Une médaille en Or, une en Argent et 2 en Bronze. Telle est la fructueuse moisson des athlètes maliens aux Jeux mondiaux des Special Olympics. Ainsi, Bandiougou Sidibé est médaillé d’Or au saut en longueur et d’Argent sur les 100m. Et Badra Aliou Traoré a récolté le Bronze au saut en longueur et sur les 100 m. Les deux dames, Oumou Niang (32 ans, 100m et lancer de poids) et Salimata Diawara (15 ans, 100 m et saut en longueur) n’ont néanmoins pas démérité. Face à des adversaires chevronnées, elles ont été handicapées par leur inexpérience dans ce genre de compétition. N’empêche qu’elles ont suscité beaucoup d’espoir pour l’avenir.
Le résultat a en tout cas de quoi combler une jeune mais ambitieuse présidente. «Je suis comblée et très fière de la prestation de nos athlètes qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour hisser très haut les couleurs du Mali à ces Jeux mondiaux de Los Angeles», nous avoue Hamchétou Maïga Bâ dite Tanti, avec sa légendaire humilité. «Nous, mon équipe et moi, avons accueilli ces performances avec beaucoup de joie et de fierté pour ces athlètes et leur encadrement qui y ont mis le temps et accompli le travail nécessaire pour être prêts pour ces jeux mondiaux. Et cela dans un environnement qui ne leur était pas forcément favorable», insiste Bâ Hamchétou Maïga. Et pourtant, malgré cette performance, aucune autorité sportive n’était à l’aéroport pour accueillir nos héros de Los Angeles (L.A) revenus au bercail le 5 août 2015. Que des membres du Conseil d’Administration de Special Olympics Mali (S.O Mali) et aussi des travailleurs de l’aéroport Bamako-Sénou pour les accueillir. Ni la jeunesse de l’organisation S.O Mali ni le déroulement de l’Afrobasket U16 garçons (30 juillet-8 août 2015) ne peuvent justifier ce traitement discriminatoire des autorités maliennes.
Mais il en faut plus pour décourager Hamchétou et son équipe. «Cela est aussi un autre challenge que nous comptons relever dans les années à venir. Notre souhait est que, d’ici à 2018, S.O Mali soit connue par tous les Maliens et Maliennes», promet la capitaine des héroïnes de l’Afrobasket féminin «Sénégal 2007». Le seul titre continental pour nos Aigles Dames seniors. La satisfaction n’est donc pas entachée. «Notre plus grande satisfaction est la joie de nos athlètes qui ont eu à découvrir les États-Unis, un pays qui fait beaucoup pour les personnes ayant une déficience intellectuelle. C’est le pays de la fondatrice des Special Olympics, Eunice Kennedy Shriver», précise l’ancienne internationale de basket. La star du basket féminin malien et africain ajoute : «nos représentants ont ainsi eu l’opportunité de côtoyer beaucoup d’autres athlètes de plus de 170 pays représentés à Los Angeles. Nos athlètes se sont très bien comportés tant sur le plan social que compétitif. Et cela est un immense réconfort et une grande satisfaction».
De la volonté pour surmonter les obstacles
Mais il a fallu contourner beaucoup d’obstacles pour être au rendez-vous de «Los Angeles 2015». Le programme étant jeune et pas tellement connu, «nous avions eu beaucoup de difficultés cette première année à faire face à ce voyage. Nous tenons à remercier le Ministère des Sports qui a donné les équipements et un billet d’avion pour la délégation», assure la présidente. S.O Mali compte maintenant tirer sagement les enseignements de cette participation pour mieux aborder les futurs défis. «Nous devons mieux nous organiser pour les prochains Jeux mondiaux. Mieux nous organiser en termes de préparation, de prise en compte de toutes les régions du Mali et de logistiques afin de faire face aux coûts des billets d’avion et divers», indique Tanti. Et cela avec, dit-elle, «l’ambition d’amener plus d’athlètes aux prochains jeux afin qu’ils puissent voir qu’ils ne sont pas seuls face à leur déficience».
