Quand nous mettions sous presse notre livraison de la semaine dernière, le vote pour une réadmission du Maroc au sein de l’Union Africaine (UA) n’avait pas encore eu lieu. Cependant, nous avions anticipé sur son résultat et avions, à l’avance, salué cette réadmission.
Nous écrivions : « Sa Majesté le Roi Mohamed VI, sans rien renier de l’héritage de son père Hassan II, vient de décider de reprendre sa « place naturelle » au sein de l’Union Africaine (UA). Il en a informé ses pairs du continent, après le Sommet de Kigali (juillet 2016) et, à cette fin, il a demandé au Parlement marocain de ratifier l’Acte constitutif de l’organisation. Il a mis sa diplomatie en branle pour ce retour et, payant de sa personne, s’est rendu, à plusieurs reprises en Afrique subsaharienne afin de consolider sa position sur le sujet.
Qui pourrait, ces lundi et mardi, à Addis-Abeba, s’opposer à ce retour ? Assurément, pas nous Maliens car, entre le Maroc et nous, les relations ne datent pas d’aujourd’hui, elles remontent à la période des Grands Empires du Soudan nigérien. »
L’occasion nous sera donnée, dans une livraison ultérieure, de nous prononcer sur ces relations privilégiées. Pour l’instant, qu’il nous soit donné de revenir sur cette réadmission.
Le drame que vit le Maroc, qu’a vécu le Maroc, avec la création du Polisario, résulte des circonstances dans lesquelles il a accédé à l’indépendance. Il s’est constitué en Etat dès le IXè siècle. De cette période au XIXè siècle, avant d’être protectorat français, il s’est imposé comme une puissance régionale méditerranéenne, rivalisant avec certaines puissances européennes de l’époque, dont le Portugal. Il a fallu, en février 1958, une coalition entre l’Espagne franquiste et la France, pour mettre fin définitivement, à sa résistance contre la domination coloniale.
Aussi accède-t-il à l’indépendance en 1956, avec deux frontières : ses frontières historiques et celles issues d’accords entre puissances européennes. Son Armée de Libération Nationale (ALN) a reçu, en 1958, l’appui des tribus sahraouies pour chasser les Espagnols du Saguiet el Homra et du Rio de Oro. Dès cette date, le Maroc a tenu à affirmer sa souveraineté sur cette partie désertique de l’Afrique occidentale. Et, une étude menée par l’ONU, dans le courant des années 1970, a reconnu l’existence de liens d’allégeance (béya) entre ces tribus et le trône.
Aussi, est-ce sans coup férir, qu’en novembre 1975, à l’issue de « La Marche Verte », s’installe- t-il de nouveau dans ce territoire dont la libération avait déjà été promise par Sa Majesté Mohamed V.
Le fait accompli ne fut pas du goût de l’Algérie. D’un coup, le royaume s’agrandissait de 266 000 km2. La géopolitique régionale s’en trouvait déséquilibrée. Avec le souci de la restaurer à son profit, elle crée, entretient, arme et finance le Polisario qui proclame, le 27 février 1976 la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD). Elle remporte une victoire de taille en provoquant le départ du Maroc de l’OUA devenue, par la suite, UA.
Aussi, la réadmission du royaume au sein de l’instance panafricaine sonne-t-elle pour elle comme une défaite. Contre mauvaise fortune, elle fit bon cœur : elle a félicité son rival, tout en souhaitant que cette réadmission soit de nature à apporter une solution à un conflit qui n’a que trop duré.
Elle le sera, mais, assurément, contre ses attentes. La diplomatie marocaine ne cesse de s’affirmer conquérante. Au total, 82 pays avaient reconnu la RASD, dont 37 Etats africains. En 1976, 37 pays avaient retiré leur reconnaissance, dont 19 Etats africains. Le temps semble jouer en faveur du Maroc. Nous ne serons nullement surpris que le Soudan du Sud revienne prochainement sur sa reconnaissance de la RASD.
Diawlèn Karamoko Diarra