Après une brève accalmie, le front social entre en effervescence. Le Syndicat National de la Santé, de l’action Sociale et de la Promotion de la Famille est en grève depuis le lundi dernier. Un autre syndicat, celui de l’enseignement secondaire, vient de déposer un préavis sur la table du gouvernement. Cette remontée de la tension sur le front social pénalise plus les populations.
A moins d’un mois du dernier mouvement (20 au 21 septembre 2016), le secteur de la santé se trouve dans une nouvelle tourmente. Les départements de la Santé; de la Solidarité et l’Action humanitaire ; de la Promotion de la femme, de l’Enfant et de la Famille n’ont pas pu convaincre les agents de santé à renoncer à leur débrayage, objet de dialogue depuis le 11 octobre. Ce qui était une menace est, depuis le lundi dernier, une (triste) réalité dans les structures sanitaires, les CHU et CS-Réf. Seul le service minimal est assuré. Au grand malheur des patients. Sauf les cas d’urgence, tous ceux qui se rendent dans les structures de santé, notamment au CHU-Gabriel Touré -l’hôpital le plus fréquenté de la capitale – retournent sans soin.
Comment en est-on arrivé là ? Depuis des mois, les agents de santé, y compris les médecins, courent derrière la satisfaction d’un cahier de doléances. Aujourd’hui, le désaccord existe essentiellement sur 6 points des 9 réclamés par le Syndicat national de la santé, de l’Action sociale et de la promotion de la famille (SNS-SA-PF). Ainsi ont-ils jugé légitime d’aller à cette grève qui s’étend sur toute une semaine, du 16 au 21 octobre 2016.
Les syndiqués exigent, sans délai, la revalorisation de la fonction socio-sanitaire avec l’adoption d’un plan de carrière pour les agents ; le respect des libertés syndicales à tous les niveaux et l’ annulation des mutations abusives des responsables syndicaux dont le mandat est en cours ; l’octroi et l’augmentation substantielle des primes de fonction spéciale des primes de garde, des primes de monture et l’intégration des émoluments des bi-appartenant dans leur salaire. Autres revendications: le maintien et l’ extension des ristournes dans leur esprit d’antan ; l’entière prise en charge des soins médicaux et du médicaments du personnel socio-sanitaire et de la promotion de la famille assujettis à l’ AMO ; l’ intégration dans la fonction publique des contractuels payés sur ressources propres; l’amélioration des conditions de travail par le recrutement du personnel qualifié, du plateau technique selon la carte sanitaire nationale en plus de la dotation régulière et conséquente en consommables de toutes les structures…
Mais du côté du département, l’on indique que le dialogue reste ouvert pour trouver une solution à cette situation qui pénalise plus les populations.
Les enseignants aussi…
Les élèves ont repris le chemin de l’école, il y a seulement deux semaines. A peine la rentrée scolaire entamée, les enseignants du secondaire ont déterré leur hache de guerre. En effet, le Bureau exécutif national du syndicat des Professeurs de l’enseignement secondaire des collectivités (BEN Sypesco) annonce, dans une correspondance datée du 10 octobre dernier, une grève pour les 26, 27 et 28 octobre prochain. Eux aussi pointent du doigt la mauvaise foi de leur département de tutelle dans le traitement des revendications. Lesquelles revendications ont trait à l’intégration de tous les enseignants des Collectivités dans la Fonction publique de l’Etat, à l’alignement des salaires du personnel enseignant des Collectivités de l’Enseignement secondaire sur ceux de la sous-région par une bonification d’indice, à la régularisation de la situation administrative et financière des sortants de l’Ensup (nouvelle formule) au même titre que ceux de l’ENI et de l’Ipr-Ifra. Aussi, les enseignants réclament l’amélioration de leur statut ; l’adoption d’un plan de carrière ; la relecture des décisions de hiérarchisation sorties à partir de 2015 et l’avancement automatique de tous les enseignants des Collectivités de l’enseignement secondaire, la revue à la hausse des primes de hiérarchisation : 75.000 F CFA pour les professeurs titulaires et 100.000 F CFA pour les professeurs principaux de l’enseignement secondaire des collectivités. S’y ajoutent les doléances relatives à la formation continue et la sécurité (pour ceux servant dans les zones d’insécurité) des professeurs, et au paiement intégral de tous les arriérés et la signature de tous les Arrêtés d’avancement et de Décisions de hiérarchisation…
Le cahier de doléances du syndicat contient, au total, dix-sept points de revendications. Si elles ne sont pas satisfaites, le Sypesco engagera une grève de 72 heures, allant du mercredi 26 octobre au vendredi 28 octobre 2016.
Les magistrats ne décolèrent pas…
Une nouvelle grève des magistrats se profile à l’horizon, après celle de juillet dernier. Et pour cause. Le climat entre les magistrats et le gouvernement reste délétère. « La situation n’a pas évolué ; elle s’est au contraire davantage compliquée », confiait le président du Syndicat autonome de la magistrature, Cheick Mohamed Chérif Koné, à notre confrère Le Reporter. À la question : pourrait-on conclure que la page des grèves de magistrats est encore loin d’être tournée ? Cheick Chérif répond : « nous restons dans une perspective de grève, dans la mesure où nous ne voyons rien de concret du côté du gouvernement, malgré le travail remarquable accompli par les différentes Commissions qui réunissaient des expertises avérées, qu’il s’agisse des magistrats ou des greffiers. Dans notre préavis de grève, déposé par le Sam, qui avait conduit à la cessation de travail pendant trois jours ouvrables, il était prévu une autre cessation de travail pour une durée de sept jours ouvrables, en cas d’insatisfaction dans un délai de trois mois. Le Sylima, quant à lui, avait suspendu son mot d’ordre en attendant la suite réservée au rapport issu du Dialogue national. »
Aujourd’hui, le SAM aussi doute de la bonne foi et de la sincérité de l’exécutif, « dont les attitudes n’inspirent plus confiance ».