Un engagement prolongé au service de la nation
C’est aux Etats-Unis, où elle a joué et réside depuis sa retraite, que Hamchétou Maïga a eu à participer au programme Special Olympics. Par la suite, elle s’est rendue compte que ce programme n’était plus actif au Mali depuis un certain temps. Nous savons que, au Mali, les activités de prise en charge des Special Olympics ont débuté en 1990 sous l’impulsion de la regrettée Mme Sanogho Kadiatou Bagayoko, ex-directrice/Fondatrice de l’Association Malienne de Lutte Contre les Déficiences Mentales chez l’Enfant (AMALDEME). Et depuis le décès de cette brave Dame le 16 novembre 2006, le programme était dans l’impasse, dans l’indifférence totale des autorités sportives du pays. Et cela à l’image de l’AMALDEME abandonnée à elle-même. Sollicitée, S.O International a donc donné sa bénédiction à Mme Bâ pour réanimer S.O Mali. On se rappelle que le lancement des activités du S.O Mali avait eu lieu le 18 janvier 2014, lors d’une conférence de presse au siège du Comité national olympique et sportif (CNOSM) à Bamako.
«Special Olympics Mali s’adresse aux handicapés mentaux qui constituent une frange fragile de la société et dont la prise en charge pose d’énormes problèmes du fait de l’absence de structures adéquates», précise Hamchétou, capitaine des basketteuses championnes d’Afrique en 2007 à Dakar (Sénégal). C’est donc un tremplin pour l’épanouissement des déficients intellectuels. Et, précise l’ancienne gloire du basket féminin africain, «Special Olympics contribue à la libération de tout le potentiel de la personne souffrant du handicap mental afin de lui apporter un épanouissement physique, mental et social». On comprend alors aisément son engagement pour redonner un second souffle à cette organisation. Aujourd’hui, avec un groupe appelé le «Comité Fondateur», elle travaille à l’atteinte de l’objectif principal qui est d’offrir «une plateforme à toutes ces personnes ayant une déficience intellectuelle». Il s’agit, indique Tanti, de leur donner «une tribune d’expression et une opportunité de s’épanouir à travers le sport».
S.O Mali œuvre aussi à inclure d’autres volets à travers la santé et les divertissements. Après les Jeux de Los Angeles, l’ambition de Hamchétou est de continuer sur cette même lancée. Cela passe par une implantation du programme dans toutes les régions du Mali, le recrutement de plus d’athlètes car beaucoup sont cachés et souffrent de mauvais traitements. Tout cela sur fond d’un grand focus sur l’inclusion et l’intégration permettant à nos athlètes de jouer avec des gens dits «normaux» ! «Nous aimerions surtout que l’organisation Special Olympics Mali soit officiellement reconnue tant sur le plan sport, santé et aussi social. Le Département des Sports et le Comité Olympique nous ont accompagnés dans la réactivation du programme et nous espérons toujours compter sur leur collaboration», précise la championne d’Afrique de basket en 2007 avec les Aigles du Mali.
Tous derrière S.O Mali
Pour concrétiser ses ambitions en faveur des personnes souffrant de déficience mentale, elle compte aussi sur le soutien du ministère de la Santé ; du ministère de la Solidarité, de l’Action humanitaire et de la Reconstruction du Nord ; du ministère de l’Education nationale ; et du ministère de l’Emploi, de la Formation professionnelle, de la Jeunesse et de la Construction citoyenne.
Comme le souhaite logiquement la présidente Hamchétou Maïga Bâ, S.O Mali a besoin de l’union sacrée et de la générosité de l’Etat et des bonnes volontés afin de donner «l’opportunité à nos frères, sœurs et parents de s’épanouir et surtout montrons-leur qu’ils font partie de nous» et aussi leur démontrer «qu’ils ont beaucoup à offrir à nos communautés, à nos pays et à l’humanité» !
Moussa BOLLY