Divorce Carteron-Femafoot : Incohérences et mensonges

Depuis le dimanche 19 mai dernier, le sélectionneur des Aigles du Mali, Patrice Carteron et la Femafoot s’adonnent à un exercice compliqué et stupide. C’est par presse interposée que les deux parties s’attaquent sur une probable rupture de contrat désormais consommée.  Une situation très inconfortable pour les Aigles du Mali qui disputent 2 matches importants des éliminatoires de la Coupe du Mali à domicile contre le Rwanda (9 juin) et le Bénin (16 juin). Chronique d’un feuilleton riche en incohérences et en mensonges !

C’est le site internet du Tout Puissant  Mazembe de la RD Congo qui dévoile le pot aux roses sur un probable transfert du sélectionneur des Aigles du Mali: «Patrice Carteron serait en négociation pour prendre les rênes du club du Tout Puissant Mazembe. Le technicien français a été vu le dimanche 19 mai arriver au Stade de Lumumbashi accompagné de Moïse Katumbi, président du TP Mazembe. C’était en marge du match de la Coupe Caf entre les Corbeaux et les Mozambicains de Liga Muculmana ». Toujours sur la page Facebook, selon le club congolais, Patrice Carteron «semble être le candidat numéro un à la succession du Sénégalais Lamine Ndiaye comme coach principal».

L’actuel sélectionneur du Mali pourrait donc quitter ses fonctions à la tête des Aigles. Cette situation très inconfortable a interpellé Hammadoun Kolado Cissé, président de la Femafoot sur le site du journal Jeune Afrique le lundi 20 mai : «Je n’étais pas au courant de cette visite, j’ai eu l’information, comme vous, par Internet…  Je suis surpris, pas énervé. Patrice Carteron est peut-être allé superviser les joueurs maliens qui évoluent au TP Mazembe (B. Diarra, C. Traoré, A. Bagayoko et O. Cissé)», a répondu le dirigeant malien, sans grande conviction. «Je vais l’appeler pour avoir quelques explications. Il est sous contrat. Il n’est pas question qu’il parte.»

Toujours sur le site de Jeune Afrique, le sélectionneur des Aigles, Patrice Carteron, essaie de brouiller les pistes : «Je suis sous contrat avec le Mali (NDLR : jusqu’en 2014). J’effectue juste une visite amicale. Ce que je peux dire, c’est que Mazembe a de très belles installations», a expliqué Carteron à Jeune Afrique, lors d’un échange de SMS.
Dans une information qualifiée d’Exclusif, le site de Jeune Afrique enfonce le clou en ces termes, le mardi 21 mai : «Moïse Katumbi tient son entraîneur. Le président du TP Mazembe (RDC) s’est mis d’accord avec Patrice Carteron, le sélectionneur Mali, qui va s’engager pour deux ans. Arrivé dimanche matin à Lubumbashi, Patrice Carteron n’a donc pas effectué seulement une «visite amicale», comme il l’avait déclaré à Jeune Afrique lundi. Les propos de Carteron chez nos confrères de Jeune Afrique, mardi,  prennent une nouvelle tournure. «Je vais démissionner de mon poste de sélectionneur des Aigles. Cela faisait un certain temps que j’avais pour objectif de quitter le Mali, pour retrouver le terrain au quotidien. J’avais dit aux dirigeants maliens que je partirais après les deux matches qualificatifs pour la Coupe du Monde 2014 du mois de juin à Bamako (face au Rwanda, le 9, et au Bénin, le 16, NDLR), quels que soient les résultats. Les évènements médiatiques de ces derniers jours m’obligent donc à accélérer les choses. Maintenant, j’attends des nouvelles de la Fédération malienne, pour savoir si elle souhaite que je gère ces deux rencontres, ainsi que celle contre la Bretagne, en amical, le 28 mai », a expliqué à Jeune Afrique le successeur de Lamine N’Diaye.
C’est seulement le mardi 21 mai que la Femafoot décide de communiquer sur ce qu’on peut qualifier d’ «Affaire Carteron».
Sur la télévison nationale (ORTM), le président de la Femafoot, Hammadoun Kolado Cissé, minimise le problème : « Il n’y a pas d’affaire Carteron… Patrice Carteron est sous contrat avec la Femafoot jusqu’au 31 juillet 2014… Jusqu’à  preuve du contraire, il reste le sélectionneur des Aigles du Mali… S’il signe ailleurs, nous porterons plainte contre lui et le club qui l’engage devant la Fifa…»
Le mercredi 22 mai, l’information cruciale tant attendue tombe à Lubumbashi : « Patrice Carteron a signé son contrat», selon le  site du T.P Mazembe. Avant de préciser : « Patrice Crateron a signé un contrat de deux ans avec le TP Mazembe ce mercredi 22 mai. L’ancien sélectionneur du Mali débutera sur le banc des Corbeaux  après les deux matches des éliminatoires du Mondial 2014 avec les Aigles maliens au mois de juin ».

