Fodé Sissoko, champion de France d’élite en salle aux 200 mètres : “Mon objectif est de réaliser des belles performances au Championnat d’Afrique et aux Jeux olympiques de Tokyo” “Cette victoire au championnat d’élite de France m’a donné la motivation de continuer et d’aller encore plus loin”

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L’international malien, Fodé Sissoko, a remporté les 200 mètres lors du championnat d’athlétisme d’élite en salle des clubs français. En réalisant un temps de 20 secondes 88, il égale la meilleure performance française de l’année. Ce jeune sprinter de 25 ans, à l’avenir très prometteur, nous a accordé une interview exclusive dans laquelle il parle de ses débuts dans l’athlétisme, son parcours sportif, ses ambitions et les difficultés auxquelles il est confronté.

Aujourd’hui-Mali: Comment êtes-vous venu dans l’athlétisme?

Fodé Sissoko : C’est en 2014 que j’ai commencé l’athlétisme lors du concours d’entrée à l’Institut national de la jeunesse et des sports (Injs). Lors des épreuves, j’ai été détecté par le secrétaire général de l’Injs, Baradji  Maïga. La même année, je fus sélectionné en équipe nationale d’athlétisme du Mali pour participer au Tournoi de la Paix de l’Amitié et de la Solidarité.

Lors de ce tournoi, j’ai pu atteindre la finale des 400 mètres. Malheureusement, à la dernière ligne droite, j’ai eu une double fracture au niveau du tibia et du péroné. D’ailleurs, je profite de l’occasion pour remercier une fois de plus le ministre de la Jeunesse et des Sports de l’époque, Mamadou Gaoussou Diarra, qui a pris en charge mes soins médicaux, mais également le directeur et le corps professoral de l’Injs.

Parlez-nous de votre parcours sportif?

Durant mon parcours, j’ai beaucoup participé à des compétitions nationales, africaines et internationales d’athlétisme. Après mon rétablissement en 2015, j’ai été encore sélectionné en équipe nationale pour participer au Championnat d’Afrique junior d’athlétisme en Éthiopie. Malheureusement, à la veille du voyage, j’ai fait un accident en moto lorsque je venais de l’école.

J’ai eu une grave blessure au niveau de mon genou qui m’a empêché de participer à ce tournoi. En 2016, je suis revenu à mon top niveau et du coup, j’ai participé au Championnat national où j’ai remporté les 100 et 200 mètres.

Ensuite, nous avons participé (Ndlr : avec l’équipe nationale) au Championnat ouest-africain d’athlétisme ou j’ai été finaliste aux 400 mètres et vainqueur aux 200 mètres. Après ce tournoi, nous avons aussi participé au Tournoi de la Paix de l’Amitié et de la Solidarité ou le Mali s’est classé premier. Lors de ce tournoi, j’ai remporté les 200  et les 400 mètres. En plus de cela, j’ai remporté les deux relais avec mon équipe, notamment le relais 4 fois 100 mètres et celui des 4 fois 400 mètres.

Quelques mois après, j’ai participé au championnat d’Afrique senior à Durban en Afrique du Sud. Lors de ce tournoi, je me suis aligné au 200 mètres où j’ai été éliminé en demi-finale.

Cette compétition a été une grande expérience pour moi parce que c’était ma première grande compétition de haut niveau où j’ai également eu la chance de courir aux côtés de l’actuel recordman du monde de 200 mètres, Wayde Van Niekerk. J’ai été quatrième derrière lui lors des séries. En 2017, j’ai une fois de plus remporté le Championnat national d’athlétisme du Mali. Peu de temps après, j’ai été à Abidjan pour participer aux Jeux de la Francophonie. Malheureusement encore, je n’ai pas pu concourir à ce tournoi à cause des tensions entre la Fédération malienne d’athlétisme et mon club d’alors.

Au retour de ce tournoi, je n’ai pas baissé les bras et j’ai continué les entraînements. Après, les choses sont rentrés dans l’ordre et l’actuel directeur technique national (Dtn) de la Fédération malienne d’athlétisme et une journaliste internationale de Lille, Sylvie Larrière, m’ont trouvé un stage de perfectionnement de deux mois à Lille en France. Donc, c’est en avril 2018 que j’ai pu venir à Lille pour ce stage.

Il est important de souligner que ce stage m’a beaucoup apporté parce que juste après cela, j’ai participé au Meeting international d’Abidjan où j’ai terminé premier aux 400 mètres. Ensuite, j’ai bénéficié d’une bourse olympique auprès du Comité national olympique et sportif du Mali (Cnosm) pour retourner à Lille, en France.

Lorsque j’étais revenu en France, j’ai participé au Meeting de Courtrai en Belgique ou j’ai battu le record du Mali aux 200 mètres en réalisant un chrono de 20 secondes 52. À la suite de ce meeting, j’ai eu à remporter plusieurs autres compétitions dont celui le meeting de Market où j’ai remporté les 200 et les 400 mètres.

En juin 2018, il y a eu le Championnat d’Afrique d’athlétisme à Abuja au Nigéria, mais je n’ai pas pu être sur le podium à cause de la mauvaise organisation de ce tournoi. À mon avis, si l’organisation de ce tournoi était bonne, j’allais enregistrer de très bonnes performances.

