Le public sportif malien peut attester que l’ancien international du Djoliba, Daouda Diakité dit Darou, a marqué son temps, et, partout où il a évolué, il s’est vaillamment imposé. Le joueur incarnait la rigueur et était dur sur les attaquants dans son couloir droit. Pour comprendre sa longue et riche carrière, il suffit de savoir que Darou a connu le haut niveau très jeune. Il était l’un des rares enfants qui défiait Aly Koïta dit Faye, l’ex responsable du centre de formation du Djoliba qu’il considérait comme son grand père. En réalité Faye l’aimait et le choyait parce qu’il lui voyait un bel avenir. L’enfant de Bolibana est l’invité de la semaine de la rubrique “Que sont-ils devenu ?”
Darou s’est beaucoup fait distinguer dans les compétitions inter quartiers, où ses amis l’appelaient en renfort. Nous l’avons précisément connu sur le terrain GMS de Niomirambougou. En son temps, il constituait un élément de taille pour le FC Renaissance, qui a successivement éliminé la célèbre équipe du FC Kotontala du Badialan III Kodabougou, entrainée et entretenue par l’infatigable Moriba Sam Camara, et le Benso FC de Boubacar Diallo dit Maër, pour remporter la coupe “feu Raphaël Diallo”. A la fin de chaque match, Daouda Diakité était le point d’attraction des enfants qui l’accompagnaient en grand nombre jusque dans la famille Niambélé, sise à Kodabougou et quartier général du FC Renaissance. Que de beaux souvenirs ! Ces clubs de la Commune III ont manqué de soutien, surtout de moyens pour intégrer la ligue du District de Bamako. C’est là où l’ombre de son grand frère Bakary Diakité dit Bakaryni planait sur lui.
Le rêve de jouer au Djoliba AC
Tout cela s’est passé entre mai et juin 1994, et Darou était déjà à ses débuts au Djoliba, où il avait disputé toutes les éliminatoires de la coupe du Mali de l’année précédente. En finale contre l’USFAS, selon lui-même, l’entraineur Mamadou Sidibé dit Décossaire l’a écarté pour donner plus de chances à ses ainés qui n’avaient jamais remporté le trophée national.
Très jeune, Daouda Diakité rêvait de jouer au Djoliba. Pour se faire, il a compris que le mieux serait d’abandonner les aventures avec son équipe de quartier, le Hafia FC et rejoindre le centre de formation des Rouges au début des années 1990-1991.
Les premières semaines d’entrainement ont vite semé son amour dans le cœur du technicien Faye, qui le comblait de cadeaux. Paradoxalement, les deux ne s’entendaient pas : Darou était un enfant récalcitrant, et Faye avait l’obligation d’assoir son autorité pour canaliser les dizaines d’enfants qu’il testait tous les jours. Leur mésentente, fut-elle régulière, ne durait pas, parce que Daouda ne changera pas et Faye comptait sur lui pour l’avenir. Cadet à l’époque, il évoluait également avec les juniors. C’est-à-dire qu’il a respecté l’ordre normal de progression au Djoliba jusqu’à sa première sélection en équipe nationale Junior pour les éliminatoires et la phase finale de la CAN Junior en 1995 au Nigéria.
Après cette compétition de haut niveau, Darou a compris qu’il est plus facile d’être au sommet que de s’y maintenir.
Avant de parler de son parcours et de ses frasques au Djoliba, nous rappelons une de ses actions ; c’était en 1999 lors de la demi-finale de la coupe du Mali contre le Stade malien de Bamako. Par sa rigueur, il avait néantisé l’animateur principal de l’attaque Stadiste, le puissant ailier gauche Mamadou Diarra. Celui-ci était de la génération des Aiglons de 1999 composée à l’époque des Seydou Kéïta dit Seydoublen, Mamadou Diarra dit Djilla, Sadio Baba Cissé, Mamadou Bagayoko, Séga Sissoko etc ….). Alors ce jour-là, rien ne marchait pour les Blancs du point de vue offensif, jusqu’à l’expulsion du latéral djolibiste à la 67ème minute. Qu’est ce qui s’est passé ? Darou, en pleine foulée sur son couloir droit en direction du camp stadiste, est fauché par un tacle aérien de Nouhoun Camara dit “Kénéya Dji”. L’action du défenseur stadiste était tellement flagrante, que l’arbitre central Sidi Bekaye Magassa a sauté avec le carton rouge pour l’expulser. Au même moment, Darou reconnu pour son impulsivité, piétina Nouhoum Camara. Voilà pourquoi les deux joueurs ont été expulsés en même temps.
