Mahamadou Diarra Djila" : "L''Équipe nationale peut et doit gagner à Lomé""

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Interview accordée au capitaine des Aigles Mahamadou Diarra "Djila".

L”Essor : Malgré le sacre du Réal l”entraîneur Fabio Capello a été remercié par la direction du club. Êtes-vous surpris par ce licenciement ?

Mahamadou Diarra : Pas tellement parce qu”en football tout peut changer du jour au lendemain. Fabio Capello fait partie des meilleurs entraîneurs du monde, il a connu des débuts difficiles avec le Réal, mais il est parvenu à redresser la situation et à donner une âme à l”équipe. Personnellement, je pense que sa manière de travailler, sa mentalité et son savoir faire ont été déterminants au cours des 6 derniers mois. Je suis fier d”avoir travaillé avec Capello et je le remercie pour tout ce qu”il a fait pour moi.

L”Essor : Selon vous qu”est-ce qui n”a pas marché avec Fabio Capello ?

M. D : Vous savez, le Réal Madrid est une équipe à part avec des supporters très exigeants et qui pèsent souvent dans les décisions prises par la direction du club. Au Réal, les résultats ne suffisent pas, les supporters exigent également du beau spectacle avec des buts à la Zizou. Je pense que ce côté et notre début de saison difficile ont joué contre Fabio Capello qui, à l”instar de la plupart des techniciens italiens, privilégie d”abord le résultat.

L”Essor : Comment voyez votre avenir au Réal après le départ de Capello ?

M.D. Je suis confiant et je pense que tout dépendra de moi-même. Tout s”est bien passé avec Capello, c”est à moi de continuer sur cette lancée et de rester présent tout au long de la saison. Je n”ai pas le droit de décevoir les supporters et je suis prêt à relever le défi quel que soit le nom de l”entraîneur qui succédera à Fabio Capello. Comme je l”ai dit plus haut, en football, tout peut basculer du jour au lendemain et nous sommes habitués à ce genre de situation. Le plus important pour moi, c”est de continuer à faire mon boulot en donnant le meilleur de moi-même.

L”Essor : Parlons à présent de l”Équipe nationale. Nombre de Maliens pensent aujourd”hui que vous jouez toujours en deçà de votre valeur avec les Aigles. Que répondez-vous à ces critiques ?

M. D. Je ne me suis jamais posé de questions par rapport à ces critiques parce que j”ai la conscience tranquille de n”avoir jamais triché avec la sélection nationale. Je fais tout ce que je peux faire avec les Aigles, les gens doivent comprendre qu”on ne peut pas toujours jouer à son meilleur niveau. Aussi, les supporters semblent oublier que chaque match a ses vérités et que les contextes changent quand on se retrouve en sélection nationale.

Chacun a sa manière d”analyser la situation et je comprend la réaction de mes compatriotes qui aiment le football et qui veulent voir l”Équipe nationale jouer les premiers rôles en Afrique. Mais ce que je voudrais qu”ils sachent : Djila ne trichera jamais avec le drapeau national et quand j”accepte de quitter l”Espagne pour venir au Mali, il est hors de question pour moi de me réserver. Pour moi, c”est une question d”honneur et j”ai toujours appris, depuis mes débuts au CSK, qu”on ne doit jamais badiner avec le drapeau national.

Au Réal Madrid comme à l”Équipe nationale, je fais ce qu”on me demande de faire, mais le résultat n”est pas toujours le même. Est-ce parce que je ne me retrouve pas au bon endroit et au bon moment lorsque je joue avec la sélection nationale ? Est-ce un problème de complémentarité ? Une chose est sûre : je n”ai jamais triché ni avec l”un, ni avec l”autre.

L”Essor : La qualification à la phase finale de la CAN 2008 passe par une victoire contre le Togo lors de la dernière journée.

