Dominateur dans les compétitions zonales et sous-régionales comme le «Tournoi de la solidarité», l’athlétisme malien a du mal à se faire une place respectable dans les compétitions africaines. La longue quête de performances n’est pas encore sur le point d’aboutir à cause certainement des limites de la politique nationale en œuvre. Il est temps de mener la réflexion pour mieux baliser l’indispensable changement de cap pour rêver d’une médaille d’or africaine voire mondiale dans les meilleurs délais.
Une fois de plus, le Mali est rentré bredouille des 19e Championnats d’Afrique d’athlétisme seniors qui se sont déroulés à Marrakech (Maroc), du 10 au 14 août 2014. Numériquement, le Mali était bien représenté par 12 athlètes (7 hommes et 5 dames) qui auraient tous réalisé le minima. Une performance à saluer par rapport aux précédents championnats.
Et cerise sur le gâteau, 3 nouveaux records nationaux ont été établis au Maroc par nos représentants, notamment par la prometteuse sprinteuse Djénébou Danté (400m), Rahamatou Dramé (100m haies) et Oumou Samba Diarra (800m).
En fait, ces trois Amazones (Djénébou Danté, Rahamatou Dramé et Oumou Samba Diarra) ont juste amélioré leurs performances passées puisqu’elles étaient détentrices des records ainsi battus.
Mais, de là à penser que «la moisson a été fructueuse pour notre pays», c’est franchement tomber dans l’autosatisfaction qui, les managers du sport le savent bien, est le premier handicap à surmonter pour accéder au sommet et s’y maintenir. Si avec trois records nationaux battus aucun des athlètes n’a accédé au podium de son épreuve, il faut alors se poser des questions sur le niveau réel de notre athlétisme.
En fait, la «mère des sports» a beaucoup de chemin à faire pour se hisser au niveau africain voire mondial. Si nous avons bonne mémoire, la dernière meilleure performance d’un athlète malien dans une compétition d’envergure est la médaille d’argent que Kadiatou Camara dit «La» a remportée aux Jeux de la Francophonie à Beyrouth (Liban) en 2009. Quatre ans plus tard, Ramatoulaye Dramé (100m haies) et Mamadou Cherif Dia (saut en longueur) avaient battu des records nationaux à Nice (France) lors des mêmes Jeux de la Francophonie, mais ils étaient très loin du podium. Notre pays a presque disparu des championnats du monde de la discipline.
Le Mali peut-il continuer à se flatter avec la première place du «Tournoi de la Solidarité» et des performances nationales régalées ? Si nous regardons le tableau des médailles de Marrakech, on peut nourrir des regrets et se poser des questions. L’impression est que les autres avancent, et nous, nous stagnons.
Et on a au moins une idée de l’ampleur du défi que la nouvelle présidente de la Fédération malienne d’athlétisme (FMA) doit relever au cours de ce premier mandat. Cela commence par évaluer les politiques mises en œuvre ces dernières années pour tirer les enseignements, surtout les raisons des échecs au haut niveau, pour planifier de nouvelles stratégies.
Il est temps d’évaluer nos potentialités dans les différentes épreuves. Quelles sont les épreuves adaptées à la morphologie de nos athlètes et dans lesquelles le pays a de meilleures chances de médailles sur le court et le moyen termes ? Ensuite, il faudra détecter les meilleurs talents dans ses épreuves en multipliant les meetings et Grands prix dotés de vraies motivations au lieu des maigres enveloppes que nous nous voyons souvent au meeting de San, par exemple.
Le potentiel existe, seulement il est mal exploité pour des raisons diverses, notamment extra-sportives. Djénébou Danté, Rahamatou Dramé, Aminata Diakité, Kadia Dembélé, Bano Traoré… ont juste besoin d’une étincelle pour sortir des sentiers battus de l’athlétisme. Ils ont le talent et la volonté. Il leur manque seulement un meilleur encadrement sur le plan tactique et managérial.
La formation de techniciens de haut niveau armés d’outils performants d’entraînement et d’évaluation physique doit être un axe majeur de la politique nationale de promotion de l’athlétisme, dont doit vite se doter la FMA, à l’image de la Fédération malienne de tennis (FMT), par exemple.
En attendant que tous ces moyens soient réunis au niveau national, il faudra se battre pour offrir plus d’opportunités d’encadrement à nos athlètes au niveau régional et mondial (bourses olympiques aux plus méritants, camps d’entraînement…).
Des opportunités sur lesquelles il ne faut pas cracher si un athlète parvient à l’obtenir par ses propres performances. Comme ce fut récemment le cas de Djénébou Danté qui a séduit le responsable technique d’un centre de la sous-région.
En effet, elle avait été contactée par le responsable du Centre de formation technique basé au Togo, après le meeting du CAA à Bamako et au tournoi Gabriel Tiago de Côte d’Ivoire, qui lui offrait gratuitement trois mois de formation. Elle aurait ainsi pu profiter des nombreuses opportunités, surtout de meilleures conditions d’entraînement offertes aux pensionnaires de ce centre.
Ce qui aurait permis à Danté de mieux préparer le championnat d’Afrique dans les conditions idéales d’entraînement au lieu de se morfondre sur le tartan du stade Modibo Kéita sans aucun repère technique et sans aucune motivation.
Mais elle n’avait pas eu l’aval des responsables de la fédération pour profiter de cette aubaine qui lui aurait permis de mieux se perfectionner en vue des joutes internationales, notamment les championnats d’Afrique de Marrakech.
«Au lieu d’être encouragée par les responsables de la fédération, Djénébou Danté se voit gratuitement combattue et du coup sa belle carrière menacée par la faute d’une méchanceté gratuite de quelques membres de la fédération malienne d’athlétisme. Pourtant elle vient d’obtenir le minima en 400m en classant 2e contre la championne d’Afrique et vient de battre les records du Mali en 100m, 200m et 400m lors du meeting de San», avait pertinemment déploré un confrère de la place.
À notre avis, la fédération ne fait pas assez pour aider cette jeune athlète pétrie de talent et dont les performances ne cessent de séduire les techniciens, comme ceux avec qui nous avons discuté pendant le dernier Meeting Grand Prix CAA de Bamako. Pourquoi est-elle souvent abandonnée à elle-même ? Qui gêne-t-elle réellement ?
Si l’on veut réellement donner une chance à nos jeunes talents de hisser haut les couleurs nationales, nous pensons qu’il faut tourner la page de la méchanceté gratuite, des considérations partisanes et personnelles et promouvoir le mérite, l’excellence !
Moussa BOLLY
Toujours les mêmes héroïnes
Les trois records nationaux battus aux 19e championnats d’Afrique d’athlétisme de Marrakech (Maroc) sont à l’actif de Djénébou Danté, Rahamatou Dramé et Oumou Samba Diarra. Trois héroïnes qui améliorent ainsi leurs précédentes performances sportives.
Désormais, le record du Mali du 400m est de 53’’19 et est détenu par Djénébou Danté qui fait ainsi oublier ses précédentes performances 53’’39. Quant à Rahamatou Dramé, son nouveau record au 100m haies est de 13’’95 (le précédent est de 14’’38), alors que celui du 800m réalisé par Oumou Samba Diarra est de 2’09’’18 contre précédemment 2’09’’36.
Des héroïnes qui méritent aujourd’hui plus d’ouverture sur les pistes africaines et mondiales pour concrétiser leurs rêves de consécrations prestigieuses pour le pays.
M.B