Depuis dimanche dernier (6 avril 2025), le torchon brûle entre l’Algérie et le Mali après l’abattage revendiqué par l’Algérie d’un drone des Forces armées maliennes (FAMa) en opération de surveillance du territoire national. Le motif, à la limite fallacieux, donné par les autorités algériennes a été démonté par le Mali.
Dans la nuit du 31 mars au 1ᵉʳ avril 2025, un drone de l’armée malienne a été abattu à Tinzawaten, ville frontalière entre le Mali et l’Algérie. Quelques heures après l’incident, le ministère algérien de la Défense a déclaré avoir «abattu» un drone ayant «violé» son espace aérien en provenance du Mali. Mais, hier dimanche, le gouvernement malien a réagi par un communiqué prouvant le contraire et dénonçant «une énième provocation du régime algérien».
Celle-ci (provocation) a poussé Bamako à prendre les décisions comme convoquer l’ambassadeur algérien à Bamako en guise de protestation ; le retrait du Mali avec «effet immédiat» du Comité d’État-major opérationnel conjoint (CEMOC/une alliance militaire mise en place en avril 2010 et qui groupe l’Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger)… Le Mali a aussi décidé de porter plainte devant des instances internationales contre le régime algérien pour «actes d’agression».
À noter que dimanche dernier (6 avril 2025), la Confédération des États du Sahel (AES) a aussi accusé l’Algérie d’un «acte d’agression» après la destruction d’un drone des Forces armées maliennes (FAMa) dans la nuit du 31 mars au 1ᵉʳ avril à Tinzawaten. L’AES a dénoncé un «acte d’hostilité» des autorités algériennes, assimilé à une atteinte à l’intégrité de son espace confédéral et à une entrave à la lutte contre le terrorisme. Le collège des chefs d’État de la Confédération AES (Mali, Burkina Faso et Niger) a condamné «avec la plus grande énergie la destruction du drone». Il a affirmé que l’acte «vise l’ensemble des États membres» et constitue une «voie perfide de promouvoir le terrorisme». D’où la décision des trois pays de l’AES de rappeler «pour consultations» leurs ambassadeurs accrédités en Algérie.
Le Mali a décidé de fermer, à partir de lundi dernier (7 avril 2025), son espace aérien à tous les «aéronefs civils et militaires» en partance ou à destination de l’Algérie, a déclaré le ministère malien des Transports et des Infrastructures dans un communiqué publié ce lundi. Cette décision a été prise par réciprocité. En effet, ce département a indiqué avoir appris, par «voie de presse», le communiqué du ministère algérien de la Défense (datant de ce lundi 7 avril 2025), la fermeture immédiate de son espace aérien à tous les aéronefs en provenance et à destination du Mali. Dans son communiqué, le gouvernement malien a dénoncé «la persistance du régime algérien à parrainer le terrorisme international» et a indiqué avoir réagi en «guise de réciprocité».
Quelques actes posés par le gouvernement malien en quête de sa souveraineté ont mis les généraux algériens, qui dirigent et qui ont toujours dirigé le pays, en colère. Il s’agit de l’annonce par le gouvernement du Mali de la fin de l’Accord pour la réconciliation au Mali (APR) parrainé par l’Algérie ; de la prise de Kidal par l’armée malienne ; de la traque des Groupes armés terroristes (GAT) dont les bases-arrière sont en Algérie. Depuis, ce pays n’a de cesse de manifester une hostilité envers le Mali. Ils veulent faire payer aux autorités maliennes leur gestion de la crise du nord qui n’arrange pas les affaires de l’Algérie. Enfin, les autorités algériennes jettent le masque qu’ils ont toujours porté pour semer l’insécurité au Mali.
Rappelons que les dirigeants algériens sont pratiquement en froid avec tous leurs voisins. Coutumières de cette posture diplomatique avec les limitrophes, les belliqueuses autorités algériennes ont des intérêts vitaux dans le désert malien qui justifient leur comportement envers un pays panafricaniste qui a volé au secours de l’Algérie pendant sa guerre d’indépendance contre la France. Aussi étonnant que cela puisse paraître, le Mali est payé en monnaie de singe par un pays ingrat qui insulte aujourd’hui l’histoire.
Kader Toé
Le dernier incident survenu à Tinzawaten, à la frontière entre le Mali et l’Algérie, illustre malheureusement l’engrenage dangereux dans lequel s’enfonce le régime illégitime de Bamako, au détriment non seulement de la stabilité régionale mais surtout des droits fondamentaux des populations touarègues du nord du Mali.
Depuis le coup d’État de 2020, prolongé abusivement par une junte militaire qui refuse obstinément de rendre le pouvoir aux civils, le Mali est engagé dans une fuite en avant sécuritaire, multipliant les provocations, les ruptures diplomatiques et les décisions unilatérales. La dénonciation des Accords d’Alger, signés en 2015 sous l’égide de l’Algérie à la demande expresse d’un gouvernement malien alors démocratiquement élu, a été un point de rupture majeur. Ces accords représentaient pourtant une lueur d’espoir pour l’intégration pacifique et la reconnaissance des droits culturels, politiques et économiques des Touaregs dans la région de Kidal, marginalisés depuis des décennies.
Aujourd’hui, la junte instrumentalise la question de la souveraineté nationale pour justifier une politique de répression brutale contre les Touaregs, sous prétexte de lutte contre le terrorisme. Or, il est fondamental de distinguer les aspirations légitimes des peuples autochtones à vivre dignement sur leurs terres ancestrales des actes des groupes armés extrémistes. Malheureusement, cette distinction semble volontairement ignorée par les autorités de Bamako, qui préfèrent acheter des drones et multiplier les frappes, même au risque de franchir les frontières, comme ce fut le cas avec l’espace aérien algérien.
L’Algérie, quant à elle, fait preuve d’une retenue remarquable. Malgré les provocations répétées, elle reste fidèle à sa doctrine de non-ingérence active et de règlement pacifique des conflits. Son engagement historique pour la stabilité du Sahel ne peut être remis en cause : elle a accueilli les pourparlers de paix, soutenu la médiation, et cherché à créer des cadres de coopération régionale comme le CEMOC. Le fait qu’Alger ait pris des mesures de défense de son espace aérien n’est ni une agression ni un acte hostile, mais une réaction mesurée face à un comportement de plus en plus imprévisible de la part d’un pouvoir malien hors de contrôle.
Il est temps que la communauté internationale cesse de faire preuve d’indulgence envers un régime de transition devenu permanent, qui exploite la rhétorique panafricaniste pour masquer ses échecs et son autoritarisme. Le peuple malien mérite mieux qu’un régime militaire qui confisque la démocratie et entretient des tensions avec tous ses voisins. Et les Touaregs, quant à eux, méritent d’être protégés, écoutés, et pleinement intégrés dans une solution durable, respectueuse de leur histoire et de leurs droits.