Pourquoi avez-vous quitté le Mali pour aller vous installer en France?

Dans la carrière d’un athlète, il y a un moment où il faut sortir pour découvrir d’autres choses. Malgré qu’il y eût des compétitions au Mali, il fallait que je sorte pour d’autres horizons.

J’avoue qu’au Mali toutes les conditions n’étaient réunies pour aller plus haut. Même ici, toutes les conditions ne sont pas également réunies, mais c’est beaucoup mieux que celles du Mali. Les structures d’entraînement et les matériels ne sont pas du tout pareils.

En France, il y a beaucoup d’athlètes plus forts et je peux me mesurer à eux afin d’améliorer ma performance et mon temps. C’est à cause de cela que je suis allé en France pour être beaucoup plus performant parce qu’ici il y a plus de compétition.

Comment se passe votre séjour à Lille?

Actuellement, mon séjour en France se passe très bien à Lille. Comme vous le savez, il y a bientôt deux ans que personne n’est libre de ses mouvements à cause de la pandémie de Covid-19. C’est cela qui freine un peu nos activités, mais le gouvernement français nous a donné des portes de sortie afin que nous, les athlètes de haut niveau, nous puissions aller nous entraîner au-delà des heures de couvre-feu.

Du coup, ça commence à aller et j’espère du fond du cœur que les choses rentrent bientôt dans l’ordre pour que nous puissions entamer de vraies compétitions en présence des spectateurs. À part cela, pour les conditions cela peut aller et je profite de cette occasion pour remercier les membres du Comité national olympique et sportif du Mali (Cnosm), la Fédération malienne d’athlétisme, mon Club Lille Métropole Athlétisme et les bonnes personnes pour leur accompagnement. Vous savez, à un moment donné, le président du Cnosm, Habib Sissoko, doublait cette bourse des boursiers parce que celle de la solidarité olympique dont nous avons bénéficié n’était pas suffisante pour subvenir à tous nos besoins. À cause de la crise économique liée à la Covid-19, cet appui du président du Cnosm a été arrêté. Mais s’il pouvait nous redonner cet appui financier, cela ferait énormément de plaisir à l’ensemble des athlètes boursiers.

Avez-vous déjà été contacté par la Fédération française d’athlétisme afin de courir pour la France?

Je suis un athlète malien. Après ma performance au championnat d’élite d’athlétisme en salle, la Fédération française d’athlétisme m’a approché, mais pas pour que je me naturalise, mais plutôt pour me féliciter. De toutes les manières, je suis ici en France et je suis également affilié au club Lille Métropole d’athlétisme, un club affilié à la Fédération française d’athlétisme. Elle peut aussi m’apporter des choses en tant qu’athlète d’un club français.

Il y a quelques semaines, vous avez remporté la médaille d’or lors du  championnat d’élite d’athlétisme en salle de France aux 200 mètres. Comment avez-vous vécu cette victoire?

Cette victoire m’a très fait plaisir et m’a motivé davantage parce que les conditions auxquelles j’ai pu enregistrer cette performance m’ont donné beaucoup plus de confiance. Franchement, je n’ai pas bien préparé cette compétition et c’est juste à la veille que j’ai pu effectuer deux ou trois courses en salle. À vrai dire, je m’attendais à une victoire, mais pas à faire ce gros chrono et cela me donne désormais la motivation de continuer pour aller le plus loin possible.

Quelles sont vos ambitions pour la suite de votre carrière?

Mes ambitions futures, c’est de réaliser encore de belles performances et de descendre encore mon chrono. Mon objectif principal pour la saison est de réaliser de belles performances au championnat d’Afrique d’athlétisme et aux Jeux olympiques de Tokyo en juillet prochain. En plus de cela, c’est de descendre mon chrono sur les 200 et les 400 mètres.

Aujourd’hui, quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confronté?

Aujourd’hui, nous sommes confrontés à de petites difficultés financières parce que les bourses que nous percevons ne peuvent subvenir à tous nos besoins. Comme j’ai eu à le souligner, le président du Cnosm doublait nos bourses à un moment donné, mais avec la crise financière liée à la Covid-19 cela a été arrêté. Depuis, nous sommes en train de nous débrouiller pour joindre les deux bouts.

En plus de cela, avec la Covid-19, nous n’arrivions pas, à un moment, à nous entraîner régulièrement. Mais récemment, le gouvernement français a mis en place des attestations de dérogation pour les athlètes de haut niveau. Ce qui a beaucoup facilité nos tâches. J’espère que la situation va vite changer afin que nous puissions continuer avec les compétitions.

Avez-vous un appel à l’endroit des autorités sportives du Mali?

Le dernier mot que j’ai à l’endroit des autorités sportives maliennes, c’est de les remercier pour tout ce qu’ils ont fait pour nous. Mais également de leur demander de penser à l’athlétisme parce qu’il y a quelques semaines de cela des vidéos ont circulé sur les réseaux sociaux où nous voyons des gens en train de faire le safari sur la piste qui a coûté plus 500 millions Fcfa à l’État. En plus de cela, je leur demande de penser plus aux athlètes pour nous accompagner pleinement comme ils font avec les autres disciplines collectives.

Réalisé par Mahamadou TRAORE

 

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