Libéré par la sortie de son garde-corps, Madou Diarra, en deux incursions, permit à Mamadou Kanté de tuer le match et d’envoyer le Stade malien en finale. Pourquoi Darou a agi ainsi, en se rendant justice ? L’enfant de Bolibana répond :
“Dans un match de football, il y’a des gestes instantanés parfois difficile à expliquer. Rappelez-vous de ce carton rouge de Kylian M’Bappé en septembre 2018 contre Nîmes. Tout le monde sait que l’attaquant français est discipliné. Mais ce jour, il a surpris tout son monde par sa réplique. Parce que selon lui, l’attitude du défenseur nîmois sortait du cadre footballistique. C’est ce qui m’est arrivé lors du match dont vous parlez. En réalité, le tacle de Nouhoum était intentionnel, et je l’ai trouvé trop méchant. Mais cela ne justifie pas non plus mon geste. L’arbitre est là pour sanctionner, donc je devrais m’en tenir à sa décision. Ce sont des choses qui arrivent et passent sans laisser de traces dans les relations humaines. Je profite d’ailleurs pour dire que toute ma carrière durant, je n’ai eu le moindre problème avec qui que ce soit, ni les joueurs, ni les dirigeants et même les supporters. C’est cela aussi la beauté de la vie, avoir de bons rapports avec son entourage “.
Mes trophées de guerre
Au Djoliba, Daouda Diakité a remporté deux coupes du Mali (1996, 1998), quatre titres de champion (1996,1997, 1998, 1999), et réalisé deux doublés (coupe-championnat) en 1996 et 1998. Avec le COB, Darou a remporté la coupe du Mali en 2000.
Justement, c’est à l’entame de la saison 1999 -2000, qu’il transfère au Club olympique de Bamako (COB). Comment peut-il quitter un club dans lequel il rêvait de jouer dans l’enfance pour aller dans un autre, de surcroît moins titré et moins populaire ? Darou dit que les dirigeants du COB ont sorti la grosse artillerie en termes de propositions concrètes : une moto et un salaire conséquent. Cette nouvelle donne n’a fait que confirmer sa progression en équipe nationale, avec à la clef la CAN 2002, sanctionnée par une quatrième place des Aigles du Mali.
Sa dernière sélection avec les Aigles date de 2008, quand il n’a pas été retenu pour la phase finale. Parce qu’un an auparavant il avait fait un tour en France (d’abord à Bastia, puis Saint Brieux). Malheureusement, il n’a pu décrocher le moindre contrat. Mais l’ancien entraineur des Aigles, François Jodar, le conseille de retourner au Mali, tout en promettant de s’impliquer auprès de certains clubs. Une fois à Bamako, Darou reprend les entrainements avec le Djoliba AC, mais il sera déboussolé par la tournure des événements. De quelle façon ? Voici sa version des faits : “Mon retour en famille a coïncidé avec le remplacement du coach Fagnery Diarra par Alou Badra Diallo dit Conty. Ce qui a complètement bouleversé ma carrière. J’ai été un joueur constant, mais si on ne me fait pas jouer cela va de soi que je sois délaissé au niveau de l’équipe nationale. Voilà l’explication qui vous permet de comprendre facilement comment j’ai raté la CAN 2008. En réalité, Conty m’a mis au garage. Exacerbé par cette situation, j’ai demandé à Karounga Kéïta de me prêter au Réal. La saison suivante le Djoliba m’a récupéré et Conty a continué de me laisser sur le banc. Pire, il m’a même sevré de licence CAF. Je n’ai rien dit, mais j’ai exprimé mon ras le bol le jour où les dirigeants djolibistes sont venus me chercher, pour rejoindre l’internat après le départ de Sékou Bagayoko. L’occasion était bonne pour moi de dire tout ce dont j’ai été victime, et surtout dénoncer l’indifférence de ces mêmes dirigeants face à l’attitude de Conty à mon égard. Au finish, j’ai refusé d’aller à l’internat. Il fallait cela. Je ne sais pas ce que j’ai pu faire à Conty, pour qu’il me traite ainsi. C’est moi Daouda qui ai conseillé à Moussa Konaté de prendre ce même Conty, quand le COB a eu des problèmes avec son entraineur ivoirien Monguéhi Guéhi François. Le président Moussa est vivant, il peut témoigner. Durant tout le temps de Conty au COB, il n’y a jamais eu de problèmes ou d’incidents entre nous. Malgré ce mépris, je ne lui ai fait aucun reproche, parce que dans la vie, il faut éviter l’animosité dans les relations humaines”.
En faisant ce récit des faits, nous avons senti qu’il s’emportait. Nous avons profité d’une brèche pour aborder ses bons souvenirs.
A ce niveau, Darou retient la CAN Junior au Nigeria en 1995, le doublé du Djoliba en 1996, la coupe du Mali du COB en 2000 et la CAN 2002 à Bamako.
L’élimination du Djoliba à la porte de la phase de poules de la ligue des champions par le Raja de Casablanca en 1998, sa non sélection pour la CAN 2008 lui sont restés au travers de la gorge.
Dans la vie, Darou aime le sérieux, le football et la franchise. Il déteste l’hypocrisie.
C’est en 2013 que Daouda Diakité a rejoint sa femme en France. Le couple a quatre enfants. Il travaille dans une société, et selon lui, il ne se plaint pas.
O. Roger
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