Chronique du web : Quand Facebook oppose une jeune fille à ses géniteurs

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Fraulein XY (Mademoiselle en Allemand) est autrichienne originaire du land de Carinthie. Elle a 18 ans et préfère garder l’anonymat.

Pour le moment ! Elle est en colère, la demoiselle. Et même très en colère ! Une colère homérique, diront les férus d’Antiquité ! Mademoiselle, écrivais-je donc, est très remontée contre ses géniteurs qu’elle accuse d’avoir posté des photos d’elle sur Facebook lorsqu’elle était enfant. Selon son avocat, ce manège a duré sept longues années et aucun moment de sa vie intime de cette époque n’a été protégé par ses parents. Ces derniers ont partagé pas moins de 500 clichés de leur adorable gamine avec leur réseau qui compte plus de 700 personnes.

A 18 ans, donc majeure, Fraulein XY veut faire payer à ses parents leur indélicatesse qui leur a fait exposer son intimité sur la place publique. Pour vous donner une idée de l’intimité dont il est question, selon le journal autrichien The Local, cela va des clichés pris lorsqu’elle était dans son berceau aux premiers pas de la gamine, en passant par les premiers boutons d’acné, le changement des couches, le passage du pot au siège des toilettes, la première sortie à vélo sans les roulettes, les cours de poterie, etc. Que croyez-vous que notre demoiselle a fait ou s’apprête à faire ? Questions à 1000 dollars ! Si vous avez suivi notre narration, bingo ! Dans le cas échéant, donnez votre langue au gros matou de Vienne.

Mademoiselle-La-Furie-Contre-Ses-Parents-Et-Facebook a simplement porté l’affaire devant les juridictions compétentes sous la forme d’une plainte en bonne et due forme contre ses géniteurs, par l’entremise de Me Michael Rami, rapporte le journal autrichien dans un article paru la semaine dernière. De toute évidence, me Rami s’apprête à gagner un procès facile à plaider mais retentissant… qui fera certainement jurisprudence. Selon Me Rami, l’indignation de sa cliente de 18 ans n’est pas près de retomber puisque, parlant de ses parents, elle accuse : “Ils étaient sans honte et sans limites”.

La bonne affaire, c’est donc pour Me Rami. Il se frotte déjà les mains dans la perspective du procès prévu pour le mois de novembre. Selon le journal qui révèle cette affaire familiale, si l’avocat parvient à prouver que ces photos diffusées sur le réseau social “violent le droit à la vie privée de la jeune femme”, alors il est rassuré que sa cliente pourrait remporter haut la main le procès. Et ce procès serait alors une première qui donnerait à réfléchir aux parents imprudents qui s’empressent de poster sur les réseaux sociaux les photos de leur progéniture parfois dans des postures fort délicates.

Dans le cas qui nous intéresse, et qui a transformé la vie de notre adolescente en un véritable « enfer », les parents ne bénéficieront d’aucune circonstance atténuante. Pis, en d’autres temps, ils auraient eu droit au gibet. En effet, Fraulein XY leur a gentiment demandé de « retirer ce flot d’images » et s’est heurtée à leur refus catégorique. « C’est devant leur refus qu’elle a décidé de les poursuivre en justice pour violation de sa vie privée ». Selon de nombreux spécialistes du Web 2.0, ce cas pourrait inspirer de nombreuses personnes en France ou aux Etats-Unis où il est très courant que des parents publient des photos de leur progéniture sur les réseaux sociaux, quand bien même ces photos seraient intimes ou embarrassantes.  « Je suis fatiguée de ne pas être prise au sérieux par mes parents», lance-t-elle, un brin agacée et plus que jamais déterminée à maintenir la pression sur Papa et Maman. D’ailleurs, en France, la Gendarmerie nationale redoute ces situations et veille au grain. Elle rappelle fort opportunément aux parents qu’« il est important de protéger la vie privée des mineurs et leur image sur les réseaux sociaux », non sans insister sur un article du Code pénal français qui dispose  que « toute personne ayant diffusé ou publié des images d’un tiers sans son consentement encourt une peine d’un an de prison ou une amende de 45 000 euros ». Pour ma part, je souhaite que Mark Zuckerberg, le richissime patron de Facebook, se constitue partie civile dans ce procès qui fera grand bruit sur la Toile, pour apporter son soutien à une âme en peine d’une part, et se désolidariser des « inconscients » qui dénaturent les réseaux sociaux d’autre part. Evidemment, ça reste un simple souhait, mais un souhait qui résonne comme une mise en garde : « Si on ne sait encore rien du verdict final, le cas illustre combien le droit à l’image sur les réseaux sociaux est en perpétuelle évolution. Avis aux heureux papas, mamans et tatas qui bombardent leurs murs Facebook (et notre fil d’actu) des clichés de leurs adorables bambins : pensez à deux fois avant de publier la photo d’un enfant sur Internet… ».

Serge de MERIDIO

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