a déploré Linda Thomas-Greenfield dans la foulée du vote.
L’ambassadeur chinois, Zhang Jun, a rejeté des accusations «infondées» et reproché aux Etats-Unis d’avoir traîné des pieds et fait «perdre du temps» au Conseil ces dernières semaines, avant de proposer un texte qu’il a décrit. comme «extrêmement déséquilibré». Le représentant de Pékin a notamment reproché au projet américain de fixer «des conditions préalables au cessez-le-feu, ce qui revient à donner un feu vert à la poursuite du massacre» à Gaza.
L’ambassadeur de l’Algérie, seul pays arabe au Conseil, qui a également voté contre le texte américain, a tenu un discours similaire, reprochant au projet américain de résolution de ne pas « porter un message clair de paix » et de cessation des hostilités. Amar Bendjama a exhorté le Conseil à «exiger un cessez-le-feu clair pour alléger le fardeau de la souffrance palestinienne» .
Initiative française
Un autre projet de résolution, porté par trois membres non permanents du Conseil de sécurité (l’Algérie, le Japon et la Slovénie) circulait également depuis plusieurs semaines. Plus offensif, il « exige [ait] un cessez-le-feu humanitaire immédiat pour le mois du Ramadan, respecté par toutes les parties et conduisant à un cessez-le-feu permanent et durable ».
La France avait également annoncé travailler à son propre projet de résolution. « Il faut maintenant que le Conseil de sécurité se prononce sur un cessez-le-feu immédiat et un accès humanitaire. […] Nous allons reprendre sur la base du projet de résolution français au Conseil de sécurité et travailler avec nos partenaires américains, européens, arabes en ce sens pour trouver un accord », a assuré Emmanuel Macron, réagissant immédiatement aux vétos russes et chinois à l’issue d’un sommet européen à Bruxelles.