Le Cesc a été créé en 1999 par la loi No 92-031 signée par Alpha Oumar Konaré le 19 octobre de la même année. Il compte, de par cette même loi, 56 membres et sur ce nombre, 12 sont réservés « aux représentants des salariés du secteur public et privé »- donc des syndicats. Et l’article 9 de cette loi stipule que : « les douze représentants des salariés (…) sont désignés sur proposition des organisations syndicales les plus représentatives ». La loi a l’avantage d’être on ne peut plus claire et ce concept sur la représentativité est ici capital. Mais avec tout cela, le président Alpha Oumar Konaré va trouver le moyen de signer un décret présidentiel (qui transforme le concept de « les plus représentatives » en « la plus représentative » et d’exclure ainsi tous les autres syndicats à l’exception de l’Untm à qui, il attribue la totalité des 12 places. Le président ATT, comme dans bien de domaine, mettra ses pieds dans les pas laissés par « Alpha ».
Les autres syndicats s’aperçoivent bien évidemment de la supercherie basée sur le viol de la loi par celui qui est le garant le plus attitré. Et ils ont attaqué le décret présidentiel incriminé en justice – devant la Section Administrative de la Cour Suprême du Mali. Parmi eux, la Cstm. La Confédération Syndicale des Travailleurs du Mali, Cstm, a vu le jour en 1997. Elle s’est classée rapidement comme étant la 2e centrale sur les 4 que compte le Mali. La Cstm refusera le fait accompli et, avec d’autres, attaquera le décret présidentiel violeur de loi devant la Cour Suprême. Elle saisira aussi le Bureau International du Travail, Bit, qui recommandera au gouvernement d’ouvrir l’accès au Cesc devant la Cstm.
Après la pluie (AOK-ATT), le beau temps (IBK) ?
La Cstm va devoir saisir la Cour Suprême à trois reprises pour faire cesser le viol de la loi par le chef de l’Etat et casser le monopole anticonstitutionnel accordé à l’Untm au Cesc : en 2000, en 2002 et enfin en 2007. Dans les trois procès, le gouvernement perdra trois fois et par trois fois, il maintiendra le cap de mauvaise espérance pour vaquer vers les rivages nauséabonds du double viol et de la loi et des arrêtés de la Cour Suprême. En effet, par Arrêtés No 030 daté du 28 septembre 2000, Arrêté No 76 du 15 aout 2002 et Arrêté No 135 du 16 aout 2007, la Cour Suprême va annuler le décret présidentiel violeur et anticonstitutionnel qui accorde les 12 places des syndicats du Mali à la seule Untm. Et ce, pour « excès de pouvoir ».
La question au jour d’aujourd’hui est la suivante : que va faire le gouvernement sous IBK ? Continuer à violer la loi de la République du Mali et ignorer les arrêtés de la Cour Suprême comme ses prédécesseurs ou corriger le tir et faire triompher l’Etat de droit ?
La semaine dernière, nous avons eu la surprise d’apprendre, via le Jt de l’Ortm (télévision d’Etat), que la Cstm avait commencé par engager les négociations par rapport à ce problème. Les choses vont-elles dans le sens souhaité par la centrale lésée ? Il est permis d’avoir quelque doute là-dessus si l’on se réfère à ce qui se passe à un niveau un peu subalterne. Et plus précisément du point de vue de Yaya Gologo, Secrétaire général du ministère en charge du travail. Le haut commis de l’Etat ne reconnaît que « la loi organique qui dispose que les représentants des salariés sont désignés par les syndicats ». Mais il pose un problème de représentativité pour dire que seules des élections professionnelles pouvaient donner une idée exacte de la représentativité de chaque centrale et de dégager ainsi des « critères objectifs de représentations ». Il ajoute que d’ici 2015, il n’est pas possible de conduire ces élections. Que donc « le gouvernement décide de maintenir le statu quo en rapport avec le passé et à reconduire (…) la seule Untm, la centrale historique ». On notera que l’Untm n’est pas seulement « la plus représentative » mais elle est aussi «l’historique ». Il s’agit là d’une vielle rengaine qui date de 1999 : il faut des élections professionnelles. Mais on ne les organise jamais.
Enfin, cette sortie du Secrétaire général constitue-t-elle son point de vue personnel ou reflète-t-elle la position du gouvernement ? On verra prochainement si l’Untm va continuer à être au-dessus de la loi. Si le nouveau pouvoir va lui aussi se coucher devant elle. A suivre donc !
Amadou Tall