La sélection nationale a livré son meilleur match contre les Panthères et séduit plus d’un par la qualité de son football et son organisation sur le terrain.
La nuit a été très courte, dimanche dans la capitale gabonaise. Presque toute la ville s’est endormie avant 21h sauf bien sûr les supporters pris dans les embouteillages entre le stade de l’Amitié et le centre-ville. Samedi, soit 24h avant le match, les populations avaient passé toute la nuit à chanter les louanges des Panthères que tout le monde voyait déjà en demi-finale. Dans les bars restaurants de Libreville, dans les rues ou encore dans les taxis, les supporters ne parlaient que de la sélection nationale et personne n’envisageait une quelconque déconvenue des Panthères contre les Aigles. Dimanche dans la matinée, toute la capitale gabonaise était parée aux couleurs nationales, les drapeaux flottaient partout et les T-shirt, casquettes, foulards, bracelets des Panthères se vendaient comme de petits pains. Les autorités sportives gabonaises ne sont pas demeurées en reste. Elles ont payé 25.000 billets pour les offrir aux supporters et distribué plusieurs milliers de T-shirts des Panthères aux inconditionnels. Dès lors, on comprend l’immense déception qui s’est abattue sur le stade de l’Amitié de Libreville et sur la capitale gabonaise, dimanche lorsque Seydou Keïta a brisé le rêve des Panthères en expédiant au fond des filets le dernier tir au but des Aigles, synonyme de qualification pour le Mali. Il était alors 19h 45 au Gabon : les supporters qui avaient passé 120 minutes à donner de la voix aux locaux et à huer le sélectionneur national, Alain Giresse à chaque fois que le technicien apparaissait sur l’écran géant du stade, quittèrent les gradins dans un silence de mort. Pendant ce temps, c’était la fête dans le camp malien et pour la forte colonie malienne du Gabon. Les joueurs chantèrent et dansèrent sur la pelouse pendant près d’une demi-heure sous les sons des trompettes, tambours et sifflets des supporters.
D’ordinaire timide, le capitaine Cédric Kanté lui-même a esquissé des pas de danse torse nu, tandis que Cheick Tidiane Diabaté était drapé dans un grand boubou sur lequel on pouvait lire en gros caractères « Mali ». Les joueurs ont laissé éclater leur joie comme des petits enfants et certains comme Samba Diakité avaient visiblement du mal à croire à ce qui venait d’arriver. Il faut dire que les Aigles avaient de bonnes raisons d’être fiers de cette qualification pour le dernier carré de la CAN. Non seulement l’équipe a réalisé un grand match, mais elle a surtout montré ce qui fait la force des grandes équipes, à savoir du caractère. Car disons-le sans ambages, rien n’a été facile dans ce choc avec le Gabon. Il y a eu d’abord cet arbitrage très contestable de l’Algérien Djameil Haimoudi, le comportement du public qui a hué la sélection nationale pendant 120 minutes et ensuite ce but malheureux inscrit par Eric Mouloungui, suite à un coup franc sévère sifflé par le référé central algérien. Sans compter cette position de hors-jeu flagrant de Daniel Cousin non signalé par le premier juge de ligne Achik Redouane qui aurait pu coûter un but aux Aigles (34è min). Bref, tous les ingrédients étaient réunis pour saper le moral des Aigles et il fallait être très fort mentalement pour tenir le coup. Fort heureusement, le capitaine Cédric Kanté et ses coéquipiers avaient tout prévu. A aucun moment, ils n’ont laissé entrevoir un quelconque signe de découragement encore moins de fléchissement. Pendant 120 minutes, ils se sont battus sur tous les ballons, à l’image de l’arrière latéral Adama Tamboura admirable de combativité. C’est d’ailleurs sur l’une des innombrables percées du défenseur international ponctuées d’un centre qu’interviendra le but malien. “Ce n’était pas facile mais nous avons atteint les demi-finales. On n’a pas joué comme Barcelone ou le Brésil, mais nous avons fait avec nos moyens”, dira en conférence Seydoublen Keïta. Que dire aussi du coaching gagnant du sélectionneur national, Alain Giresse ?
