Rétrospective : Extraits du discours de l’empereur Hailé Sélassié à l’occasion de la création de l’Organisation de l’Unité Africaine (suite et fin)

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Haïlé Sélassié, dernier empereur d'Ethiopie

La route vers l’unité africaine est déjà jalonnée de repères. Ces dernières années nous avons eu des rencontres, des conférences, des déclarations, des engagements. Des organisations régionales se sont créées. Des groupes locaux d’intérêts communs, de même origine ou de traditions ont été constitués.

A travers tout ce qui a été dit, écrit et accompli ces dernières années, il y a toujours eu le même thème. L’unité est l’objectif reconnu. Nous discutons sur les moyens; nous discutons sur les voies alternatives pour le même but; nous nous sommes engagés dans des débats sur les techniques et les tactiques. Mais quand on retire la sémantique, il n’y a pas de dispute entre nous. Nous sommes déterminés à créer l’union des Africains.

Au sens strict du terme, notre continent n’est pas encore construit; il attend encore sa création et ses créateurs. Il est de notre devoir et de notre privilège de réveiller le géant endormi de l’Afrique, non pas pour répondre au nationalisme européen du XIXe siècle, non pas pour répondre à une conscience régionale, mais pour la vision d’une unique fraternité africaine, mettant toutes ses forces unies dans l’accomplissement d’un objectif plus grand et plus noble.

Par-dessus tous, nous aurons à éviter les pièges du tribalisme. Si nous nous divisons selon des lignes tribales, nous ouvrons nos portes aux interventions étrangères et à leurs conséquences potentiellement dommageables. Le Congo est la preuve évidente de ce que nous sommes en train de dire. Nous ne devrions pas nous laisser entraîner par la complaisance au vu de l’amélioration de la situation dans ce pays. Les Congolais ont souffert de maux qui n’ont pas encore été dits et la croissance économique du pays a été retardée par les luttes tribales.(…)
Cependant, nous ne devrions pas nous inquiéter : notre unité ne peut se construire en un jour. L’unité que nous cherchons viendra graduellement. Elle progressera de jour en jour, nous emmenant lentement mais inexorablement dans sa course. Nous avons devant nous les exemples des Etats-Unis et de l’Union des Républiques Socialistes et Soviétiques. Nous devons nous souvenir combien de temps ils ont eu besoin pour achever leur unité. Quand les fondations sont solides, si le maçon est capable et que les matériaux sont de bonne qualité, la maison à construire sera solide.

Ce dont nous avons besoin est d’une seule organisation qui parlera d’une seule voix pour toute l’Afrique, au sein de laquelle les problèmes de l’Afrique seront analysés et résolus. Nous avons besoin d’une organisation qui permettra des solutions acceptables aux disputes inter-africaines et qui promouvra l’étude et l’adoption des mesures de défense commune et des programmes de coopération dans les domaines économiques et sociaux. A l’occasion de cette conférence, créons une seule institution à laquelle nous appartiendrons tous, basée sur les principes auxquels nous souscrivrons, confiants que dans ses conseils, nos voix auront leur poids, sécurisé par le fait de savoir que les décisions qui seront prises le seront par des Africains, et seulement par des Africains, et qu’elles prendront entièrement en compte les considérations vitales des Africains.

Rassemblés par Modibo Diallo

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