Le gouvernement du Premier ministre de pleins pouvoirs, Modibo Diarra, s’est brutalement réveillé avec la mise en garde de la principale centrale syndicale du pays, l’UNTM de Siaka, qui revient en force pour déposer sur la table du gouvernement un paquet de doléances qu’il avait obtenues du régime déchu du président ATT. C’est donc la fin de la trêve pour un gouvernement de transition qui peine à trouver ses marques.
Le secrétaire de l’UNTM, Siaka Diakité, le maître de la Bourse du Travail, celui-là même qui préside le FDR, le Front du refus du coup d’Etat, et qui a plusieurs fois exprimé sa volonté pour un retour à l’ordre constitutionnel, rompt la trêve gouvernementale, avec la manière dont il sait faire le mieux, en déposant un paquet de doléances sur la table du gouvernement.
Siaka Diakité, qui ne fait de la surenchère dans la rue une arme d’existence, comme certains d’autres leaders auto-proclamés du syndicalisme, n’oublie pas que la raison d’être d’un syndicat, surtout une centrale syndicale, c’est d’abord et avant tout la défense des intérêts moraux et matériels des travailleurs. Un intérêt stratégique que Siaka Diakité ne perd de vue, en dépit de la crise politique et institutionnelle que connaît le pays.
En fait, dans l’entourage de la Bourse du travail, on apprend que le paquet de doléances, déposé sur la table du gouvernement, n’est ni une revendication syndicale en tant que telle, ni une exigence de nouvelles négociations avec les pouvoirs publics. La Centrale syndicale avait déjà durement négocié et obtenu ,avec le régime défunt du président ATT, des résultats probants sur un ensemble de doléances dont l’application, pour certaines d’entre elles, devait être programmée dans le temps. Le mois de mars dernier correspondait à l’échéance d’application de certaines de ces doléances.
Entre temps, ce fut le coup d’Etat du capitaine Sanogo qui a été condamné par la communauté internationale et une frange importante des acteurs nationaux, dont l’UNTM de Siaka Diakité, qui redoutait ainsi des conséquences néfastes sur une telle rupture brutale des institutions républicaines du pays. Avec ce coup de force, s’ensuit une longue période d’agitation politique, avec en toile de fond une occupation des régions du nord du pays par des groupes armés, à la suite de laquelle les acteurs nationaux, opposés entre pro et anti-juntes, se sont livrés une guerre sans merci. La place du gouvernement de la transition n’a pas empêché les querelles de chiffonniers, au sein de l’opinion publique, qui se sont bel et bien poursuivies autour de la gestion de la transition démocratique.
La normalité vient de sonner à la Bourse du travail où Siaka Diakité, le chef de la centrale syndicale, au nom de la continuité de l’Etat, vient de saisir officiellement le gouvernement de Cheick Modibo Diarra pour l’examen du parquet de doléances dont il avait obtenue de l’ancien régime la pleine satisfaction. Une première lettre a été envoyée au Premier ministre lui-même et une seconde au ministre de la fonction publique.
Dans l’entourage de Siaka Diakité, il ne s’agit pas pour la centrale syndicale de causer quelques ennuis que ce soient au gouvernement, mais de pousser celui-ci à mettre les travailleurs au cœur de sa stratégie sociale, d’autant que, selon des sources syndicales, il est clair que les travailleurs maliens sont ceux qui payent le lourd sacrifice de l’état d’effondrement actuel de l’Etat, par la hausse des prix des matières premières. Et cela, dans un contexte où le pouvoir d’achat est au plus bas. Pour Siaka Diakité, c’est donc une invitation au dialogue social à l’endroit d’un gouvernement qui peine à garantir aux travailleurs une certaine sécurité sociale.
En toute logique, avec cette nouvelle approche syndicale, pour l’amélioration des conditions de vie des travailleurs, Cheick Modibo Diarra, le Premier ministre de pleins pouvoirs, devrait au plus vite donner la pleine mesure de son gouvernement à entretenir le dialogue social avec les acteurs sociaux.
Pour cela, le contexte de la crise politique ne donnera aucun alibi au gouvernement de Cheick Modibo Diarra qui, au-delà de tout, doit donner une réponse sociale à la demande de la Bourse du travail qui, une fois n’est pas coutume, pour ce cas d’espèce, n’est pas apparue avec des velléités revendicatrices, mais plutôt avec une logique de concertation.
Un vrai test pour un gouvernement qui a vraiment besoin de prouver à l’opinion nationale sa capacité réelle d’écoute sociale.
F.M