Le football malien est pris en otage, avec la ligue de football de Bamako qui vit depuis quatre mois une crise aux conséquences incalculables si elle n’est pas aplanie. Sont aux prises, le président élu Boubacar Monzon Traoré et une dissidence conduite par son challenger Sékou Diogo Kéita dit Sékouba, le frère aîné de l’international Seydoublen Kéïta.
Depuis son assemblée générale élective du 24 juillet 2011, la ligue de Bamako connaît une grave crise interne qui prend des allures d’un bicéphalisme. D’un côté, il y a le camp victorieux conduit par Boubacar Monzon Traoré, candidat élu, et de l’autre, les contestataires regroupés autour du candidat, Sékou Diogo Kéita dit Sékouba. Ceux-ci ne reconnaissent pas les résultats de l’élection et ont saisi la commission recours et qualifications de la fédération malienne de football.
Celle-ci, faut t-il le rappeler, a décidé d’invalider l’élection du 24 juillet. Dès lors le blocage s’est installé, parce que le président de la fédération malienne de football n’a pas publié les décisions, pour des raisons connues.
Les enquêtes que nous avons menées sur cette crise nous conduisent à déduire malheureusement que l’impasse s’est installée pour la durée. Les deux camps ont posé chacun des conditions et apparemment personne n’est prêt à faire des concessions.
La commission de médiation mise en place et composée de Habib Sissoko, président du Comité national olympique et sportif du Mali, Ousmane Diarra, ancien président de la fédération et Mady Boubou Kamissoko, premier vice président dela Femafootn’a pas réussi pour le moment à accorder les violons. La raison est toute simple : les protagonistes sont intransigeants sur leurs conditions.
Dialogue de sourds
Nous avons approché les deux camps pour avoir leurs versions des faits, et situer le niveau du blocage.
Boubacar Monzon Traoré, le président élu, se dit disposé à rencontrer tout journaliste, mais pas pour s’expliquer sur cette affaire de la ligue. Néanmoins, il nous dit être ouvert à toute négociation, avec comme préalable sa reconnaissance en tant que président élu de la ligue de Bamako. Pour lui, les textes sont clairs par rapport aux statuts et règlements généraux de la Femafoot, aux compétences de la commission Recours et qualifications, et également par rapport aux attributions et aux relations de la ligue avec la fédération. Bref il n’a aucun souci sur la légitimité et l’avenir du bureau qu’il dirige.
Le camp de Sékouba Kéïta aussi a ses arguments juridiques. Selon son porte parole, Seydina Oumar Sow, il reste aligner derrière la légalité. Mais au delà de sa conviction des règles juridiques, Seydina Oumar Sow est disposé pour le dialogue, pour l’intérêt du football malien. C’est à dire renoncer à la présidence, mais à condition que celle-ci ne soit pas non plus attribuée à Boubacar Monzon Traoré.
La commission de médiation après avoir rencontré individuellement les protagonistes, a gagné le pari de les regrouper autour d’une même table de négociation avec à la clef la proposition d’un bureau consensuel dans lequel 18 postes reviendront au camp Boubacar Monzon, et 6 à celui de Sékouba. Une seconde rencontre devrait concrétiser cette proposition, malheureusement Boubacar Monzon ne s’est pas présenté, à en croire Seydina Oumar Sow.
Devant cette situation le camp Sékouba en a profité pour faire une contre proposition : la présidence à un novice, deux vices présidents des deux côtés, le poste de secrétaire général au camp Boubacar Monzon, dix postes pour les équipes de première division, six postes pour les Districts, un pour le corps arbitral, un pour les journalistes sportifs et enfin un poste pour le monde du football. Pour le moment, le camp Sékouba n’a pas de réaction par rapport à ses propositions. Mais à l’issue d’une réunion tenue le mardi il a décidé de passer à la vitesse supérieure en saisissant la FIFAafin qu’elle résolve une fois pour toute cette affaire.
Les conséquences de la crise
Les conséquences de cette crise se font ressentir à bien de niveaux. La ligue de Bamako qui trouve à travers les compétitions de début de saison le meilleur moyen de préparer ses équipes pour le championnat national, est moins sereine et ses coupes de début de saison sont boycottées par la moitié des équipes bamakoises alignées en ligue 1 Orange. Celles-ci, en l’occurrence le Stade malien, Onze Créateurs, l’ASB, l’AS Police et la Jeanne d’Arc qui affirment ne pas reconnaître la ligue se retrouvent dans un tournoi dit de la Solidarité. Alors que les compétitions phares de la ligue de Bamako qui se jouaient en éliminatoires directes, avec un engouement certain, se déroulent maintenant sous la formule de championnat.
En ce début de saison, on a l’impression de faire avec deux ligues, tout au moins dans la pratique, et contrairement à la réglementation. Sans que ni la ligue de Bamako elle-même ou la fédération malienne de football ne gère la situation. Du coup, les supporters se trouvent divisés, entrain de suivre les compétitions ou de la « ligue 1 » s’agissant de la ligue légitime de Bamako ou les compétitions de la « ligue 2 » faisant allusion au mouvement des opposants.
L’un et l’autre camp savent qu’en début de saison, les oppositions Djoliba-Stade sont sources de grande inspiration pour les deux grosses pointures de la capitale, et suscitent la grande mobilisation des supporters de la capitale. Cette année, et tant que la situation persiste, Blancs et Rouges ne s’affronteront pas directement dans une compétition organisée par la ligue de Bamako. Les deux équipes qui représenteront le Mali en ligue des champions devront chercher des matches de préparation de qualité pour mieux préparer le début de la saison. Sur ce plan, le Djoliba AC paraît avoir à s’opposer à des équipes de meilleures qualité en l’occurrence le COB, l’AS Réal tous engagées en coupe CAF, le CSK et l’ASKO deux équipes qui ont fait forte impression en championnat national l’année dernière. Alors que le Stade malien à l’occasion de croiser des équipes qui ont pour la plupart tutoyé le bas de tableau du championnat national.
Et au regard de la situation aux conséquences qui peuvent s’amplifier, le monde du football national est interpellé, et obligé de jouer à l’apaisement pour l’intérêt de tous et de chacun.
Selon des informations largement relayées dans la presse nationale, c’est l’assemblée générale extraordinaire de la fédération malienne des 11 et 12 novembre prochains qui tranchera cette question relative à la ligue de Bamako et d’autres concernant l’affaire de l’élection de la ligue de Kayes, l’affaire opposant l’AS Nianan de Koulikoro à l’ASOM pour le compte de la poule A de la montée en ligue 1.
O. Roger Sissoko