Froid diplomatique aux portes du Sahel : La guerre des mots entre Alger et Bamako

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Les relations diplomatiques entre Alger et Bamako viennent de connaître une nouvelle étape cruciale. Les  frappes aériennes menées par Bamako autour de la commune frontalière de Tinzawaten ont vivement fait réagir Alger.  En clair, rien ne va plus entre le Mali et l’Algérie.

Dans le cadre de la reconquête et de sécurisation du territoire national, l’armée malienne continue de mener des frappes aériennes dans la zone de Tinzawaten. Ces frappes attisent la colère de l’Algérie qui affirme  qu’aucune coordination n’a été faite avec elle avant d’effectuer ces frappes de drones.

Ces dernières semaines, les autorités algériennes sont montées au créneau pour dénoncer  cette série de frappes de drones ciblant les environs de la ville de Tinzawaten, commune frontalière à cheval entre le Mali et l’Algérie. Alger demande à l’ONU de mettre un terme aux violations des armées privées utilisées par certains pays tout en demandant de sanctionner ceux qui ont appuyé sur la gâchette.

Cette déclaration des diplomates algériens a jeté de nouveau un nuage épais sur les relations entre les deux voisins, déjà mal en point depuis la mise à mort par Bamako de l’accord de paix d’Alger, signé en 2015 entre le Mali et les rebelles.

Selon des spécialistes sécuritaires au Sahel, l’instabilité sécuritaire qui prévaut dans la zone de Tinzawaten irrite Alger qui craint pour sa propre sécurité.

“L’instabilité récente au Mali, due au conflit à propos de l’autodétermination de l’Azawad, terme utilisé par les indépendantistes, a plongé l’Algérie dans une situation difficile. Aujourd’hui elle craint des répercussions pour sa propre sécurité. On a vu ces derniers jours Alger fortifier ses frontières et déployer davantage de troupes à la frontière avec le Mali, comme d’ailleurs avec la Libye et le Maroc. Donc les inquiétudes des autorités algériennes sont compréhensives vis-à-vis de ce qui prévaut à ses frontières”, analyse une spécialiste en sécurité.

“Or, au regard du contexte régional, il est dans l’intérêt des deux voisins de travailler à se donner la main au risque de jouer le jeu des terroristes, qui se moquent des frontières. Car, on ne le dira jamais assez, la lutte contre le terrorisme, pour être efficace, doit se mener dans la mutualisation des efforts, notamment à travers le partage de renseignements et des opérations conjointes. Inutile donc de dire que s’ils ne se blairent pas, Alger et Bamako ne pourront pas collaborer en vue de porter l’estocade aux groupes armés terroristes qui continuent de semer la mort et la désolation sur leur chemin”, ajoute-il.

Un autre spécialiste malien en sécurité et  lutte contre l’extrémisme violent au Sahel  explique à son tour que l’Algérie est complice de toute cette instabilité dans cette partie du Sahel.

“L’Algérie joue et continue de jouer un double jeu dans cette crise malienne. Au lieu de trouver une solution pérenne pour stabiliser la bande sahélo-saharienne,  elle s’est taillé la part du loup en se faisant passer comme le leader incontournable et incontesté dans les différentes rébellions que le Mali a connues. Les agissements du grand voisin laissent entendre que le Mali est sa chasse gardée, et qu’il doit à ce titre être régi par la pax algeriana à l’exclusion de toutes les autres. Alger a accepté d’offrir le gîte et le couvert aux rebelles Touaregs chassés de Kidal à la fin de 2023”, rappelle notre spécialiste.

“En termes de lutte contre le terrorisme, l’Alger ne fait rien pour aider le Mali. La preuve elle a même refusé d’intégrer le G5-Sahel pour lutter contre les djihadiste alors qu’elle se trouve à la porte du Sahel. On peut dire qu’elle est le parrain du terrorisme parce qu’elle héberge des chefs terroristes sur son sol. Aujourd’hui, si le Mali utilise des drones dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, normalement Alger doit s’en réjouir et fournir toutes assistances nécessaires dont le Mali a besoin. Mais on comprend aisément l’attitude des autorités algériennes qui ne veulent pas la stabilité du Mali”, conclut notre interlocuteur.

Ousmane Mahamane 

 

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