Les douze représentants des salariés du secteur public et du secteur privé sont désignés par les organisations syndicales les plus représentatives ». Tel est, clairement formulé, l’article 9 de la loi n°92-031 promulguée le 19 octobre 1992 par le président Alpha Oumar KONARE régissant la représentativité des travailleurs dans le Conseil économique,social et culturel. Pour ne l’avoir jamais respecté, les présidents KONARE et ATT ont régulièrement vu leurs décrets de composition des différents Cesc cassés par la Cour suprême. Mais les arrêts de la respectable, voire vénérable institution, qui ne sont par essence susceptibles d’aucun recours et qui s’imposent donc, KONARE et ATT les ont toujours foulés aux pieds. Pourquoi ?
Le Saint et le démon, parce qu’ils ne peuvent point se comprendre en raison des logiques diamétralement opposées de leur existence, ne peuvent jamais devenir des amis. Telle est la situation que vivent actuellement la Cstm et Hammadoun Amion GUINDO d’un côté et, de l’autre côté, le gouvernement et Amadou Toumani TOURE. Peu importe aux derniers que la Cour suprême casse les décrets présidentiels de nomination des membres du Cesc pour abus de pouvoir. En même temps, pas question pour GUINDO et les siens d’accepter ou de cautionner les arbitraires. Pour Hammadoun Amion GUINDO, le rôle d’un syndicat, c’est de défendre, quel que soit le régime politique du moment, les intérêts et les droits des travailleurs. C’est donc pour GUINDO comme un exercice perpétuel que de rappeler tout simplement, à tout moment, l’Etat à ses devoirs régaliens. C’est d’attirer l’attention de la République et des autorités sur les dérives et sur les voies qui peuvent y mener. C’est de dénoncer les manquements à la transparence, les fraudes, les comportements corrupteurs et la corruption. Bref, c’est d’avoir une vigilance soucieuse à l’égard des valeurs qui fondent la République et les intérêts vitaux de la nation.
Pour Amadou Toumani TOURE, très certainement au regard des actes quotidiens posés, la République et ses institutions peuvent se passer de vertu chez ceux qui les servent. Dans son optique, même président du Conseil supérieur de la magistrature qui lui confère la qualité honorable de premier magistrat de l’Etat, le président du Mali peut refuser ou ignorer les arrêts des instances judiciaires, même si c’est la Cour suprême. Gouverner devient un exercice libertaire, un gymnase où l’on en fait à sa tête, méprisant sans cesse les règles de céans.
Voie royale pour Bittar illégalement promu
Mu par une telle conception délétère du pouvoir, ATT en est arrivé à agir en véritable colonial en pays conquis. La dernière illustration en est à la nomination des membres du Conseil économique, social et culturel. En effet, en flagrante violation de la loi, la Cstm a été écartée pour la troisième fois. Le groupement professionnel des commerçants, légalement autorisé à siéger au sein de l’institution et qui totalisait trois mandats de présence, a été lui aussi exclu au profit de Jeamille BITTAR qu’aucune loi de la République n’autorisait à y faire acte de candidature. Et c’est lui qui est devenu le président de l’institution au seul motif que le poste devait absolument échoir à un proche du pouvoir.
Mais pourquoi ATT ne veut pas de la Cstm ? Pourquoi s’est-il toujours acharné à l’exclure du Conseil supérieur de la Fonction publique, des conseils d’administration de l’Anpe et de l’Inps, et du Conseil économique, social et culturel malgré les arrêts pertinents de la Cour suprême ? C’est que Hammadoun Amion GUINDO prend tout simplement son rôle de syndicaliste au sérieux ; ce qui vaut à la Cstm la sympathie du Bit qui lui apporte des appuis tant techniques, financiers que pédagogiques de qualité. Une reconnaissance internationale qui, paradoxalement, amène l’Etat du Mali à plutôt subventionner indirectement l’Untm au détriment de la Cstm. Comportement vérifiable sur acte qui ne prendra du temps à personne.
Casser du Hammadoun
C’est parce que, contrairement à la Cstm , l’Untm s’est défaussée complètement de sa responsabilité de défense des intérêts du monde du travail. Les dirigeants de la première centrale syndicale, Siaka DIAKITE en tête, sont plus soucieux de fréquenter les allées du pouvoir, plutôt en quête permanente de conforts matériels, que de chercher à résoudre les problèmes de leurs militants. Le pouvoir politique en place veut bien un syndicat si accommodant. Toutes les machinations sont donc autorisées pour, à défaut de casser la Cstm , l’affaiblir en la réduisant à sa plus simple expression. S’il ne tenait qu’à l’Etat ATT, tous les travailleurs du Mali seraient affiliés à la seule Untm.
Casser du Hammadoun Amion GUINDO est ainsi devenu une priorité, un impératif même. L’acte le plus retentissant dans ce complot odieux s’est illustré par l’abandon de la Cstm par le comité syndical de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali qui a bruyamment atterri à l’Untm. Le président de la Chambre de commerce et d’industrie, Jeamille BITTAR, est devenu comme par enchantement le président du Cesc. Mais avant, pour se plaindre de l’ostracisme qui frappe la Cstm , GUINDO a du adresser une lettre au Premier ministre Modibo SIDIBE pour defaut de réponse aux correspondances de sa centrale. Il y dit, en sa qualité de secrétaire général, avoir « le regret de constater que toutes les correspondances… adressées sont restées sans suite depuis votre arrivée à la Primature ». Et d’ajouter que le comité exécutif national de la Cstm « a eu l’occasion de faire le même constat quand vous étiez secrétaire général de la Présidence ». Dans la même veine, lorsque le président de la République a dit avoir accepté la décision de justice après l’abrogation de son décret relatif au litige ayant opposé le Vérificateur général à certains de ses collaborateurs, GUINDO a immédiatement écrit au chef de l’Etat pour lui rappeler, s’il ne le savait pas, que l’Etat de droit ne doit pas être géré par le système de « Deux poids, deux mesures ». Car le président de la République n’a jamais respecté les décisions de la Cour suprême concernant la Cstm. Et GUINDO de lui dire : « depuis votre arrivée aux affaires et malgré tous vos engagements verbaux, vous n’avez jamais voulu respecter la chose jugée… ». le secrétaire général de la Cstm saisit alors l’opportunité pour rappeler au chef de l’Etat que : « Les membres et responsables actuels de la Cstm sont ceux qui étaient à la Bourse du travail, donc dirigeants de l’Untm en 1991 ». Chacun y va de sa compréhension.
Tout compte fait, entre la Cstm et l’Etat arrogant, rien ne va plus. Le 08 décembre dernier, la centrale syndicale a organisé une marche de protestation de son exclusion du Cesc au cours de la laquelle elle a réaffirmé sa fidélité a sa mission de défendre et de protéger les intérêts des masses laborieuses, qui la conduit toujours à exprimer son avis sur les grandes questions de la nation. L’appel qu’elle a lancé à l’issu de la marche se termine par une invite à la montée au front : « La Cstm en appelle à tous les patriotes, aux démocrates et à la société civile de notre pays pour barrer la route aux dérives dictatoriales du pouvoir en place ». Message sans ambiguïté. Nous y reviendrons.
Soulam WAGALEM & Amadou N’fa DIALLO