La Russie peut-elle être réintégrée au football européen et à la course au Mondial 2022 ? La Fédération russe de football (FUR) a saisi le Tribunal arbitral du sport (TAS) pour faire annuler le bannissement de ses clubs et sélections nationales des compétitions de la Fifa et l’UEFA.
En contestant en justice son exclusion des compétitions internationales, la FUR place le sport mondial face à ses contradictions, entre défense affichée des droits de l’homme et refus d’abdiquer sa neutralité politique.
Un préjudice irréparable ?
Avant que le TAS ne tranche le litige sur le fond, la FUR lui demande de suspendre l’exécution des sanctions, c’est-à-dire, concrètement, de laisser sa sélection masculine affronter la Pologne fin mars en barrage du Mondial 2022, et sa sélection féminine disputer l’Euro 2022 cet été en Angleterre. Le Spartak Moscou, dernier club russe engagé en Coupe d’Europe cette saison, a été exclu de la Ligue Europa avant d’affronter le RB Leipzig en huitièmes de finale.
La Sbornaïa, quart de finaliste du Mondial 2018 organisé à domicile, pourrait mettre en avant le « préjudice irréparable » qu’elle subirait, selon un juriste interrogé par l’Agence France Presse. La prochaine Coupe du monde doit se tenir au Qatar du 21 novembre au 18 décembre. Sauf que la Pologne et nombre de fédérations européennes refusent d’affronter les Russes. La Fifa a d’ailleurs décidé mardi soir, sans attendre les mesures provisoires du TAS et au risque d’être désavouée, de qualifier la Pologne directement pour la finale des barrages.
« Je ne comprends pas pourquoi les sportifs doivent maintenant souffrir »
« Le football est ici totalement uni et en plein soutien envers toutes les personnes touchées en Ukraine. Les deux présidents (Gianni Infantino pour la Fifa et Aleksander Ceferin pour l’UEFA, NDLR) espèrent que la situation en Ukraine s’améliorera significativement et rapidement afin que le football puisse à nouveau être vecteur d’unité et de paix entre les peuples », expliquaient conjointement la Fifa et l’UEFA dans un communiqué.
« Je suis contre la discrimination en fonction de la nationalité. Je n’ai pas honte d’être russe. Je suis fier d’être russe. Et je ne comprends pas pourquoi les sportifs doivent maintenant souffrir », a écrit sur Instagram le capitaine de la sélection russe de football Artem Dzyuba regrettant « la méchanceté, la saleté et la bile qui sont actuellement déversées sur l’ensemble des Russes » et soulignant que « la guerre c’est horrible ».
Si les instances se sont abstenues de justifier publiquement leurs sanctions, l’UEFA a soulevé, dans une lettre à ses fédérations, ses « sérieuses inquiétudes sur la capacité à assurer la sécurité de tous », en raison de l’hostilité aux Russes de certaines fédérations et de l’opinion publique, et de la fermeture des espaces aériens.
Le TAS ouvre deux procédures distinctes
Pour l’heure, le TAS basé à Lausanne en Suisse va ouvrir « deux procédures distinctes », visant respectivement la FIFA et l’UEFA en y associant une quinzaine de fédérations nationales qui refusent ouvertement d’affronter les Russes. Le TAS devrait communiquer « dans les prochains jours » plus de détails sur le calendrier et les modalités de ces recours, ainsi que sur leurs éventuels effets suspensifs.
Le TAS, déjà critiqué par une partie du sport occidental ces dernières années pour sa gestion du dopage russe, a entre les mains un dossier extrêmement sensible : une réintégration du football russe créerait de nouvelles difficultés, faute d’adversaires disposés à les rencontrer.
Sur la recommandation du Comité international olympique (CIO), les Russes ont été bannis jusqu’à nouvel ordre des compétitions internationales d’athlétisme, de hockey sur glace, de rugby, de basket, de cyclisme, de ski alpin ou d’escalade. La Russie a également été exclue des Jeux paralympiques d’hiver de Pékin (du 4 au 13 mars), par une décision prise la veille de la cérémonie d’ouverture.
RFI