Sahel : La rupture actée entre l’AES et la CEDEAO

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Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont officiellement acté leur retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le 29 janvier 2025, concrétisant ainsi une décision annoncée un an auparavant. Cette rupture marque un tournant historique pour ces trois pays sahéliens, qui ont choisi de prendre leur distance avec l’organisation régionale pour renforcer leur coopération au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), érigée en confédération en juillet 2024.

Dans un communiqué publié mercredi, la Commission de la CEDEAO a annoncé qu’elle mettait en place une structure pour faciliter les discussions avec les trois pays. Elle a insisté sur la nécessité de préserver la libre circulation des citoyens burkinabè, maliens et nigériens, en leur permettant de continuer à jouir de leurs droits de circulation, de résidence et d’établissement sans visa « jusqu’à nouvel ordre ».

Parallèlement, l’AES a décidé de déployer son propre dispositif institutionnel, notamment par l’introduction de nouveaux passeports communs aux trois pays, remplaçant progressivement les anciens documents arborant le logo de la CEDEAO. « Nos trois chefs d’État ont pris la mesure juste », a déclaré le chef de la diplomatie burkinabè, Karamoko Jean Marie Traoré, insistant sur la volonté de créer « un espace réel d’intégration économique, de solidarité et de fraternité ».

Manifestations en soutien à la rupture
La décision de sortie de la CEDEAO a été accueillie avec enthousiasme par une partie des populations des trois pays. De nombreuses manifestations de soutien ont eu lieu au Mali, au Burkina Faso et au Niger. À Ouagadougou, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées à la Place de la Nation, où étaient présents le Premier ministre burkinabè Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo et plusieurs personnalités politiques. Des drapeaux burkinabè, maliens et nigériens flottaient dans la foule, accompagnés de pancartes hostiles à la CEDEAO et à la France. À Bobo-Dioulasso, Fada, Tenkodogo et d’autres villes du Burkina Faso, des manifestations similaires ont eu lieu.

Ce retrait de la CEDEAO s’inscrit dans un contexte de tensions grandissantes entre l’organisation régionale et les trois pays de l’AES, qui ont connu des coups d’État successifs en mai 2021 (Mali), septembre 2022 (Burkina Faso) et juillet 2023 (Niger). Ces événements avaient entraîné de lourdes sanctions économiques imposées par la CEDEAO, levées progressivement en janvier et février 2024 après l’annonce de leur départ de l’organisation.

Lors de son 66ème sommet ordinaire du 15 décembre 2024, la CEDEAO avait tenté de fixer une période de transition de six mois pour organiser un retrait progressif. Cependant, l’AES a rejeté cette proposition, la qualifiant d’ « unilatérale » et visant à entraver leur « démarche de reconquête de leur souveraineté ». Les ministres des Affaires étrangères de l’AES, réunis à Ouagadougou, ont exprimé leur volonté d’une « convergence de vues » sur les modalités de séparation avec la CEDEAO, tout en saluant « l’adhésion massive et spontanée » des populations à cette nouvelle orientation politique.

Madiassa Kaba Diakité

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