La CAN a véritablement débuté mardi au Mali. De manière fort agréable mais dans un style inattendu.
En effet, jamais à notre connaissance, les Aigles n’avaient évolué ainsi. On sait l’équipe nationale familière de flamboyances autant que de coupables relâchements. On l’a connue alternant plus qu’à son tour, belles inspirations et fébrilité brouillonne comme à son entrée dans la CAN 2010 lorsqu’elle se paya le luxe de toucher le fond de l’abîme avant de remonter spectaculairement un handicap de 4 buts face au pays hôte. Les Aigles nous ont donc habitués à d’imprévisibles montagnes russes mais jamais à la manière égale, posée, organisée, et même flegmatique par moments, appliquée méthodiquement face à une Guinée qui ne manquait pourtant pas de tranchant. Le Onze national est resté bien en place, maintenant son bloc sans se désunir même sur la fin de partie, au plus fort de la poussée adverse.
Que s’est-il passé qui explique cette évolution ? Certainement un plan de bataille bien intégré par tous les joueurs dont la réussite passait largement par une concentration de tous les instants, un regroupement et une animation défensive rigoureuse. Mêmes si les Guinéens ont réussi plusieurs fois à passer par les ailes, leurs tentatives se sont ensuite heurtées au regroupement axial intelligemment dirigé par Cédric Kanté ou ont été annihilées par un impeccable Soumbeyla Diakité dans les buts. Tout le milieu de terrain s’est dévoué à ce quadrillage incessant, marqué par l’abattage de Samba Diakité et de Bakaye Traoré. Si tous ont activement participé au dispositif, deux « anciens » se sont révélés essentiels à la manœuvre : Cédric Kanté mentionné plus haut et Seydou Kéïta. Le « Barcelonais » s’est révélé précieux non par des ouvertures « lumineuses » mais par d’incessantes consignes de replacement et une grande disponibilité dans la conservation du ballon. Son métier et autorité ont incontestablement soudé le milieu de terrain dans ses tâches de récupération et lui ont insufflé le sang-froid manœuvrier qui a tant étonné les familiers de l’EN.
Souligner ces mérites inédits des Aigles, c’est en même temps mettre le doigt sur la principale lacune qui a sauté à l’œil, surtout en seconde mi-temps : la minceur des options offensives. Celles-ci ont reposé sur un Cheick Tidiane Diabaté qui, pour conserver la balle, s’est usé dans le combat de tranchées imposé par de hargneux gardes du corps et un Modibo Maïga inspiré que l’absence de compétition a malheureusement éteint en seconde mi-temps. L’entrée d’un Garra Dembélé transparent à la place de Diabaté, a effacé toute possibilité de porter le ballon en attaque et facilité la totale domination guinéenne en fin de partie. Heureusement alors que les reflexes de Soumbeyla ont permis de préserver un but acquis une heure plus tôt. L’essentiel était sauf mais la leçon vaut d’être tirée : la maîtrise du ballon ne peut s’avérer une fin mais un moyen de l’emporter, donc de marquer plus de buts que l’adversaire. Une bonne conservation sert évidemment à priver l’adversaire de ballon mais surtout à préparer l’équipe à se projeter vers le but adverse. Que les Aigles réussissent cela contre le Ghana, samedi, et ils auront réussi non pas seulement à nous étonner, mais à nous bluffer et, surtout, à nous combler.
Souleymane Drabo