Au Mali, des secteurs clés sont aujourd’hui paralysés par une cascade de grèves. Les travailleurs revendiquent de meilleures conditions de travail et de vie. Le secteur de la santé est en grève illimitée depuis le 9 mars. Le secteur de l’éducation est aussi en ébullition. Après plusieurs grèves, les syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016 (SYLDEF, SYNEB, SYNESEC, SYNEFCT, FENAREC, SYPESCO) prévoient de battre le pavé le 5 avril prochain pour demander au gouvernement de respecter ses engagements. Ces grèves occasionnent d’énormes souffrances chez les populations. Pour demander aux autorités maliennes de mettre fin à ces souffrances, le Mouvement « Trop c’est trop » tient un sit-in quotidien, de 9 heures à midi, depuis le 27 mars 2017, devant la Bourse du travail de Bamako.
Depuis le 27 mars 2017, tous les yeux sont rivés sur le Palais de la culture de Bamako, les berges du fleuve Niger, où se tient la conférence d’entente nationale censée ramener la paix et réconcilier tous les fils du Mali, une mesure inscrite dans l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger. L’événement mobilise toute la presse nationale et internationale. A quelques kilomètres de là, en plein centre ville de Bamako, devant la Bourse du travail, lieu hautement symbolique de toutes les luttes au Mali, une dizaine de jeunes regroupés au sein du mouvement «Trop c’est trop » tiennent, aussi, de 9 heures à midi, un sit-in quotidien de protestation, d’indignation contre les autorités du pays, suite aux grèves intempestives dans des secteurs vitaux du pays : la santé et l’éducation.
Déterminés, les animateurs du « Mouvement trop c’est trop » bravent journalièrement les conditions climatiques défavorables, le soleil ardent, une température élevée autour de 40°c et le vent chaud et sec de cette fin de mois de mars. Les messages sont sans équivoques sur les banderoles des manifestants : « Nous demandons aux autorités du pays de mettre fin aux souffrances du peuple » ; « Trop de morts dans les hôpitaux, trop d’indifférence du gouvernement » ; « nous avons droit à la santé » ; « nous avons droit à l’éducation »…
Dans une lettre qu’ils adressent au Gouverneur de Bamako, le 30 mars, les manifestants mettent les autorités maliennes devant leurs responsabilités : « nous déplorons les pertes en vie humaine tous les jours dans les hôpitaux pour faute de soins. L’avenir des enfants du Mali sont en train d’être hypothéqué avec les grèves des étudiants et des enseignants ». « Nous pensons que c’est un devoir régalien pour tout Etat de trouver des solutions à ces problèmes pour le bien être de leur peuple », poursuit la lettre signée par Amara Sidibé, l’un des portes paroles du mouvement.
Le même jour, les policiers font une descente à la Bourse du travail. Les manifestants se verront retirer leur banderole. Le lendemain, le vendredi 31 mars, les forces de l’ordre vont intimer l’ordre aux manifestants de se disperser. « Sur instruction ferme du premier ministre, nous avons pour mission de vous faire partir de gré ou de force », disent –ils.
Le samedi 1er avril, cinquième jour de la contestation, les manifestants se sont donnés rendez vous devant l’hôpital Gabriel Touré. Ici aussi, les forces de l’ordre vont s’inviter pour empêcher la manifestation.
« On est là pour nos mamans qui sont enceintes, nos petits frères et petites sœurs et nos grands parents qui meurent pour faute de soins, surtout en cette période de forte chaleur. Nous allons continuer la lutte jusqu’à avoir gain de cause. Les forces de l’ordre peuvent faire ce qu’ils veulent, mais on ne va pas baisser les bras inchallah ! On n’a pas commis de crimes on veut juste que le gouvernement réagisse. On a l’impression que le gouvernement aussi est en grève. Il fait semblant de n’être au courant de rien mais on continuera jusqu’à ce qu’il réagisse quelque soit le temps que ça prendra ! », explique, très déterminée, Bintou Touré, une manifestante et étudiante en communication. Selon la jeune étudiante, l’heure est très grave et tout le monde devrait se faire sien l’adage de Joseph Ki Zerbo : « N‘an lara, an sara (Si nous nous couchons, nous sommes morts). »
Madiassa Kaba Diakité