Rien ne va plus entre les travailleurs et la direction de Total-Mali. Excédés par le mépris, l’injustice de la direction et leurs conditions de vie précaire, les 72 agents locaux de la multinationale donnent de la voix et du geste. Ils réclament une augmentation salariale de 100 % et l’octroi de diverses primes. Des doléances assorties d’un préavis de grève de 72 h à compter du 24 septembre 2006 à minuit.
Total-Mali compte 75 travailleurs dont 3 expatriés (le directeur général d’origine sud-africaine, le directeur administrateur, qui est un Burkinabé et le directeur commercial, un Nigérien). Le Malien travaillant à Total-Mali, quel que soit son grade ou son poste de responsabilité, gagne 5 fois moins que son collègue expatrié ayant les mêmes compétences et diplômes. Les expatriés ont des salaires et des avantages faramineux avec « la prise en charge totale de leurs frais médicaux, de primes de logements, frais scolaires des enfants, etc. ». Selon un agent, la principale doléance portant sur l’augmentation des salaires à 100 % n’est pas du tout excessive. Ce sont les nationaux, explique-t-il, qui vont au charbon et exécutent la plus grosse part des tâches.
Les nationaux, cadres et travailleurs subalternes confondus de la société, disent qu’ils ne sont pas contre les disparités de traitements liées selon eux, aux exigences de l’expatriation. En revanche, ils se considèrent comme les dindons de la farce. Le mémorandum de revendications annexé au cahier de doléance détaillé en 13 points décrit la dégradation de l’atmosphère de travail dans la compagnie.
Le mémo fait état du bas niveau des salaires par rapport à d’autres collègues d’autres multinationales et d’autres sociétés de la place. Le manque d’outil de travail, de frais médicaux et scolaires, de prêts et primes de logements entre autres, en rajoute davantage à la colère des pétroliers.
Promesses non tenues
Les démarches pour une augmentation salariale ont véritablement commencé en novembre 2005. Les promesses faites par la direction n’ont jamais été tenues. Le comité syndical de Total-Mali affilié à la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM) juge la situation intenable après plusieurs années d’attente et de patience
La cohésion du syndicat vise surtout l’aboutissement des doléances. Le personnel accuse la direction de jouer au dilatoire et exprime son ras-le-bol contre le directeur général qui n’a pas selon lui, de considération pour eux.
Le cahier de doléances a été déposé le 19 juillet 2006. Le directeur n’a réagi que trois semaines plus tard, à en croire des membres du comité syndical. Selon ces derniers, le directeur qui n’a que mépris et dédain pour ses collaborateurs est parti en vacances. Il a laissé les négociations entre les mains des gens qu’il a désignés et qui doivent être intéressés au résultat.
« Difficile pour nous d’avoir une culture d’entreprise », témoigne un agent, qui ajoute : « j’ai des collègues qui ne peuvent pas se payer par mois un sac de riz avec leurs salaires ou payer des ordonnances ».
Toujours selon le syndicat, les négociations n’ont pris en compte que les problèmes périphériques (les différentes primes). L’augmentation des salaires de 100 %, qui constitue l’ossature du cahier de doléance, a été occultée. C’est suite à l’envoi du préavis de grève à la maison-mère à Paris, qu’une prime de logement leur a été octroyée pour la première fois dans l’histoire de Total qui est au Mali depuis 1950. Les frais médicaux ont été aussi revus à la hausse.
Hier, les négociations continuaient entre les deux parties sous l’égide de la direction nationale du travail, du Groupement professionnel du pétrole (GPP) et de la CSTM.
L’exécution du préavis de grève aura des conséquences incalculables sur Total dont les dépôts de Bamako, Tombouctou, Sadiola, Yatela, Diamou, et Kayes seront paralysés. Seul l’aéroport de Bamako Sénou est épargné.
Nos démarches auprès de la direction de Total-Mali pour avoir son avis contradictoire, sont demeurées vaines. Le Daf, l’intérimaire du Dg, était parti à une réunion. Son intérimaire, le directeur commercial, nous a gentiment mais fermement renvoyés en affirmant qu’il n’avait pas de rendez-vous avec nous. Il n’a pas non plus daigné prendre nos appels pour fixer un rendez-vous.
Affaire à suivre.
Abdrahamane Dicko“