Pour prouver que ses détracteurs l’avaient accusé à tort, Ibrahim Boubacar Kéita a déclaré, lors du sommet de la Francophonie tenu à Dakar au cours du week-end dernier, qu’aucun cas du virus Ebola n’existait plus au Mali. Le président malien venait de contredire ainsi ces nombreuses voix qui s’étaient élevées pour l’accuser de mendier l’argent de la communauté internationale en dramatisant les menaces d’épidémie sur son pays. Mais dans le même temps, le chef de l’Etat a occulté cette autre épidémie face à laquelle le Mali démocratique et probe doit incessamment faire face : ces virus politiques qui se constituent en bandes organisées autour de lui afin de contaminer et d’anémier l’économie nationale et de tuer le pays. La première bande s’était constituée autour de lui bien avant l’élection présidentielle dernière, sûre que le candidat Ibrahim Boubacar Kéita répondait à la demande sociale du moment. Elle s’appelait IBK-Mali 2012 et ne s’est trompée sur son choix car son candidat a été élu avec plus de 77% des voix. Un véritable plébiscite.
L’homme à abattre
Ensuite, cette majorité a été élargie à d’autres formations et associations politiques dans la perspective d’une distribution prometteuse des rôles. A sa tête, bien entendu le parti présidentiel, le RPM, qui n’a jamais obtenu ce qu’il souhaitait, à savoir une main mise totale sur le pays. Sa première déconvenue a été quand le président de la République a choisi un technocrate apolitique comme Premier ministre. La bande organisée autour du président a tant et si bien fait qu’au bout de six mois Oumar Tatam Ly a préféré fuir autant de laideur et d’inélégance. Qu’il démissionne n’a pas suffi, on a dû le couvrir de boue et de fange. Mais à la grande surprise de la bande organisée autour du président, c’est Moussa Mara qui succède à Oumar Tatam Ly. Malgré la déconfiture, les barons du RPM ont dû faire contre mauvaise fortune bon cœur. Le nouveau chef du gouvernement a été couvert de tant d’éloges qu’il s’est cru la réincarnation d’un des 333 saints de Tombouctou. Technocrate et populaire, l’homme est aussi un politique bien connu du RPM qu’il a battu dans une commune du district. Mais il a un point faible car son parti n’est représenté à l’Assemblée nationale que par un seul député. Qu’à cela ne tienne, si le président l’a nommé, il faut faire avec et attendre la faute.
En mai dernier, puisque Ibrahim Boubacar Kéita se sent beaucoup plus à l’aise dans son avion acquis dans des conditions douteuses et qu’il préfère le farniente de l’extérieur aux problèmes de l’intérieur pour lesquels il a été élu, le Premier ministre entame un voyage dans le Mali profond et va à Kidal, une ville qui échappe jusque là à la souveraineté nationale. Il est caillassé, ses administrateurs sont tués et ses militaires mis en déroute. La bande organisée autour du président trouve en cet incident malheureux mais acte de bravoure la faute. Moussa Mara est aussitôt attaqué sur plusieurs fronts, vilipendé dans la presse, incendié dans des tribunes. A l’opposition qui réclame sa démission, il répond en bamanan : nté ta yoro si (je n’irai nulle part). A la mouvance présidentielle qu’il dirige grâce à la signature d’une convention politique, il déclare qu’il n’est pas à cette place par hasard et que c’est au président de la République de décider de la qualité et de la personne de son Premier ministre. Mais Ibrahim Boubacar Kéita reste muet comme une carpe même s’il a de grosses oreilles pour entendre ce que disent les uns et les autres et de gros yeux pour voir ce qui ne lui est pas donné de voir.
Le RPM aux commandes
Moussa Mara reste donc à la primature mais cède son fauteuil convoité de chef de la mouvance présidentielle. Un fauteuil aussitôt occupé par un vieux de la vieille, Boulkassoum Haïdara, par ailleurs président informel et non élu, donc illégal, du RPM. Le nouveau venu tente immédiatement une réorganisation de la majorité. Une nouvelle bande organisée autour du président est née. Son nom : Convention des partis politiques de la mouvance présidentielle (CMP). Ses premiers faits d’arme : des fuites savamment distillées faisant état d’un remaniement ministériel à l’issue duquel le RPM réaliserait son ambition de faire main basse sur le pays. Plus que jamais, Moussa Mara est l’homme à abattre. Mais comme le président du parti Yelema connait également la musique, il ne tardera pas à chanter, dans le même ton et au même rythme. A la fin de ce lamentable bal masqué, voila qu’une autre bande s’organise autour du président et proclame haut et fort sa naissance et son ambition de sauver le fauteuil d’Ibrahim Boubacar Kéita, menacé en si peu de temps par de nombreux scandales financiers et son manque de résultats dans la lutte contre la corruption au Mali et la rébellion dans le nord.