Le Syndicat autonome de la magistrature veut alléger la souffrance des magistrats du Mali à travers la satisfaction de 27 points de revendication. Il s’agit, entre autres, de: le relèvement de la part du budget accordée au ministère de la Justice à hauteur de 10% au moins à compter de l’exercice 2017; l’alignement du point de vue traitement et avantages de la Cour suprême sur les institutions de même niveau au regard du principe de la séparation des pouvoirs, ainsi que sa dotation en moyens suffisants nécessaires à son fonctionnement; le relèvement de la grille indiciaire des magistrats (350 à 750 pour le magistrat en début de carrière et 1100 à 3500 pour le magistrat de grade exceptionnel); le rehaussement des indemnités de judicature à hauteur de 800.000 FCFA pour chaque magistrat; le rehaussement des indemnités de logement à hauteur de 500.000 FCFA pour le magistrat de la Cour suprême et 300.000 FCFA pour les autres magistrats. Figure, en outre, dans le cahier de doléances, l’octroi de primes de responsabilité et de représentation à hauteur de 500.000 FCFA pour le président de la Cour suprême et le Procureur général près la Cour suprême; 400.000 FCFA pour les autres magistrats de la Cour suprême; 350.000 FCFA pour le premier président de la Cour d’appel, le Procureur général près la Cour d’appel, les chefs des services centraux du ministère de la Justice et le magistrat en détachement; 300.000 FCFA pour tout autre magistrat de la Cour d’appel ou tout autre magistrat de l’Inspection des services judiciaires; 250.000 FCFA pour le Président du Tribunal de grande instance, le Président du Tribunal administratif, le Président du Tribunal de commerce, le Président du Tribunal du travail, le Président du Tribunal pour enfants, le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance, 200.000 FCFA pour le Président du Tribunal d’instance, le Procureur de la République près le Tribunal d’instance et tout magistrat en fonction dans un service central ou assimilé du ministère de la Justice; 150.000 FCFA pour tout autre magistrat d’une juridiction de premier degré.
Autres points de revendication du SAM, ce sont l’octroi d’une prime de risque d’un montant de 150.000 FCFA pour tout magistrat; l’extension des dispositions du décret n°2014-0837/PRM du 10 novembre 2014 aux magistrats (indemnités de représentation et de responsabilité, d’eau, d’électricité, de téléphone, de résidence, primes de zone, de domesticité et autres); l’octroi d’une prime d’installation non taxable d’un montant de 2.000.000 FCFA au jeune magistrat au moment de son entrée en fonction; l’intégration des primes et indemnités aux salaires; la revalorisation des pensions des magistrats à hauteur de 50%; la dotation en carburant de tous les magistrats; la réparation des dommages matériels causés aux magistrats lors des évènements survenus dans la partie Nord du pays; l’élaboration d’un plan de carrière des magistrats et la classification des juridictions; l’élaboration du règlement intérieur du Conseil supérieur de la magistrature; le respect des dispositions de l’article 8 de la loi n°02-054 du 16 décembre 2002 portant Statut de la magistrature, relatives à l’installation solennelle des chefs de juridictions et de parquets; la conception d’un programme adapté de formation de base et le soutien à la formation continue des magistrats; l’inscription du SAM au budget du ministère de la Justice concernant les frais et charges afférents à sa qualité de membre de l’Union internationale des magistrats; l’octroi au SAM de sa place au sein du Conseil économique, social et culturel, conformément à l’arrêt n°76 du 15 août 2002 de la Section administrative de la Cour suprême; le renforcement des mesures de sécurité. Ce n’est pas tout. Le SAM exige également la dotation de chaque magistrat en passeport de service en général, et particulièrement ceux de la Cour suprême, les présidents des Cours d’appel, les Procureurs généraux près les Cours d’appel et le Directeur de l’Institut national de formation judiciaire en passeport diplomatique; la dotation des magistrats de la Cour suprême, des chefs de juridictions et de parquets en véhicule de fonction; la dotation de chaque Cour d’appel, de chaque Tribunal de grande instance et de chaque Tribunal d’instance en véhicule d’extraction; la transparence dans l’attribution des titres de distinction et la disponibilité des critères d’avancement pour une meilleure prise en compte des magistrats; l’adoption d’un programme de logement des magistrats; l’exonération de la totalité des droits et taxes pour toute importation faite par le magistrat tous les trois ans. En outre, le SAM demande l’octroi d’indemnités de recherche à hauteur de 200.000 FCFA pour chaque magistrat de la Cour suprême et le Directeur de l’Institut national de formation judiciaire et 100.000 pour le Directeur adjoint et le Directeur des études du même Institut.
I B Dembélé