Le 32 ème Sommet de l’Union africaine (UA) s’est ouvert le 10 février, au siège de l’Union à Addis Abeba, devant un parterre de chefs d’Etat, de gouvernement, de ministres et de diplomates. Ils étaient au grand complet, du moins les habitués, en dehors des présidents sénégalais et nigérian, en campagne électorale pour leur réélection. Les nouveaux présidents fraîchement élus ont été accueillis par le président de la Commission, Moussa Faki Mahamat, en ces termes: ” Aux présidents Andry Rojoelina et Félix Tshisekedi, qui se joignent à cette assemblée, j’adresse mes sincères sentiments de bienvenue et mes souhaits de succès dans les exaltantes responsabilités qui sont les vôtres”. Ensuite, il a félicité les présidents des champions thématiques pour les efforts et initiatives développés dans l’assouplissement de la mission à eux confiée par leurs pairs. Avant d’évoquer le thème de cette année qui porte sur « les réfugiés, les rapatriés et les déplacés internes ». Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’UA réunis, en prélude du Sommet, ont balisé la question.
Le président de la Commission a expliqué devant les Chefs d’Etat que: ” Le phénomène des déplacements forcés reste hélas prégnant. La Commission de l’Union africaine voudrait que nos proclamations de foi sur ce thème sonnent, enfin, le glas de toutes les formes d’apathie, d’immobilisme, voire de démission pure et simple devant les horreurs de cet important fléau”. Avant de suggérer: « Il importe de s’attaquer plus résolument aux causes profondes du phénomène, parallèlement à l’accélération de l’opérationnalisation de l’agence humanitaire africaine”.
Bilan 2018.
Les chefs d’Etat s’appuieront sur ce document pour établir une feuille de route à l’intention des gouvernements.
Selon les chiffres publiés par le HCR, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, le problème des réfugiés s’est aggravé partout dans le monde, plus particulièrement sur le continent africain où se trouvent 26% des 25 millions de réfugiés que compte la planète. Les pays africains les plus touchés cette année par cette problématique sont l’Ouganda, le Soudan du Sud et l’Ethiopie en proie à de graves violences intercommunautaires.
Il convient de rappeler par ailleurs que l’année 2019 marque le dixième anniversaire de la signature de la Convention de Kampala qui est le premier instrument juridique contraignant en matière de gestion de réfugiés.
Menace sur les réformes
Ce 32ème sommet de l’UA a été surtout un sommet de transition, avec le passage de témoin entre le Rwandais Paul Kagamé et son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi qui a pris officiellement la présidence tournante de l’UA pour les douze mois prochains. Le bilan de la présidence Kagamé est élogieux. il faut citer l’accord signé en mars 2018 par 50 des 55 pays membres pour créer une zone continentale de libre-échange, avec pour objectif d’aboutir à terme à un marché unique africain avec libre circulation des biens et des hommes. Le lancement en novembre dernier d’un Fonds pour la paix, destiné à financer les réponses aux crises sur le continent, est également bien vu par les pays membres.
Depuis près de trois ans, plus précisément depuis le sommet de l’UA de juillet 2016 à Kigali, la réforme sur laquelle Paul Kagame s’est le plus investi est celle de l’autofinancement de l’UA, grâce au fameux projet de taxe de 0,2% sur les importations. Son successeur l’égyptien, Abdel Fattah al-Sissi a désormais la lourde responsabilité de poursuivre le travail entamé pour le bonheur du continent. Cependant, le doute est permis, parce qu’il ne manifeste pas le même engagement que son prédécesseur, Kagamé, très applaudi, au passage du témoin. La crise libyenne a été évoquée parce que sa persistance aggrave la lutte contre le terrorisme au Sahel et dans le bassin du lac Tchad. Malgré, les efforts remarquables des dirigeants de la région.
L’espoir est permis dans le conflit libyen, si Moussa Faki Mahamat de la Commission de l’UA réussissait son objectif de faire de l’UA, au même titre que l’ONU, un faiseur de paix entre les parties libyennes qui se livrent à une guerre sans merci depuis 8 ans.
La crise en Centrafrique, sanctionnée récemment par un Accord de paix et de réconciliation ” consacre une belle avancée de l’initiative africaine que nous avons lancée en 2016″, selon Moussa Faki. Lequel a conclu son adresse par un appel à l’unité, un appel de continuité historique, un appel d’ancrage ” dans notre patrimoine culturel et civilisationnel”.
Elhadj Chahana Takiou,
envoyé spécial à Addis Abeba