Siaka DIAKITE, Sécrétaire Général de l’UNTM : “ Nous ne voulons pas de Koulouba, mais de bien-être ”

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A moins de deux semaines du 1er tour de l’élection présidentielle du 29 avril 2007, l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) donne de la voix et brandit l’arme ultime du syndicat : la grève. Siaka Diakité, le secrétaire général de l’UNTM, qui dénonce la lenteur du gouvernement à éteindre le cahier de doléances de 2006, prévoit d’envoyer les 13 syndicats nationaux en grève dans quelques jours.rn

Les Echos : Vous avez soumis de nouveaux points de revendications au gouvernement. Peut-on savoir l’état des négociations ?

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Siaka Diakité : En 2005, l’UTNM a signé un protocole d’accord en 14 points avec le gouvernement. Le 1er mai 2006, nous avons déposé auprès du gouvernement et du patronat un cahier de revendications en 18 points. Nous avons exigé que le protocole de 2005 soit éteint pour commencer les négociations sur les doléances de 2006. C’est fort de cet état d’esprit que le protocole d’accord a été éteint. Mais comment ? Quatre points étaient restés insatisfaits. Il s’agit de l’adoption d’un plan social Huicoma, le paiement des arriérés des compressés et partants volontaires, les prix des denrées de première nécessité et l’uniformisation des services de l’emploi, du travail et de la sécurité sociale. Nous avons eu plus tard satisfaction sur le plan social de Huicoma. Nous avons accepté au cours des négociations, 18 mois d’indemnités négociées au lieu de 24 mois exigés par le syndicat. La situation des camarades syndicalistes de Transrail-SA a été régularisée. Il leur a été payé six mois d’arriérés de salaires en plus de leur réintégration à Transrail-SA à leurs anciens postes.

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Les Echos : Qu’est qui justifie alors votre colère ?

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S. D. : Nous avons fait la remarque lors de nos différentes rencontres avec le gouvernement et le patronat que le Premier ministre, chef du gouvernement, nous appelle par deux fois pour mieux comprendre le contenu du cahier. Ce qui, de notre point de vue, constitue une aberration. Nous avons accepté par deux fois cette rencontre d’arbitrage. La dernière remonte au mardi 10 avril 2007. A cette occasion, nous lui avons dit : trop c’est trop. Il faut arrêter pour savoir exactement qu’est-ce qu’il peut proposer pour ce cahier. Ce cahier a un contenu substantiel. En cours de négociations, aujourd’hui, nous pouvons dire que si des avancées sensibles sont ressenties auprès de la fourniture des notes techniques sur les 18 points, par contre le positionnement du gouvernement ne se fait pas sentir. Pourtant, l’UNTM avait fixé son ultimatum au 31 mars 2007 pour le règlement définitif de ses revendications. Mais favorables au dialogue social, nous avions dit que le chef du gouvernement nous ayant fait appel pour apporter son arbitrage, il faut attendre les derniers mots de celui-ci. Ce qui a obligé la centrale syndicale à organiser un point de presse le lundi 16 avril 2007 pour prendre à témoin l’opinion nationale et internationale.

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Les Echos : Qu’est-ce qui vous irrite le plus, l’attitude du gouvernement ou la non-satisfaction des revendications ?

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S. D. : Nous sommes très mécontents du traitement du dossier par le gouvernement. Une note technique de non-engagement d’arbitrage pour la compréhension du Premier ministre n’a pour nous aucune signification que de se donner du temps pour faire endormir les doléances. Organisation apolitique, l’UNTM est indépendante. Etant dans un Etat républicain et selon les dispositions constitutionnelles, le président de la République demeure en fonction jusqu’au 8 juin 2007. Nous allons persister, continuer à revendiquer jusqu’à ce que nous ayons gain de cause. Mais nous nous sommes dits, que la prudence exigerait, pour qu’on ne donne pas une autre connotation à notre action syndicale, qu’il ne faudrait pas imposer d’aller en grève avant le 1er tour des élections pour ne pas permettre à ces politiciens de tronquer ou de récupérer notre action. Je l’ai maintes fois affirmé : l’UNTM n’a nullement envie d’aller à Koulouba. Mais nous avons besoin de manger, de nous vêtir et de nous soigner.

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Les Echos : C’est sûr que vous vous gardez d’aller en grève avant l’élection présidentielle du 29 avril 2007…

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S. D. : Il n’est pas exclu d’aller en grève à l’heure où nous sommes. Tout dépendra de la réponse que le Premier ministre va donner à travers son arbitrage. Un courrier lui a été expressément adressé hier (Ndlr : lundi 16 avril 2007) en lui signifiant le niveau de satisfaction de l’UNTM par rapport aux propositions faites par le gouvernement et le patronat. Si nos attentes sont comblées, on ne déposera pas de préavis mais avant le mercredi prochain (aujourd’hui) s’il n’y a aucune réaction, nous allons utiliser l’arme ultime du syndicat.

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Les Echos : l’arme ultime du syndicat, c’est quoi dans votre jargon ?

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S. D. : L’arme ultime d’un syndicat, c’est la grève.

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Les Echos : S’agira-t-il de grève limitée ou illimitée ?

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S. D. : Pour aller en grève au Mali, on est sujet au dépôt d’un préavis de 15 jours. La grève d’un mouvement syndical est toujours limitée. Les dispositions légales prévoient quand une grève commence, et quand elle finit. A moins que l’on aille vers une grève politique.

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Les Echos : En allant en grève, à la veille de la présidentielle, l’UNTM ne va-t-elle pas donner raison au pouvoir en place qui la soupçonne  d’être à la solde d’un parti politique ?

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S. D. : Manipulée par le politique parce que nous déposons un préavis de grève ? En tout état de cause, l’histoire de l’UNTM et du front social malien en témoigne suffisamment. Pendant ce régime d’ATT, notre centrale a déjà observé deux grèves. En cinq ans, c’est quand même trop pour un régime qui se veut être le Parti de la demande sociale. On ne peut rien avoir avec cet Etat sans aller en grève. Je le dis ici solennellement, aucun politique ne pourra tirer l’UNTM par le bout du nez. Nous ne pourrions être manipulés que par nos misères, le comportement de l’Etat et du patronat vis-à-vis de nous. Il est vrai et bon de le noter, à la veille de ces élections, mêmes neutres et indépendants en politique, nous suivons les politiciens attentivement. On ne va pas les laisser faire. Quand on le sentira, on va faire un exutoire. Ça s’est fait à la Bourse du travail en 1991. On a les moyens, on a les stratégies, la couverture territoriale nationale et extérieure. Notre démocratie ne sera pas hypothéquée par les intérêts sordides de qui que ce soit.

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Propos recueillis Par Abdrahamane Dicko

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