La défaite 2-1 contre la Côte d’Ivoire, samedi 3 février en quarts de finale de la CAN 2023 est difficile à digérer et risque de laisser une plaie profonde. Explication
Le syndrome ivoirien résiste au temps et pour paraphraser l’ancien international anglais, Gary Lineker qui a dit que «le football se joue à 11, et à la fin, c’est l’Allemagne qui gagne», on peut aujourd’hui dire que le ballon est rond pour tout le monde mais entre la Côte d’Ivoire et le Mali, c’est toujours la Côte d’Ivoire qui gagne. Jugez-en plutôt par les chiffres : en 40 confrontations avec les Éléphants de Côte d’Ivoire, les Aigles du Mali ont été battus 26 fois, pour seulement 4 succès et 10 matches nuls.
Autre signe du syndrome ivoirien, la dernière victoire de la sélection nationale contre l’équipe ivoirienne remonte à 1995, soit plus d’un quart de siècle. Si la suprématie du football allemand est aujourd’hui bien lointaine, on ne peut donc en dire autant des confrontations entre le Mali et la Côte d’Ivoire qui tournent toujours et toujours à l’avantage de notre voisin du Sud.
Mais de tous les revers subis par la sélection nationale, de 1962, date de la première explication entre les Aigles et les Éléphants (4-0 à Bamako pour les Ivoiriens), celui du samedi 3 février en quart de finale de la CAN 2023, est sans doute le plus difficile à digérer et qui risque de laisser une plaie profonde. Plus que l’élimination des hommes du sélectionneur Éric Sékou Chelle par l’hôte de la CAN, c’est la manière qui fait mal et qui a profondément touché les supporters. Dans le premier acte (90 minutes réglementaires, ndlr), le Mali a dominé le sujet et contrôlé le jeu, sans être inquiété une seule fois par les Éléphants.
Ensuite, la sélection nationale a obtenu un penalty, dès la 16è minute qui a été raté par Adama Traoré dit Noss avant de se retrouver en supériorité numérique à deux minutes de la mi-temps (expulsion du défenseur ivoirien Kossonou) et d’ouvrir le score à la 71è minute (mais de l’Ivoiro-Malien Nene Dorgelès qui venait de faire son apparition sur la pelouse). Le capitaine Hamari Traoré et ses coéquipiers pourraient-ils espérer le meilleur scénario pour négocier ce choc avec les Éléphants et se qualifier pour les demi-finales de la CAN ? Les dieux du stade de la Paix de Bouaké semblaient avoir abandonné la Côte d’Ivoire et tout plaidait en faveur des Aigles, surtout que les hommes d’Éric Sékou Chelle étaient techniquement supérieurs à leurs adversaires. Bouffés devant, derrière et au milieu de terrain, les Ivoiriens n’avaient que leur orgueil et leur mental pour rester dans le match et continuer d’y croire.
UNE SUCCESSION D’ERREURS- Comme en 2019 en Égypte où les Aigles avaient dominé les Éléphants de la tête et des épaules, avant de se faire piéger sur la seule véritable occasion de leurs adversaires (mais de Gervinho), ce quart de finale entre les deux sélections s’est également jouée au mental. Certes, la Côte d’Ivoire a fait montre de réalisme devant les buts, en marquant sur ce qu’on peut appeler des demi-occasions, mais avant même l’égalisation de Simon Adingra (90è minute), sur a vu les joueurs ivoiriens demander à leurs partisans de se réveiller et de donner de la voix à l’équipe. C’est dire que malgré le retard au tableau d’affichage et la mainmise de la sélection malienne sur la partie, les hommes d’Emerse Fae n’ont jamais baissé les bras. Ainsi, bien que bouffés devant, derrière et au milieu, les locaux ont continué à jouer avec des certitudes, sans paniquer et surtout sans se soucier du jeu des Aigles.
À l’image de ses joueurs, Emerse Faé a également fait montre de lucidité, avec des choix forts comme le remplacement de son capitaine et leader du groupe, Serge Aurier qui avait écopé d’un carton jaune. Ce n’est pas tout, l’ancien international ivoirien qui a remplacé au pied levé le Français Jean-Louis Gasset après la déroute face à la Guinée équatoriale (4-0, 3ème journée de la phase de poules), a aussi attendu le bon moment pour lancer dans la bataille ses deux jokers de luxe : Sébastien Haller et Simon Adingra. L’intégration de ces deux joueurs a été le tournant du match pour les locaux puisqu’à aucun moment la défense malienne ne parviendra aux museler. Haller a gagné tous ses duels aériens avec la charnière centrale du Mali, alors que son complice de la ligne d’attaque Adingra s’illustrait par sa vitesse d’exécution et sa percussion. À chaque coup-franc, comme les longs ballons, les deux attaquants des Éléphants semaient la panique dans la défense malienne et le danger de l’égalisation planait dans l’air.
Malheureusement, la réaction du banc malien n’a pas été à la hauteur des attentes. Non seulement Éric Sékou Chelle n’a pu mettre en place une stratégie à même de contenir les deux attaquants des Éléphants, mais le technicien a également commis l’erreur de sortir Kamory Doumbia et Lassine Sinayoko, les deux qui pesaient le plus sur l’ l’arrière-garde adverse et empêchait les premières relances. En outre, les autres changements apportés par l’ancien international (intégration d’Ibrahim Sissoko, Yves Bissouma, Mamadou Fofana, Fousseni Diabaté, Boubacar Traoré et Nene Dorgeles) n’ont pas produit l’effet escompté.
Certes, Nene Dorgeles a eu le mérite de délivrer l’équipe peu avant l’entame du dernier quart d’heure (71è min), mais au fil des minutes, le jeune joueur s’est éteint et n’a pas eu une grande influence sur le jeu de l’équipe. La prestation d’ensemble des éléments intégrés montre à la fois les limites de la profondeur du banc d’Éric Sékou Chelle et le décalage physique entre les joueurs qui composent aujourd’hui l’ossature des Aigles. Si l’on ajoute à tout cela le sempiternel problème de l’équipe à marquer des buts, on se rend à l’évidence qu’il manque encore beaucoup de choses à nos Aigles pour pouvoir performer sur la durée. Aujourd’hui, il est clair que sur un match, le Mali peut tenir la dragée haute à n’importe quel pays africain, mais la question n’est pas là. Ce que l’on attend des Aigles, ce sont des trophées, un point, c’est tout.
Soulemane Bobo Tounkara
Sékou doit rester à son poste d’entraineur.
Must.