Au Mali, l’installation d’un système de vidéosurveillance et de protection est soumise à des règles fixées sur lesquelles doit l’Autorité de protection des données à caractère personnel (APDP) quant à leur application. Nonobstant cette obligation légale, des particuliers et parfois même des entreprises passent outre. En plus, même dans le cadre du traitement des installations déclarées, on relève des entorses à la loi
Une déclaration doit faite avant l’installation de tout système de vidéoprotection ou de vidéosurveillance, en précisant des données essentielles, notamment les raisons de la mise en place du système, les modalités d’information des personnes, les mesures de sécurité, l’identification précise des destinataires des images, la durée maximale et le lieu de conservation des images enregistrées. En plus, “en cas de transfert des données collectées à l’étranger, le traitement doit faire l’objet d’une demande d’autorisation”, précise l’APDP dans sa Délibération N°2021-176/APDP du 11 août 2021. Ces dispositions ne sont pas souvent respectées. Pourtant, afin de faciliter la tâche aux particuliers et entreprises, l’APDP a mis en place un formulaire de déclaration qu’il suffit juste de remplir et de faire parvenir à ses services.
Rappelons que, pour la mise en place d’un dispositif de surveillance chez un particulier, cela doit se justifier par des risques sur son intégrité physique ou sur ses biens et il doit s’assurer que le système ne couvre que les périmètres de son domicile.
Pour les entreprises, l’APDP rappelle que “les finalités d’un système de surveillance dans les structures privées visent à répondre à des besoins de sécurité des locaux, de la gestion des mouvements du personnel et du contrôle des accès aux lieux de travail.”
Cependant, l’APDP a tenu à préciser que “pour les caméras installées sur les murs de clôture, leur champ de couverture dans la rue ne doit pas aucunement dépasser 2m, 50 de la propriété surveillée”. Il est bon que l’APDP soit outillée pour faire des contrôles inopinés afin de s’assurer de l’application correcte de ces dispositions car, dans bien des cas, on observe toute la rue à partir de la caméra de vidéosurveillance. Ce qui constitue une violation flagrante de la loi. Aussi, sont exclus du champ de la vidéosurveillance des entreprises : les vestiaires, les cabinets d’aisance, les salles de bain, les bureaux, les chambres ainsi que les lieux privatifs mis à la disposition des employés de maison à des fins de détente ou de pause-déjeuner.
Le champ d’exclusion inclut aussi les salons des maisons d’habitation, à moins que le responsable de traitement n’apporte la preuve de la nécessité de sécuriser des objets de valeur s’y trouvant.
Dans le cadre de la vidéoprotection des domiciles, l’accès aux images et aux vidéos doit être uniquement réservé au responsable de la mise en œuvre du traitement ou de son mandataire. Pour les organismes privés, les informations traitées ne peuvent être visionnées que par des personnes habilitées en raison de leurs fonctions “et dans le respect de la poursuite de la finalité du dispositif”, insiste l’APDP.
Conformément aux dispositions de la Loi 2013-015 du 21 mai 2013 modifiée, le responsable du traitement doit mettre en valeur toutes les mesures techniques et d’organisation appropriées pour protéger les données contre la destruction accidentelle ou illicite, la perte accidentelle, l’altération, la diffusion ou l’accès non autorisé.
Cette disposition de confidentialité et de sécurité incombe aussi aux sous-traitants et intervenants habilités par la loi.
En tout cas, la règlementation est là, bien claire. Mais est-elle appliquée correctement ? Nous en doutons fort car les systèmes de vidéosurveillance et vidéoprotection foisonnent et, la plupart du temps, ceux qui l’utilisent ignorent les dispositions légales. Par ailleurs, très souvent, le public n’est pas informé de l’existence d’un système qui est en train de filmer les moindres faits et gestes parce que ce n’est signalé nulle part. Cette façon de faire relève de l’illégalité.
En plus, les normes imposées par la loi ne sont pas toujours de mise dans les installations, notamment en termes de respect des périmètres à surveiller.
Pour la suite réservée aux images et vidéos, c’est mystère et boule de gomme, alors que la loi reste très exigeante sur cette question. Comme pour dire que la floraison de systèmes de vidéoprotection et de vidéosurveillance finit par créer une jungle incontrôlable. Il est temps, plus que temps que la régulation soit une réalité. Pour ce faire, il convient que l’APDP trouve les moyens de contrôle et de suivi des autorisations accordées.
Amadou Bamba NIANG Journaliste et Consultant