Depuis son accession à l’indépendance, le pays se dit prêt au sacrifice ultime pour que vive l’Afrique unie. Rien n’est plus faux.
La toute première constitution du Mali a jeté, à propos de l’Afrique une base sur laquelle toutes les autres vont être bâties : renoncer à notre souveraineté (partiellement ou totalement) pour la construction d’une Afrique unie. C’est une prise de position qui a toujours fait l’unanimité et n’a jamais souffert de la moindre contestation. Cela est trop beau pour être vrai quand on sait que le Malien aime à contester pour le plaisir de contester et il est permis de douter de la sincérité de cette profession de foi collective.
A commencer par le « père » Modibo le grand timonier local qui a posé la première pierre de cette grande duperie nationale. Le fils de Daba Kéita est l’un des acteurs majeurs de la division de l’Afrique, de la sous région et de son propre pays. La division fratricide et haineuse de l’Afrique occidentale entre groupe dit de Monrovia et celui dit de Casablanca prends sa source dans le zèle de Modibo à servir l’Urss et sa doctrine. Les pro soviétiques (Modibo, Sékou Touré et Kwame Nkrumah le forgeron du Ghana) se sont mis à haïr et à déclarer la guerre aux «suppôts de l’impérialisme et valets du colonialisme » qui sont Léopold Sédar Senghor qui est pourtant socialiste comme eux, Houphouët Boigny, Hassan II…Cette division a été durable et ses effets ont été dévastateurs.
Par la suite, les trois pays ‘’révolutionnaires’’ et inféodés à l’Urss totalitaire et liberticide ont monté une fédération ‘’homogène’’ pour ‘’cultiver les semences fertiles de l’unité africaine. Ils lui ont donné le nom Ghana-Guinée-Mali. Elle n’est pas passée de samedi à dimanche. Une fois de plus, notre très charismatique Staline local a joué un rôle dans cet éclatement. L’on se souvient que dès le départ, le très beau Modibo, major de sa promotion à la sortie de William Ponty, avait engagé le Soudan français dans la Ferton du Mali avec le voisin sénégalais, pays dirigé par un homme de gauche comme lui. Mais Modibo était trop à gauche par rapport au poète le plus célèbre des Sérères. Et il croyait tellement avoir raison, comme c’est toujours le cas, la dite fédération a éclaté de la façon dramatique que l’on connait. A cause principalement de l’intransigeance de notre héros qui restera toute sa vie convaincu d’avoir toujours raison contre tous.
Ce trait de caractère est si marqué chez cet homme d’une rare intelligence qu’il finira par diviser son pays puis son propres parti politique, l’Us-Rda. Et ce, après avoir divisé les forces de défense et de sécurité de la nation. En effet, il va classer les Maliens, sur la base d’une idéologie importée et inadaptée, en deux catégories dont l’une a droit de vie et de mort sur l’autre : ceux qui marchent avec son « socialisme scientifique », selon lui-même et les autres les ‘’ traitres qui ne méritent que la mort. Après les citoyens, il va marginaliser l’Armée, la Police et la Garde et privilégier la Milice et les brigades de vigilance ; qui vont ‘’attacher le scorpion à la …des populations’’. En forçant la marche derrière Moscou, il va finir par diviser le Rda en vrais militants et ‘’ennemis du peuple’’. La rectification du 22 août va jusqu’à la dissolution du parti, car Modibo ne faisait plus confiance à personne ; pas même aux Jean-Marie Koné, le ‘‘dankélé de Sikasso, qui ont voulu lui conseiller de lever un peu le pied de sur l’accélérateur pour permettre au peuple de suivre le train de la marche forcée vers le socialisme. Une purge terrible va suivre.
Les origines de la supercherie
La question ici est de savoir comment un homme pareil qui ne peut composer durablement avec personne et qui ne sait que diviser tout ce qu’il touche peut parler de l’unification d’un continent ? Modibo était un homme remarquable qui aurait pu mener le Mali, si le progrès du Mali était sa motivation, vers des sommets enviables par les voisins. Mais le géant était un petit soldat en mission commandée, engagé par Moscou qui était décidé à étendre le socialisme sur l’étendue totale de la planète. Face à cette volonté hégémonique planétaire l’occident avait levé le bouclier. Ce fut la guerre froide, le mur de Berlin et plus tard la guerre des étoiles. L’Urss avait des alliées partout dans le monde (y compris au cœur de l’occident) qui menait sa guerre. Modibo, et d’autres, faisait partie des fantassins lancés sur notre continent et qui avait pour mission de réunir l’Afrique pour la mettre au service de l’hégémonie soviétique dans le monde. Il faut noter que dans l’exécution de sa mission, Modibo aura montré une sincérité et une loyauté sans faille vis-à-vis de la défense de l’idéologie socialiste.
Mais après lui, la déclaration d’amour du Mali pour l’Afrique, passion sensée aller jusqu’au suicide, n’a pas cessé pour autant.
Le Général Moussa Traoré n’a pas accédé au pouvoir par voie démocratique mais par effraction. Dès lors, l’on peut penser que les membres du Cmln- Comité militaire de libération nationale- avaient fort besoin de toutes sources de légitimation et de reconnaissance. L’Urss n’était plus la Mecque et l’Afrique et l’Oua pouvaient servir de cadre très utile à cet effet. D’ailleurs, a moins de dix ans après son accession au pouvoir au Mali, Moussa Traoré était un notable de l’Afrique jusqu’ à devenir président de l’Oua. Il avait du reste d’autres chats à fouetter et, en aucun cas, il ne pouvait renier l’unité africaine.
L’éclosion du pouvoir Adema représente le retour de Modibo et du socialisme au pouvoir au Mali ; même si les temps avaient changé et que l’idéologie ne pouvait plus s’imposer comme au temps de la splendeur et de la toute puissance des Russes. Mais, la fidélité à l’esprit de Modibo et de la tendance à créer l’unité africaine pour la mettre au service de l’Internationale Socialiste qui a pris la place de l’Urss dans le combat pour faire du monde une planète socialiste. D’où son de Parti Africain (pour la Solidarité et la Justice). Dix ans plus tard, la Ruche, en partant, délèguerons le pouvoir à un militant Adema qui ne peut militer dans ses rangs à visage découvert, à cause de la loi, Amadou Toumani Touré. Une fois élu, Dioncounda Traoré, président de l’Adema, va révéler officiellement et publiquement que le sieur ATT avait sa carte Adema ; et l’intéressé n’a jamais démenti. Qui se tait…
Le Mali démocratique va ainsi faire la jonction avec le Mali despotique pour clamer à tue-tête que le Mali était prêt à faire hara kiri pour les beaux yeux de la belle Afrique. Est-ce sincère tout ça ?
Non bien sûr ! La preuve que l’on est un membre conséquent d’un regroupement non lucratif qui a besoin de sous pour fonctionner normalement est de verser sa cotisation. Or, Alpha Omar Konaré et Amadou Toumani Touré n’ont versé le moindre sou troué dans les caisses de l’Oua ou de l’Ua. Pareil pour Modibo Kéita. A-t-on vraiment besoin de déployer d’autres arguments pour étaler au grand jour notre attitude mensongère et hypocrite ? Et si l’on arrêtait cette mascarade en supprimant le passage mensonger dans la prochaine constitution. En attendant, on pourrait aussi cesser les tracasseries non nécessaires à nos frontières respectives.
Amadou Tall