La conception de l’autorité pose problème pour nombre de responsables et agents subalternes. Celui qui l’incarne est considéré comme le détenteur de la vérité. Aussi, ne demande-t-il généralement pas conseil. Il exige plutôt que ses idées soient reprises par des collaborateurs qui considèrent, parfois, qu’il est de leur devoir de les appliquer à la lettre.
La subordination est considérée comme devant être un renoncement à la personnalité et au doute méthodique. L’esprit critique est à peine toléré et les agents qui en font état sont marginalisés et placés dans des postures où ils se sentent inutiles. Tous ces éléments fondent à penser que le mode de génération de la décision publique n’est pas sécurisé, de par les procédés qu’il emprunte, et constitue, dans le même temps, une source d’affaiblissement de la fonction conseil. D’ailleurs, certains ministres ne consultent guère leurs conseillers techniques sur les questions relevant de leurs attributions. D’autres choisissent ces précieux collaborateurs en dehors des critères de compétence spécifiques au domaine couvert, ce qui ne milite pas en faveur de la performance de l’action publique. Ce qui peut se comprendre.
En effet, rares sont les détenteurs d’autorité qui conçoivent que leur vision puisse être remise en cause par des techniciens, fussent-ils chevronnés. C’est pourquoi, faute d’éclairages avisés, les décisions de certains responsables publics vont parfois à l’encontre des dispositions législatives et réglementaires et contribuent à l’accroissement des charges de l’Etat, une disposition que le législateur réserve pourtant au Législatif.
On peut citer dans ce lot des augmentations de salaire décidées par l’Exécutif ou les créations insuffisamment ou non justifiées de structures. Par ailleurs, la relation Administration – usagers/bénéficiaires, que privilégie aussi la GAR (Gestion Axée sur les Résultats) traduit de manière éloquente les moins-values, en termes de performance, dans les comportements de nombre agents publics. De façon générale, la relation d’autorité, mal digérée, est transférée à l’usager. Celui qui a affaire à l’Administration se retrouve devant un monstre froid, qu’il engraisse et qui reste pourtant indifférent à ses problèmes.
Certains agents publics n’éclairent pas les demandes citoyennes, rudoient les usagers ou retardent les dossiers des contribuables qui constituent, logiquement, leur raison d’être.
PS: Pour précisions, le concept de GAR, inventé par Peter Drucker (1909-2005), un des gourous du management qui l’a utilisé pour la première fois, en 1964, dans son ouvrage « Managing for results », n’a cependant connu une appropriation qu’à partir des années 90, lorsque l’ACDI (Agence canadienne de développement international) en a fait son cheval de bataille dans le cadre d’une importante réforme du Secteur public développée par le gouvernement Canadien. Il a ensuite été repris, en 2005, par la Communauté internationale à l’occasion de la déclaration de Paris qui, en l’érigeant au rang d’impératif intégré par les bailleurs et les pays bénéficiaires, a permis sa large adoption.
Si l’on se réfère à ses différentes acceptions (ACDI, UE, PNUD…), il ressort que la GAR se focalise sur les résultats jugés parlant que les activités, sur les bénéficiaires et les changements qu’ils désirent et, enfin, sur l’amélioration des systèmes de gestion (évaluation et reddition des comptes) et des processus de décision.
Sambou Sissoko