Le déclin du Mali
L’Alliance des forces démocratiques, AFD, (à ne pas confondre avec la généreuse mais calculatrice et intéressée Agence française de développement) est ainsi née parallèlement à la CMP dont tous les membres fondateurs sont également signataires. Elle a à sa tête le ministre Tiéman Hubert Coulibaly, président de l’UDD, un petit parti né après le coup d’Etat de 1991 avec la volonté de restaurer l’ordre ancien, et dont il hérite par filiation.
Après IBK-Mali 2012, le Mali d’abord, la CMP et l’AFD, il faut craindre désormais que les bandes organisées autour du président poussent comme des champignons vénéneux pour faire du seul et unique mandat d’Ibrahim Boubacar Kéita le déclin du Mali.
Cheick TANDINA
Mafia et argent
Que dire des conséquences néfastes, pour le Mali, de cette amitié sincère d’El Hadj IBK avec l’homme d’affaires corses Tomi, le parrain des parrains ? L’avion d’ATT jugé vieillot, par la mafia. Mensonge d’Etat. Le peuple malien trahi. Que dire de ce mépris des Accords de Ouagadougou qui ont permis au Mali de renouer avec la normalité constitutionnelle ? Les accords d’Alger sont un serpent de mer, à ce jour.
Et puis, un magistrat, fonctionnaire de l’Etat malien connu pour les sales besognes, a été recruté pour créer un bureau parallèle du réseau Apem. Il s’appelle Dramane Diarra. Son beau-père en la personne du magistrat Toubaye Koné, Président du tribunal de la commune IV a été mis à contribution pour accélérer la destruction du réseau Apem, à travers trois procédures judiciaires différentes et farfelues.
Qui ne se souvient du tribunal de la Commune IV qui a abrité un jugement extraordinaire, dans l’affaire de Kalabambougou, orchestré par le ministre de la justice, garde des sceaux. Mieux, qui ne se rappelle la grève avortée des deux syndicats de magistrats : Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA), lors de l’arrestation de certains juges par le ministre Bathily.
A l’époque des faits, Toubaye Koné était le président du SYLIMA. Me Bathily s’est appuyé sur lui pour faire avorter la grève contre le Gouvernement ; au détriment de ses collègues juges qui l’ont déposé par la suite de la tête du SYLIMA.
A la suite de Toubaye Koné, il y a aussi le juge Issa Traoré, Président du SAM, qui a été recruté. Il avait aidé Toubaye Koné dans l’échec de la grève des magistrats. Il a été mis à contribution pour envoyer deux juges détruire le réseau Apem. Il s’agit de Ibrahima Berthé, magistrat, et de Cheick Mohamed Chérif Koné, magistrat, avocat général près la Cour suprême.
Voyez-vous, le droit est enterré. On ne se soucie pas de servir. Où est la justice qui doit être dispensée au seul profit des citoyennes et des citoyens du Mali, quand les magistrats eux-mêmes usent de leur pouvoir judiciaire pour opérer des holdup ?
C’est en partie en direction de ce type de magistrats que s’est adressé le nouveau président du SYLIMA Adama Yoro Sidibé, le 9 novembre 2014, dans son Appel des magistrats contre le ministre de la Justice. Là aussi, le président du SAM s’est précipité sur les antennes de la télévision nationale du Mali, pour désavouer le SYLIMA.
L’article 29 du Code de procédure civile dit que si un magistrat ou un auxiliaire de justice est impliqué dans une affaire judiciaire, c’est le 1er président de la Cour d’appel qui doit être saisi pour désigner la juridiction qui va statuer sur la dite affaire. Le juge Toubaye Koné a mis cette disposition légale dans sa poche, quand bien même le bureau de Dramane Diarra est truffé de magistrats et d’un avocat. Le juge Toubaye Koné a estimé que cela ne le concerne pas, parce que bénéficiant de la haute protection du numéro 2 du Gouvernement.
L’autre fonctionnaire du Ministère de l’intérieur et de la sécurité se prénomme Mamadou Touré, un individu qui se fait passer pour Imam lors de certaines cérémonies dans ce département. Un hypocrite ?
Voyez-vous des fonctionnaires de l’Etat malien, passant tous à la caisse de la République à chaque fin du mois, se transforment en animateurs de la société civile, sous l’œil condescendant du Gouvernement.
Le Ministre de la Justice, des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, Me Mohamed Ali Bathily a été informé, le 17 février 2014. Rien. Le premier président de la Cour d’appel, Moussa Sara Diallo, qui a résisté aux assauts de la mafia, a été relevé de ses fonctions. Les autres juges, membres de la mafia, ont eu des promotions. Au lieu de les déshabiller tout simplement, comme cela se fait dans tout Etat de droit digne de ce nom !
Le Premier ministre, chef du gouvernement, Moussa Mara a été, lui aussi, informé le 3 juin 2014. Et puis, rien. Lui, auparavant, si prompt à répondre aux lettres à lui adressées, demeure sourd, aveugle et muet.
Le peuple malien est tout simplement bafoué dans sa dignité. Le temps de dire tout simplement : HASBOUNA LAHHOU WA NI’E-MAL WAKILOU (Allah Est notre Garant et Quel Meilleur Garant !)
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