M.D. Personnellement, je suis confiant pour ce match. Je pense qu”on peut faire quelque chose à Lomé. De toute façon, la balle se trouve dans notre camp. Pour moi, ce match sera la revanche de la rencontre de 2005 lorsque les Éperviers sont venus s”imposer 2-1 au stade du 26 Mars. L”heure est venue pour nous de rendre la monnaie de leur pièce aux Togolais et je serai très heureux de semer la pagaille le 9 septembre prochain à Lomé comme ils l”ont fait ici en mars 2005. Mais pour aller gagner là-bas, il faut être costauds dans la tête et disputer tous les ballons. Nous devons aborder ce match comme une finale de coupe du monde, on peut et on doit gagner au Togo pour laver l”affront de 2005. Je respecte les Éperviers, mais nous ne pouvons nous permettre de rater deux CAN de suite.

L”Essor : Quels commentaires vous inspire le parcours des Aigles : deux victoires et trois nuls en cinq journées de compétition ?

M. D Je ne considère pas ce bilan comme un échec pour la simple raison que nous sommes toujours en course pour la qualification. Toutefois, il faut admettre que nous avons trop traîné et qu”on aurait pu se qualifier avant la dernière journée si on n”avait échoué à faire le plein à domicile. Ce n”est que partie remise parce qu”il reste un match et on peut toujours se racheter en allant gagner à Lomé. Contre le Bénin, on a déroulé un bon football tant à l”aller qu”au retour, mais nous n”avons pas réussi à concrétiser notre domination.

Ce sont des choses avec lesquelles on doit compter en football, mais qui sont malheureusement ignorées par nombre de supporters. On peut bien jouer et ne pas gagner comme on peut mal jouer et gagner. Rappelez-vous notre victoire contre la Guinée en quart de finale de la CAN 2004. Pensez-vous qu”on méritait la victoire ce jour après avoir couru derrière le ballon pendant 90 minutes ? On ne méritait pas de gagner ce jour et je puis dire que la débauche d”énergie de ce match a été la cause principale de notre déroute en demi-finale face au Maroc.

L”Essor : Il faut tout de même admettre que l”Équipe nationale manque d”efficacité devant les buts adverses.

M. D : C”est dû à la malchance et on ne peut remettre en cause la qualité des attaquants. Prenez l”exemple sur Frédéric Kanouté 3è meilleur buteur de la Liga ou encore Seydou Keïta qui a marqué plus de 10 buts cette année avec son club. Tous les joueurs aiment marquer des buts et il faut éviter de juger les gens à travers deux à trois matches. Je demande aux supporters d”être compréhensifs et de faire des efforts pour soutenir les joueurs lorsqu”ils sont en difficulté. Rien n”est encore perdu pour la CAN et tout le monde doit rester mobiliser derrière l”équipe jusqu”au coup de sifflet final du dernier match des éliminatoires. Au Mali, on vit de football et on respire avec le ballon, nous avons une bonne équipe qui a besoin du soutien de tous les Maliens pour porter haut le drapeau national.

L”Essor : Comment avez-vous vécu l”avant dernière journée des éliminatoires avec cet ultimatum de la FIFA qui vous a empêché de jouer avec les Aigles ?

M. D : Ca été très dur pour nous, Fred et moi de quitter la sélection au profit de nos clubs. C”était un coup monté par la FIFA et les excuses présentées par le président Blatter n”ont trompé personne. Avant mon départ d”Espagne, le Réal avait tenté de confisquer mon passeport au motif que l”équipe devait effectuer une tournée aux États-Unis. Non seulement j”ai refusé de donner mon passeport, mais en plus j”ai clairement dit qu”il était hors de question pour moi de renoncer au match Mali-Sierra Leone.

Malheureusement, la FIFA a cédé devant la pression du Réal et nous a menacés de deux ans de suspension si on ne retournait pas en Espagne 48h avant la dernière journée de la Liga. Le jour du match (Mali-Sierra Leone, ndlr), j”ai laissé mon portable allumé et à la mi-temps de notre rencontre, j”ai pu apprendre par un ami que Djibril Sidibé a marqué sur penalty. À la fin du match, le même ami m”a appelé pour me dire que le Mali a gagné 6-0. J”étais aux anges parce qu”on venait, nous aussi, d”être sacrés champions d”Espagne. La fête a été double pour moi et j”espère revivre la même chose le 9 septembre prochain à Lomé.

Interview réalisée par
S. B. TOUNKARA

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