Au moment où nous étions affairés à commémorer notre Independance Day, l’homme à la tête du presque 1,5 milliard d’habitants débarquait aux Etats-Unis d’Amérique pour les travaux de la 70e session de l’Assemblée générale des Nations Unies. Mais c’est d’abord en VRP que le Président chinois, Xi Jinping, a été accueilli au pays de l’Oncle Sam. Inutile de vous dire que les américains ont mis les petits plats dans les grands pour accueillir le « manager » du plus gros marché au monde qui se trouve être aussi l’atelier du monde et, last but not least, la 2ème économie du monde. Que du superlatif pour parler de ce pays, la Chine, de ses dirigeants, de ses industries et surtout de ses ambitions. Justement, ces ambitions sont sans limites. La Chine n’aura de cesse de croitre tant qu’elle n’aura pas réussi à mettre le mode entier au pied de la Grande Muraille, vestige de sa gloire millénaire et piédestal sur lequel elle se hisse fièrement pour dominer le monde. Comme pour narguer New-York, le siège de l’ONU ou Washington, la capitale fédérale, le dirigeant chinois débute son séjour américain par la côte Ouest, précisément par Seattle, dans la SiliconValley, cette terre sur laquelle sont implantées « … les industries à forte valeur ajoutée, notamment l’informatique et l’électronique… ». Sur une photo qui vaut son pesant d’or, au propre comme au figuré, Xi Jinping est entouré d’une brochette de dirigeants des plus grandes sociétés de technologie des USA et de Chine. Nos confrères qui rendent compte de cette visite sont euphoriques. Parlant des chefs d’entreprises du secteur de l’électronique et de l’Internet, ils écrivent : « Ils ont tous voulu être de la fête. Tim Cook, le PDG d’Apple, a fait le déplacement jusque dans l’antre de son ennemi historique pour être sur la photo. Jeff Bezos (Amazon), Satya Nadella (Microsoft), Reid Hoffman (LinkedIn), Brian Chesky (Airbnb) ou encore Jerry Yang (co-fondateur de Yahoo) sont également venus écouter le leader chinois assurer que son pays en ferait davantage pour protéger les droits d’auteur et attirer les investissements étrangers . Mark Zuckerberg arbore aussi son plus beau sourire… ainsi qu’un costume. C’est suffisamment rare pour être noté : le fondateur de Facebook, habitué aux jeans et pulls légers en toute occasion, ne s’est laissé photographier en costume-cravate que deux ou trois fois (à Deauville pour le G8 de 2011 ou lors de sa visite à la Maison Blanche en 2012). Il ne s’était même pas mis sur son 31 pour accueillir Barack Obama au siège de Facebook en avril 2011. Mark Zuckerberg s’était alors contenté de porter une cravate avec son jean et ses baskets ». C’est vous dire ! Le cliché de Seattle a conquis le qualificatif de « photo de classe ». Là-dessus, « chaque PDG porte le nom et la capitalisation boursière, en monnaie chinoise, de son entreprise, histoire de bien montrer aux citoyens chinois que ces chiffres impressionnent, que tout ce qui compte dans le monde de puissance technologique et financière est au rendez-vous ». Sans faire l’impasse sur la fortune colossale des « jeunots » de la SiliconValley, notre confère s’attarde sur le cas du secrétaire général du Parti communiste chinois, lointain successeur de Mao Zedong, qui pose avec son sourire débonnaire à la tête de quelque 3 600 milliards d’euros cumulés. Pour votre sérénité d’après-fête (22 septembre et Tabaski), je ne vous conseille aucune conversion en FCFA. Non seulement, c’est une affaire de gros sous, mais c’est aussi et surtout une opportunité d’affirmer son leadership dans un secteur en pleine mutation. Sans coup férir, les chinois bloquent Facebook, LinkedIn et Google. Lu Wei, le « régulateur » d’Internet en Chine n’en a cure ! En dehors du patron de Google, qui a la rancune tenace, toutes les fortunes de la SiliconValley, de l’informatique et de l’électronique ont cru bon venir faire allégeance au Seigneur Xi. Qui saura sûrement s’en souvenir au moment de la prochaine redistribution des cartes. Il se dit que Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, s’est mis au mandarin et a pu brièvement s’entretenir en chinois avec Xi Jinping lors de cette séance photo. Le petit futé ne renonce pas à s’adjuger, le moment venu, une part confortable du marché chinois, ce qui, du coup, lui rapporterait un matelas de dollar compte tenu de la taille exponentielle de ce marché. Quant aux dirigeants de Google, peut-on s’attendre à ce qu’ils reviennent à de meilleurs sentiments ? Ou, devant l’indignation de Barak Obama, relayée par les lobbies en tous genres, les Chinois renonceront-ils à casser le monopole de Baidu, leur moteur de recherche national, qui est à l’origine du courroux de Google ? Ce n’est pas impossible mais, à court terme, les Chinois n’imaginent pas envisager cette hypothèse tant ils sont sûrs de leur bon droit. Et Xi Jinping ne s’est pas privé de rappeler dans un discours résolument rabat-joie pour les patrons américains de l’Internet que le cyberespace doit se développer en tenant compte des conditions nationales de chaque nation. Ce qui a le mérite de la clarté. Mon cousin qui a un sens exceptionnel de la repartie se serait ainsi exclamé : « Ce qui est dit est dit ! ».
Serge de MERIDIO