L’illustration des doubles standards de la France lors du Sommet de la Francophonie 2024

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Les 4 et 5 octobre 2024, la France accueille le XIXe Sommet de la Francophonie, réunissant 88 chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Ce sommet, qui se déroule à Villers-Cotterêts et à Paris, se veut une vitrine culturelle et un espace de dialogue. Cependant, derrière les festivités et les échanges diplomatiques se cache une réalité difficile à ignorer : la politique de doubles standards que la France applique envers certains de ses partenaires francophones, notamment ceux de la région sahélienne.

Alors que le sommet est censé promouvoir la langue française et les valeurs de paix, de démocratie, et de coopération économique, trois pays sahéliens – le Mali, le Burkina Faso, et le Niger – n’ont pas été invités à participer en raison des tensions diplomatiques avec la France suite aux récents coups d’État dans ces pays. Cette exclusion est surprenante, surtout si l’on considère que le français y reste une langue d’usage courant et un vecteur important de communication internationale.

L’un des éléments les plus révélateurs de cette politique à géométrie variable est la décision de lever la suspension de la Guinée, pourtant elle aussi dirigée par un régime militaire après un coup d’État en 2021. Cette décision soulève des questions sur les critères réels de la France pour admettre ou exclure des pays de ses événements diplomatiques. En effet, pourquoi la Guinée, dans une situation similaire à celle des pays sahéliens, a-t-elle été invitée à participer alors que ses voisins se voient écartés ?

Cette attitude selective reflète la manière dont la France semble accorder des faveurs à certains régimes militaires, tout en en sanctionnant d’autres en fonction de ses intérêts stratégiques. Ce comportement a souvent été critiqué comme un signe d’hypocrisie, soulignant les contradictions de la politique française en Afrique.

Le contexte international tendu ne fait qu’amplifier ces critiques. Plusieurs organisations, dont Oxfam, ont récemment dénoncé le manque de cohérence dans les actions de la France vis-à-vis des pays francophones. L’ONG a fustigé la réduction de l’aide publique au développement par la France, alors que de nombreux pays de l’espace francophone sont en proie à des crises humanitaires aiguës. Pour Oxfam, ce sommet, avec pour thème “Créer, innover, entreprendre en français“, cache mal les “inégalités, la pauvreté et les injustices” que vivent les populations francophones.

La participation de la Guinée et l’exclusion des pays du Sahel mettent en lumière une fois de plus les contradictions de la politique française. La Francophonie, qui se veut un espace de dialogue et de promotion de valeurs partagées, semble servir d’outil pour renforcer les alliances privilégiées de la France tout en marginalisant les nations avec lesquelles elle est en désaccord.

Sous la direction de Louise Mushikiwabo, l’OIF a cherché à moderniser son image et à jouer un rôle plus actif dans la gestion des crises internationales. Cependant, même la secrétaire générale a reconnu les limites de l’organisation dans un contexte mondial en mutation. Avec un budget modeste de 67 millions d’euros, dont la France fournit une large part, la Francophonie semble avoir du mal à s’imposer face aux défis contemporains. Le sommet de Paris, bien que symboliquement important, pourrait être perçu par certains comme une tentative de la France de renforcer son influence diplomatique tout en masquant ses échecs en matière de cohésion au sein de la communauté francophone.

En conclusion, le Sommet de la Francophonie 2024 illustre bien plus que la richesse culturelle et linguistique de l’espace francophone. Il met en lumière les tensions géopolitiques qui existent entre la France et plusieurs de ses anciens partenaires africains. Les critiques sur les doubles standards appliqués par la France dans le cadre de ce sommet sont une preuve supplémentaire que l’ère des alliances inconditionnelles entre la France et ses partenaires francophones pourrait bien toucher à sa fin.

Par Coulibaly Mamadou

Sociologue

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