Que sont-ils devenus ? Mamadou Diakité dit Doudou : le bourreau des gardiens

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Devinette : quel est le nom du joueur malien qui a remporté quatre coupes du Mali en ayant marqué à toutes les finales entre 1961 et 1972 ? Premier indice : il a joué de 1960 à 1978 au Stade malien de Bamako. Deuxième indice : il est de la cuvée 1965 des Jeux africains de Brazza.  Troisième groupe d’indices : en tant qu’entraîneur, il a réalisé le premier doublé Coupe-Championnat du Mali en 1984 et il a offert au pays sa première coupe sous régionale, le Coupe UFOA en 1992.

La réponse mène infailliblement à Mamadou Diakité dit Doudou, notre héros du jour. Qu’on le qualifie de Gaucher naturel ou de bourreau des gardiens, le natif de Médina Coura a vraiment une histoire et un palmarès que nous nous faisons le devoir de vous raconter.

 

Nous  n’avons pas eu la chance de vivre certains repères de l’histoire du football malien, comme les Jeux africains de Brazza en 1965 et la CAN 1972 à Yaoundé, au Cameroun. Ces deux grands événements ont eu le mérite de faire découvrir des talents comme Salif Keïta dit Domingo, Idrissa Touré dit Nani, Ousmane Traoré dit Ousmanebleni, Bakoroba Touré dit Bako, Cheick Fanta Mady Keïta, Abdoulaye Diawara dit “Blocus”, Karounga Kéïta dit Kéké et autres.  Et c’est à juste titre que nous sommes allés à la rencontre d’un des acteurs des 1ers Jeux africains de Brazza, Mamadou Diakité dit Doudou, ancien joueur du Stade malien de Bamako et de l’équipe nationale.

Mamadou Diakité dit Doudou : le bourreau des gardiens
ATT saluant Doudou Diakité lors d’un tournoi international à Bamako en 2010

L’homme aux 3 P !

Cinquante-deux (52) ans après cette compétition, l’élimination du Mali par corner reste gravée comme l’un des plus mauvais souvenirs dans le cœur de notre héros. Sa carrière est intimement liée aux trois P : premier détenteur de la première coupe du Mali en 1961, premier entraîneur à avoir réalisé le premier doublé au Mali en 1984, premier entraineur à remporter une coupe sous régionale en 1992 (Ufoa) pour le Mali.

… avec l’épouse du président Moussa Traoré lors de la finale de la coupe du Mali en 1970

Nous n’avons connu Doudou  qu’au milieu des années 1980, plus précisément en 1984, quand il entraînait le Stade malien de Bamako, avec la génération forgée par feu Mamadou Keïta dit Capi. A l’époque évoluant dans les catégories de jeunes du Stade, nous étions impressionnés par la qualité de ses frappes qu’il armait pour tester la forme des portiers Modibo Diakité dit Modibo Dialani, Modibo Doumbia dit Modibo 10, Bakary Traoré dit Yachine. Mais, notre entraîneur, Lamine Traoré dit Jules, nous a enseignés l’histoire de Doudou. Il le décrit comme un  gaucher naturel, doté d’une rapidité d’exécution et d’une force de pénétration, qui en ont longtemps fait la terreur des défenses adverses dans son club et en équipe nationale du Mali. De nature joviale, il jouissait surtout d’une force de frappe qui faisait de lui le bourreau des gardiens de buts.

Pourtant, trois décennies après, nous nous rendons compte que notre coach Jules n’a pas fait des éloges de complaisance. En jetant un regard sur les différents albums photos de Doudou, on se rend compte que l’homme avait de la valeur dans sa jeunesse.

Aujourd’hui âgé de 78 ans, Doudou maintient sa santé, ce qui  explique sa forme. Trois fois par semaine, il trottine et termine sur un vélo installé sur sa terrasse. Et c’est à Medina Coura que le pied gauche magique du Stade malien et de l’équipe nationale  nous a reçus. Après les salutations d’usage et les présentations, nous avons eu l’impression d’avoir en face un Amadou Hampâthé Bah ou Seydou Badian Kouyaté. Parce que Doudou est une bibliothèque, qui se rappelle même des petits détails de sa jeunesse dans le quartier populaire de Médina Coura. C’est un monument du football malien que nous avons découvert.