 
Toujours selon le site du club congolais, l’annonce du choix de Patrice Carteron n’est pas une surprise car l’homme séjournait déjà à Lubumbashi depuis dimanche. Ce mercredi dans la matinée, au bureau administratif du club, les deux parties sont arrivées à un accord. Un contrat de deux ans a été paraphé. En présence d’un parterre des journalistes de Lubumbashi. L’après-midi, le nouveau sélectionneur a été présenté aux supporteurs après la victoire 3-0 du TPM face à Muungano.
Mise sous pression par l’opinion nationale, la Femafoot s’explique à nouveau le mercredi 22 mai sur Rfi à travers son président : « J’ai reçu un document de son avocat qui m’informe de la controverse actuelle qui règne autour de son départ. Pour nous, Carteron reste l’entraîneur du Mali. Il est lié avec nous par un contrat. Il nous demande un règlement à l’amiable. Du moment où il a signé avec un autre club, c’est lui-même qui a rompu le contrat abusivement. Donc, on tire les conséquences de ce fait ».
A la question de savoir si Carteron va diriger les 2 matches de Coupe du monde des Aigles à Bamako, le président de la Femafoot est catégorique : « Mais  il a déjà rompu le contrat puisqu’il a signé avec un autre club alors qu’il est l’entraîneur officiel du Mali. Donc c’est lui-même qui a rompu abusivement le contrat.»

Les enjeux d’un divorce brusqué
Les observateurs du football comprennent mal le divorce brusqué de Patrice Carteron d’avec la Femafoot. Recruté en juillet 2012 par la Femafoot comme sélectionneur des Aigles du Mali pour 2 ans, Patrice Carteron était ainsi lié au Mali jusqu’au 31 juillet 2014 avec des objectifs de résultats : double qualification des Aigles pour la Can 2013 et la Coupe du monde 2014, accéder aux demi-finales pendant la Can 2013. Avec la médaille de bronze conquise lors de la CAN 2013 en Afrique du Sud, Carteron a largement rempli le premier objectif de son contrat. Il est également bien placé dans les éliminatoires de la Coupe du monde  Brésil 2014. Après trois journées, le Mali (2e, 6 points) derrière l’Algérie (leader 6 points). Pourquoi Carteron quitte à ce moment précis une sélection nationale pour un club ?  Les enjeux financiers sont-ils en ligne de mire ? A cet effet, l’Etat malien le paie 9 millions mensuels contre plus de 13 millions au Tout Puissant Mazembé de la RD Congo du richissime président Moïse Katumbi. De sources bien informées nous apprennent que  Katumbi serait prêt pour un arrangement conséquent avec la Femafoot. Une sorte de dédommagement ! Comme le dirait l’autre : «Quand l’argent parle, on se tait.»  La Femafoot a-t-elle vendu Carteron au chairman Katumbi ?

