Est-ce déjà la fin de l’état de grâce entre le nouveau Bureau de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) et le gouvernement de Moussa Mara ? C’est la question qui taraude depuis hier les esprits. Suite à une correspondance en date du 31 juillet adressée au Ministre du travail de la fonction publique et des relations avec les institutions, Bocar Moussa Diarra, la puissante centrale syndicale a décidé d’observer un arrêt de travail de 48 heures sur toute l’étendue du territoire national, à compter du 21 ; 22 et 23 août prochain.
Il ressort de la lettre circulaire relative au préavis de grève générale, dont nous sommes procurés une copie, que la soudaine montée de l’adrénaline au niveau de la centrale syndicale se justifie par la mauvaise foi des Autorités à donner une suite aux différentes correspondances à elles adressées par les syndicalistes et à la réaction négative au protocole d’accord signé le 02 octobre 2011 ainsi qu’au cahier de revendications, issu de leur 12è congrès ordinaire.
Dans le mémorandum posé sur la table de discussion, les syndicalistes revendiquent la mise en œuvre effective du Protocole d’accord du 02 octobre 2011 en vue de son extinction définitive ; le relèvement significatif du taux de la valeur du point d’indice ; la diminution du taux de l’impôt sur les traitements salariales (ITS) ; le relèvement du salaire minimum inter-entreprise garantie (SMIG) ; l’augmentation du taux des allocations familiales ; la modernisation et la sécurisation de l’Administration générale (moyens logistiques, techniques, humains et financiers) ; la relecture de la convention des chauffeurs routiers ; la révision à la hausse du salaire au niveau des EPA et EPIC ; la baisse des loyers des maisons à usage d’habitation ; la baisse des tarifs d’eau et d’électricité conformément à l’accord signé en juillet 2007 ; le maintien et le renforcement de l’Usine malienne des produits pharmaceutiques (UMPP) ; la maitrise des prix des produits de premières nécessités ; la restitution et la protection des parcelles d’expérimentation de l’IER ; la régulation du fonctionnement des Bureaux de placement en les mettant en conformité avec les textes en vigueur ; la relecture de tous les Contrats miniers ; la ratification des convention : 102 ; 122 ; 88 ; 142 ; 181 et 155 ; enfin la participation des travailleurs du secteur privé dans les conseils d’administration. La même correspondance mentionnant les points de revendications est également adressée au Conseil national du patronat du Mali (CNPM).
Un préavis qui tombe au mauvais moment
Il faut signaler que ce préavis de grève intervient dans un double contexte de mouvement général au niveau du département de Travail, de la fonction publique et des relations avec les institutions. Le dernier changement date de seulement dix jours environ. Il s’agit du mouvement à la tête du secrétariat général dudit département. Adama Traoré cède son fauteuil à Gologo fils, Yaya Gologo, professeur d’enseignement secondaire, précédemment directeur de la Cellule chargée des questions de Travail des enfants. Le deuxième mouvement concerne les activités de prise de contact avec les Institutions de la République et les Organisations socioprofessionnelles de la société civile, entamée au lendemain de l’installation du gouvernement Mara, par le ministre Bocar Moussa Diarra, à la demande du Président de la République. C’est dans ce cadre que le ministre, Bocar Moussa Diarra a rencontré les deux centrales syndicales (UNTM et la CSTM ) , avant de se transporter au siège du Conseil national des Ordres professionnels. Faut-il comprendre derrière cette soudaine remontée de fièvre comme un pied de gru à la démarche consensuelle du Pouvoir ?
Surtout que le choix du président de l’UM-RDA pour occuper ce poste stratégique du Département du Travail de la fonction publique et des relations avec les institutions se justifie par sa connaissance du milieu syndical et qu’il peut jouer au barrage pour freiner la montée d’eau dans le navire. Est-ce déjà un test grandeur nature pour Bocar Moussa Diarra ?
En tout cas, ça l’air d’un baptême du feu pour le nouveau segal qui entre de plein pied en fonction dans un contexte de crise. Dommage que le segal sortant, qui est un homme d’expérience, quitte le navire à un moment où l’effervescence monte sur le front social et surtout dans un contexte de crise socioéconomique aigue ébranlant les couches les plus vulnérables de notre société.
Rappelons que depuis la présentation du cahier de doléances, le département de tutelle n’a ménagé aucun effort pour conforter le dialogue social, engagé désormais comme mode de règlement de la crise. Selon le conseiller technique en charge du dialogue social, Mamadou Konaté, que nous avons rencontré hier dans l’après midi, dès la réception du préavis de grève émanant de la Centrale syndicale, relatif à l’arrêt de travail, prévu pour les 20 ; 21 et 22 aout prochain, le département a immédiatement déclenché le mécanisme de prise en charge des doléances, notamment par une note d’information adressée au Premier ministre, Moussa Mara, faisant office d’information pour le Gouvernement, avant de convoquer les départements concernés pour les différents points de revendication. Il a été demandé à chaque département de produire son mémoire tout comme à l’UNTM de produire son mémoire en défense avant de mettre en place la Commission de conciliation. Le délai accordé à chaque partie pour déposer son mémoire en défense était prévu pour le vendredi 8 aout passé. Mais jusqu’à notre bouclage hier, les syndicalistes n’avaient pas encore déposé le leur à la différence des autres parties (les départements concernés), a expliqué le conseiller Konaté. C’est dire que la montagne annoncée risque d’accoucher d’une souris ? Signalons que le secrétaire général de l’UNTM, l’inspecteur de douanes Yacouba Katilé, qui était aux Etats-Unis à l’invitation de Barack Obama avec le Président de la République, devrait normalement rentrer au pays le dimanche dernier pour conduire sa troupe à la négociation.
Daniel Kouriba et Mohamed A. Diakité