Cependant, au-delà de l’enthousiasme qui a régné durant les 48 heures que nous avons passées avec lui dans le cadre de la rubrique “Que sont-ils devenus ?”, nous avons fait un constat : Doudou est amer, exacerbé, offusqué par l’indifférence des autorités du pays vis-à-vis des générations des Jeux africains de Brazza 1965 et de la CAN de Yaoundé 1972. Selon lui, l’Etat pouvait au moins accorder une pension aux rescapés de ces deux compétitions  qui ont donné une certaine renommée au Mali. Des pays comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire et la Guinée Conakry l’ont fait pour leurs anciennes gloires.

Autre chose qui atteint Doudou dans son orgueil, c’est le recrutement des entraîneurs étrangers. Le vieux Doudou est formel : “Ceux-ci viennent en Afrique pour se faire de l’argent”. Alors, pourquoi ne pas faire confiance aux Maliens qui sont sortis des mêmes écoles que ces entraîneurs expatriés ? S’interroge notre héros.  La preuve est là que Doudou suit de très près le football malien malgré son âge. Il est d’ailleurs l’un des rares anciens joueurs à fréquenter encore les stades lors des matches du championnat national et ceux des équipes nationales.

Dix-huit ans, un seul club

Son amour pour la discipline date de sa tendre enfance dans son quartier natal, où il évoluait à l’Espérance de Médina Coura dont la fusion avec la Jeanne d’Arc de Bamako donnera naissance au Stade malien de Bamako. Depuis, il n’aura connu que ce seul club où il a joué de 1960 à 1978 comme intérieur gauche. Ses qualités de joueur très technique ne pouvaient laisser aucun entraineur indifférent et sa sélection à l’équipe nationale était fort justifiée.

La campagne des premiers Jeux africains de Brazza  reste l’un de ses  grands souvenirs. A l’époque, sa complicité avec Abdoulaye Diawara dit “Blocus“, Idrissa Nani Touré, Karounga Kéïta, Salif Kéïta, donnait l’envie de l’esprit du groupe. Autrement dit, ils étaient tellement liés qu’on avait de la peine à croire qu’ils n’évoluaient pas dans un même club, nous révèle Doudou. Comme dit plus haut, cette campagne constitue un tournant dans la vie de l’ancien international. Selon lui, l’équipe nationale du Mali méritait mieux. Ce qui l’a choqué davantage,c’est la coloration politique donnée à l’événement. Sinon, nos aînés que nous avons approchés nous enseignent   que la formidable équipe malienne de l’époque  ne devait pas lamentablement échouer en finale face au pays organisateur qui s’est imposé à la faveur du nombre de corners. Avec cette équipe nationale, Doudou éprouva encore la fierté de compter parmi les meilleurs du continent. Blocus qui jouait à la pointe profitait pleinement des débordements à gauche de Doudou et de Nani à droite.

Avec son club, le Stade malien de Bamako, il a remporté quatre coupes du Mali, qui portent toutes sa touche, pour avoir marqué à tous les coups.

Nous étions en 1961 quand les Blancs remportaient la première coupe du Mali. Doudou a marqué le but victorieux de son équipe à l’issue de la deuxième édition.

Deux ans plus tard, en 1963, sous son impulsion, les Blancs de Bamako  dynamitent  l’Avenir de Ségou par le score de  6 buts à 3, avec un doublé de Doudou.

Ensuite, c’est encore l’unique but de Doudou Diakité qui a permis au Stade malien de Bamako de remporter la coupe du Mali de 1970 face à la Kayesienne.

Enfin, en 1972, le Stade remportait sa 4ème coupe du Mali face à l’Avenir de Ségou, battu 5-1, avec deux réalisations de Doudou Diakité.

Doudou Diakité a définitivement quitté  l’équipe nationale en 1972, et six ans plus tard, il prend aussi sa retraite avec le Stade malien de Bamako. Mais cela n’était que partie remise. Contrairement à beaucoup d’anciens joueurs des différents clubs du pays, Doudou n’a jamais voulu quitter la famille blanche. Il y resta pour apporter sa contribution en tant qu’entraineur, directeur technique de son équipe de cœur.  Pour ces nouvelles fonctions, il s’est formé en Allemagne.