 
L’ancien sélectionneur des Aigles du Mali Patrice Carteron a avancé des arguments : «Au mois de juillet prochain, il y aura les élections du bureau fédéral et à la tête de l’Etat malien.» Il s’inquiète d’une probable instabilité l’empêchant de s’épanouir avec les Aigles du Mali.
Quelque soit sa cote de popularité auprès des supporters après la CAN 2013 et le bel élan amorcé dans les éliminatoires du Mondial 2014, il serait très difficile pour Patrice Carteron de fouler le Stade du 26-Mars en juin pour les deux rendez-vous majeurs de juin contre le Rwanda et le Bénin sans  la vindicte populaire.
B Cissouma
Carteron, la Femafoot et les Aigles :
 Un malaise qui ne dit pas son nom
La nouvelle a eu l’effet d’une bombe dans le monde du football malien sinon même africain. Le sélectionneur national du Mali, Patrice Carteron quitte le nid des Aigles pour la tanière du Tout Puissant Mazembe. C’est le club congolais qui a d’abord balancé la nouvelle sous forme de peau de banane à la Femafoot avant que la nouvelle ne soit officialisée sur les médias très officiels de RFI, BBC et l’ORTM. Alors la tasse est à table, il faut la boire. Les dés pipés, l’affaire en poche, le vin tiré, tout se dit. Le départ consommé du technicien français jette un gros pavé dans la mare presque agitée du football malien à l’orée du renouvellement du bureau fédéral mais surtout de deux matches importants de Coupe du monde à Bamako.
Le technicien a avancé une ribambelle de raisons pour expliquer son départ : le challenge qu’offre le club congolais, le futur très proche assez prometteur en tension sur les deux fronts politique (élection présidentielle en juillet) et footballistique (élection du bureau fédéral en juillet ou en décembre selon la position du bureau sortant ou du collectif du 11 juillet). Mais il y a bien un détail qui est passé entre les lignes des interviews et commentaires sur le départ de Partice Carteron. C’est bien le match aller contre le Rwanda en éliminatoires du Mondial Brésil 2014. Le Français a visiblement pris de sérieux coups à Kigali, des couleuvres à avaler sur le plan organisationnel qui ont sans doute pesé dans sa décision récente de quitter le navire malien. Des joueurs arrivés à compte-goutte, des factures d’hôtel difficilement  payées et souvent avancées par le coach, des séances d’entraînement mal programmées, tout cela ajoutées à d’autres gros impairs notés à la CAN en Afrique du sud. Sur le cas de l’étape rwandaise, on ne regrettera jamais assez l’absence quasi totale de la presse nationale publique et privée, ce qui nous garantit toutes les zones d’ombres qui continueront à entourer les  difficultés vécues par l’EN et son encadrement même si le résultat  sportif a été positif (victoire 2-1 des Aigles).
Le malaise du coté du Français est évident, ce qui semble avoir précipité son choix. La rupture semble brutale et du coté de la Femafoot, on la juge abusive et le président Cissé entend aller loin pour faire respecter les termes du contrat qui court jusqu’en 2014. Mais ira-t-il loin ? La question a toute sa place quand on sait souvent l’opacité qui entoure les contrats d’entraîneurs avec les Fédérations sous les tropiques. Très souvent, en lieu et place de la Fédération, c’est un homme qui ficelle le contrat et met le reste devant l’évidence. Dans le cas actuel, rien ne dit que les mêmes conditions obscures n’ont pas entouré le contrat de Patrice Carteron si l’on se rappelle toutes les supputations levées lors du limogeage de son prédécesseur Alain Giresse. Les raisons du départ de ce dernier n’ont jusque là convaincu personne dans le milieu sportif. On verra bien la suite juridique à donner à l’affaire Carteron. Dans les jours à venir, on saura si la Fédération malienne de football et le club congolais ont eu une bonne entente  pour gérer à l’amiable la situation. D’autant que si l’on veut bien préserver l’atmosphère sereine aux Aigles en direction de leurs capitaux matches de début juin, il faut plonger la patate chaude de Carteron dans la glace et donner très vite des garanties à son adjoint Amadou Pathé Diallo. La Femafoot a grand intérêt à ne pas prêter le flanc à la fronde du Collectif du 11 juillet qui réclame une élection à la date de fin de mandat le 12 juillet prochain et qui met en avant la carence du président Hammadoun Kolado Cissé et son équipe à gérer le football malien dans un environnement sain et une atmosphère assainie.
Patrice Carteron l’a clairement dit : il a usé de la prudence, de la prévoyance, de la prévenance, de l’anticipation par rapport à des échéances qui ne promettent pas le calme nécessaire pour s’adonner au sport et au football. C’est un peu ce qui manque à notre monde ici. Alors à chacun de savoir bien agir pour l’intérêt de tous.
 O. Diallo

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