Avant le match, le technicien français avait dit qu’il connaît bien les Panthères et qu’il a déjà une petite idée de la stratégie à mettre en œuvre pour contrer son adversaire. Effectivement, comme il l’avait annoncé, l’ancien international français a fait beaucoup de retouches pour ces retrouvailles avec la sélection gabonaise. Alain Giresse a ainsi modifié son dispositif tactique en optant pour un 4-5-1 avec Seydou Keïta dans le rôle de meneur. Le joueur du Barça était épaulé par deux demi-bloqueurs, Samba Diakité et Samba Sow, tandis que Abdou Traoré et Bakaye Traoré jouaient le rôle de soutien à Modibo Maïga intronisé à la pointe. La stratégie d’Alain Giresse était simple : bloquer les couloirs adverses et empêcher les deux fers de lance des Panthères, Eric Mouloungui et Clément Madinda d’approvisionner Daniel Cousin et Pierre E. Aubameyang. Le dispositif tactique de Giresse a bien fonctionné, même si Eric Mouloungui est parvenu à marquer et que Daniel Cousin et Pierre E. Aubameyang ont trouvé chacun le poteau de Soumaïla Diakité. Aussi, le sélectionneur national a eu le flair d’attendre le dernier quart d’heure pour intégrer Cheick Tidiane Diabaté dont on sait que le timing pose d’énormes problèmes aux défenses adverses. L’attaquant de Bordeaux a remplacé un milieu de terrain, Samba Sow. Quelques minutes auparavant, Giresse avait lancé dans le bain son premier jocker Moustaph Yattabaré, accentuant la pression sur l’arrière-garde des Panthères qui avait commencé à laisser entrevoir des signes de fatigue (66è min). Ces deux changements ont permis aux Aigles de prendre l’ascendance sur leurs adversaires et plus les minutes passaient, plus la pression devenait forte sur l’arrière-garde de la sélection gabonaise. Le gardien Didier Ovono retardera l’échéance en gagnant deux face à face avec Modibo Maïga (57è et 70è min). Mais à six minutes de la fin, il ne pourra rien sur cette frappe en pivot de Cheick Tidiane Diabaté à la réception d’une remise de la tête du même Modibo Maïga (84è min). Le Mali aurait même pu s’imposer dans les prolongations si Seydou Keïta n’avait pas raté le cadre sur une nouvelle remise de la tête signée cette fois Cheick Tidiane Diabaté (119è min). Alain Giresse a donc gagné sa bataille tactique avec Gernot Rohr. Jusque-là, le technicien français avait donné l’impression de manquer d’audace sur le plan offensif et de ne pas laisser les joueurs s’exprimer comme ils le souhaitent. Giresse est resté fidèle à ses convictions et la suite des événements lui a donné raison.
Envoyés spéciaux
S. B. TOUNKARA
H. KOUYATE
Dimanche 5 février au stade de l’Amitié de Libreville
Gabon-Mali : 1-1 puis 4-5 aux tirs au but.
Buts d’Eric Mouloungui pour le Gabon (55è min) ; Cheick Tidiane Diabaté (84è min) pour le Mali.
Ont réussi leur tir : Bruno Ecuelé Manga, Eric Mouloungui, Zita Mbanangoye, Andre Biyogo Poko pour le Gabon, Cheick Tidiane Diabaté, Moustaph Yattabaré, Cédric Kanté, Bakaye Traoré et Seydou Keïta pour le Mali.
A raté : Pierre-Emerick Aubameyang (Gabon).
Arbitrage de Djameil Haïmoudi (Algérie) assisté d’Achik Redouane (Maroc) et d’Abdelhaq Etchiali (Algérie).
Commissaire : Gnofame Zoumaro (Togo).
Gabon : Didier Ovono, Edmond Mouelé, Bruno Ecuelé, Pierre Emerick Aubameyang, Daniel M. Cousin (cap, Fabrice Do Marcolino), Eric Mouloungui, Clément Madinda (Bruno Zita Mbanangoye), André Biyogo, Moïse Apanga Brou, Cédric Moubamba (Lloyd Palun) et Charly Moussono.
Entraîneur : Gernot Rohr.
Mali : Soumaïla Diakité, Cédric Kanté (cap), Ousmane Berthé, Drissa Diakité, Adama Tamboura, Samba Sow (Cheick Tidiane Diabaté), Samba Diakité, Bakaye Traoré, Abdou Traoré (Moustaph Yattabaré), Seydou Keïta et Modibo Maïga.
Entraîneur : Alain Giresse.