Non, le Real Madrid ne va pas parfaitement bien, loin s’en faut. Si l’on a du mal à mettre le doigt exactement là où ça fait mal et à localiser la sources des maux madrilènes, les symptômes ne trompent pas sur l’existence d’une certaine indisposition. Des symptômes nombreux, notamment matéralisés par une défaite contre le Betis Séville, à domicile qui plus est, et des nuls face à des érythèmes de ventre mou pour des performances qui auraient été inconcevables la saison dernière dans leur contenant comme dans leur contenu.
Cette équipe, qui dispose de quelques-un des éléments les plus précis de la planète et qui possède en ses rangs de très bons joueurs de tête (Ramos, Ronaldo), n’a toujours pas célébré de coup de casque victorieux cette saison. Pas de buts de la tête donc, et très peu de buts en tout.
On blâme Karim Benzema pour ses ratés, partie visible de l’iceberg couleur meringue aux ambitions toujours titanesques. Mais c’est le Real en tant qu’équipe qui est déficient. Comme dans un épisode de Dr. House, le tableau de diagnostique s’étoffe, la table de dissection des matches livre moult enseignements, mais le remède se fera attendre jusqu’au générique de fin.
En attendant de trouver l’origine du mal, on traite les symptômes. Un par un. En commençant par le fiévreux front offensif. 1 but en 5 matches de Liga, c’est peu. Surtout quand on s’appelle Ronaldo. A fortiori quand on se prénomme Cristiano. Si l’on admet volontiers que Ronaldo s’est souvent illustré par de jolis ratés, on ne peut pas nier que le Real ne se procure plus autant d’occasions que la saison dernière. Quand les occasions sont rares, les ratés se voient plus. De fait, l’innocuité du Portugais devant les buts adverses est encore plus prégnante. Lors de ses 16 premiers matches officiels cette saison, le Real n’a jamais pu marquer plus de 3 buts. De ce point de vue, c’est le pire début de saison d’une équipe du Real depuis 45 ans.
Zidane et le fantasme de la fluidité
Mais à quoi est due cette soudaine baisse de productivité ? Dans le jeu, force est d’admettre que le système en diamant a de plus en plus de mal à dominer les équipes adverses. Un système qui n’a désormais plus de diamant que le nom vu leu peu de rigidité qui le caractérise cette saison.
Lors de la campagne précédente, le positionnement rigide de tous les membres du diamant permettait un pressing et un contre-pressing très efficace. Seul Isco échappait à la rigueur du placement. En tant que pointe du diamant, il avait plus de latitude, ce qui cadrait avec sa créativité Imprévisible. Inspiré, il était un danger constant pour les équipes adverses de par sa nature d’électron libre.
Cette saison, Zidane rêvait d’un système encore plus fluide, étendant cette liberté relative à plus de joueurs du milieu. Une sorte de Total Football tous azimuts. Un football total qui, lorsqu’il rime trop avec liberté totale, ne peut qu’être contre-productif.
Et on a pu le constater. Le trio tant vanté du milieu Casemiro-Kroos-Modric n’est plus aussi influent et Madrid ne génère plus la même sérénité qui était sienne il y a encore quelques mois. La raison ? La géométrie. Quand les milieux sont plus libres et se découvrent des vocations d’aller vers l’avant, la distance entre les joueurs fluctue, un Casemiro jaillissant dans la surface adverse apporte certes le surnombre et et peut changer le destin d’un match avec une grosse frappe, mais si son poste n’est pas couvert par un coéquipier, le schéma tout entier vacille. Et souvent la structure s’écroule.
Madrid, comme toutes les équipes du monde, s’en ressent immédiatement quand l’espace entre ses joueurs n’est plus idoine : cela se voit dans la circulation du ballon en phase offensive et dans le pressing, qui devient lâche et désordonné (et donc inefficace) quand l’équipe n’a plus le ballon.
Back to basics
Illustration parfaite il y a quelques jours, lors du match contre Eibar en Liga. Avec trop de liberté, les joueurs à vocation offensive ont tendance à se marcher dessus en évoluant selon leurs affinités sans le guidage du système. Et deviennent d’un coup plus prévisibles en tant que joueurs qu’ils ne l’auraient été en tant qu’entité.
Ce qui manque, c’est du liant. Un concept beaucoup moins abstrait qu’il n’y paraît. Pour qu’une permutation entre deux membres du trident surprenne l’adversaire, il faut d’abord que le trident soit bien en place. Si Isco et Asensio se bousculent à gauche et que Ceballos et Modric suivent (comme les “heat maps” du Real l’ont souvent démontré cette saison), cela laisse un gros trou au milieu et isole Nacho derrière. L’équipe toute entière devient vulnérable à un long ballon heureux propulsé depuis la défense adverse.
Après l’avoir quelque peu malmené dans cet article, il faut néanmoins donner du crédit à Zinedine Zidane. Le coach tricolore essaie d’innover, loin de se reposer sur ses pourtant confortables et nombreux lauriers. Et si Isco, Ronaldo, Modric, Casemiro et Asensio parviennent à permuter rapidement en coulissant sans compromettre pour autant la structure globale, il s’agira indéniablement d’une nouvelle victoire pour Zidane. Une de plus et pas des moindres.
Par Goal.com • 29 oct. 2017 à 07:16