Un entraîneur bien affirmé

Titulaire d’un diplôme de 3ème degré d’entraîneur obtenu en 1968, à l’Ecole supérieure de la culture physique et des sports, en Allemagne (DHFK), Mamadou Diakité peut aujourd’hui se flatter d’avoir eu une carrière d’entraîneur bien réussie. Il prend part en effet aux plus riches palmarès des hommes ayant choisi d’évoluer dans ce métier dans notre pays.  A cela s’ajoutent de  nombreux stages dont celui d’entraîneur de football de la GTZ (RFA) organisé à Bamako, un stage d’entraîneur de football de haut niveau de la Grande Bretagne en République du Mali et un stage de recyclage de haut niveau de la méthode allemande avec l’instructeur Bernard Streun en 1991.

L’homme était suffisamment outillé pour accumuler des résultats flatteurs. Au nombre de ceux-ci, on peut compter aussi 5 titres de champion et 5 coupes du Mali, acquis avec le Stade malien de Bamako et aussi la montée du Club olympique de Bamako (COB) à la première division au cours de la saison 1999-2000.

Avec l’équipe nationale, son palmarès s’est enrichi de la qualification de l’équipe nationale junior à la phase finale du championnat du monde de cette catégorie qui s’est déroulée en Arabie Saoudite, en 1989.

Comme anecdote, le vieux Doudou parle de cette première finale de la coupe du Mali en 1961, où un marabout avait dit aux Djolibistes que la clef de leur victoire résidait dans un seul fait. C’est-à-dire apporter au bord du fleuve de l’ancien pont (Babili ponni) un silure qui devrait descendre dans l’eau sans assistance. Mais, le contraire conduirait à une défaite. Une fois au bord du fleuve, le poisson a  tourné dos, et malgré les injonctions des supporters qui l’ont trainé dans cette aventure, le silure n’a pas obtempéré. La suite est connue : le Stade s’est imposé après deux éditions (1-1 puis 2-1).

Cependant deux faits l’ont marqué et constituent ses mauvais souvenirs. En 1971, lors des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des clubs champions, le commissaire du match qui a opposé l’Asec d’Abidjan au Stade malien de Bamako lui a promis de signaler au haut niveau que son but qui avait été refusé était bien valable. Face à cette injustice de l’arbitre deux options s’offraient : soit le Stade se qualifie ou le match sera rejoué. Mais le Stade sera éliminé.

Quelques années plus tard, notre compatriote Karim Dembélé lui présente le même commissaire de match. Doudou lui rappelle sa promesse. Et le Congolais de dire que les Stadistes n’ont pas donné de dessous de table. Au moins, ce jour, il a su la vérité, et fait comprendre à son entourage que le secrétaire général de la Fédération malienne de football, à l’époque Cheick Kouyaté, avait été accusé à tort d’avoir vendu le match du Stade malien de Bamako.

Autre comportement qu’il regrette, et  qui continue de lui faire mal, c’est le silence des dirigeants maliens face à la sanction infligée au Nigéria, pour falsification  des âges. Ce qui  aurait dû permettre au Mali de bénéficier d’un titre mérité de champion d’Afrique. Mais le regret de notre homme s’explique surtout par le fait que les responsables fédéraux à l’époque n’ont jamais réclamé leurs droits. “Avec la sanction du Nigeria, c’est à nous que devait revenir le trophée de champion d’Afrique. Je regrette amèrement que nos dirigeants à l’époque n’aient jamais réclamé ce titre “, conclut Doudou.

O. Roger Sissoko

 

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3 COMMENTAIRES

  1. Notre rédacteur a omis d’ajouter que pour vivre dignement Mamadou Diakité dit Doudou exerçait le métier de mécanographique à son domicile à Médina coura.
    Avec le numérique et l’informatique, les machines de la génération de notre Doudou ne sont utilisées qu’au niveau des centres d’état civil d’où problème de marché. Depuis 2008, Doudou prend son plein repos. Merci à lui pour les loyaux services rendus à la République.
    La République se doit de décorer l’homme s’il ne l’a pas été.

    VIVE LA RÉPUBLIQUE

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