Malgré les progrès enregistrés sur le plan sécuritaire, les Maliens vivent avec la présence insidieuse des violences basées sur le genre (BVG) dans la société. C’est la problématique à laquelle tentent de répondre l’ONG, l’Association pour la promotion des droits et le bien-être de la famille (APSEF) et d’auteurs intervenants dans la région de Kayes.
Selon l’Organisation des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), la violence basée sur le genre est la violation des droits humains la plus répandue mais la moins visible dans le monde. Il comprend les préjudices physiques, sexuels, mentaux ou économiques infligés à une personne en raison de déséquilibres de pouvoir socialement attribués entre les hommes et les femmes. Elle inclut également la menace de violence, de coercition et de privation de liberté, que ce soit en public ou en privé.
L’UNICEF estime que dans toutes les sociétés, les femmes et les filles ont moins de pouvoir que les hommes sur leur corps, sur leurs décisions et sur leurs ressources. Les normes sociales qui tolèrent l’utilisation de la violence par les hommes comme forme de discipline et de contrôle renforcent l’inégalité entre les sexes et perpétuent la violence. Partout dans le monde, les femmes et les filles en particulier les adolescentes sont les plus exposées.
C’est pourquoi se penchant sur les données des enquêtes menées sur les cinq (05) continents, les Nations unies ont lancé en 2018 un vaste programme dénommé Initiative Spotlight destiné à mettre en lumière les problèmes les plus récurrents sur chacun des continents. Il ressort de cette étude que le problème le plus récurrent identifié en Afrique est et demeure les violences basées sur le genre (VBG).
Les VBG prendront de nombreuses formes selon les zones et les cultures ou selon même l’ethnie. Au Mali, il s’agit par exemple des : violences entre partenaires intimes, des violences sexuelles, du mariage d’enfant, des MGF/E, de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, les infanticides des filles et les crimes «d’honneur» sont les plus courants. Les violences entre partenaires intimes se produisent aujourd’hui à des taux stupéfiants dans tous les pays et principalement dans notre pays. Les filles et les femmes peuvent également être victimes de violence sexiste lorsqu’elles sont privées d’alimentation, d’éducation et de soins sanitaires, mais aussi quand elles n’ont pas accès aux ressources et aux opportunités.
Dans cette série d’articles qui sera publiée sur les violences, nous nous pencherons sur les formes les plus pernicieuses mais aussi celles qui se font au vu et au su de tout le monde sans déranger qui que ce soit puisse que commises par tous. Parmi les violences qui seront épinglées dans les colonnes, il y a le mariage des filles de moins de dix-huit (18) ans, la déscolarisation des filles de moins de dix-huit (18) ans au profit du mariage, les pratiques traditionnelles comme le sororat/lévirat, les mutilations génitales féminines mais aussi les maris qui vont à l’exode en abandonnant leurs épouses et leurs enfants pendant de longues années.
L’ampleur des VBG bien que souvent sous-estimée, fait l’objet d’efforts de documentation et d’enquêtes statistiques au niveau national et international pour attirer et certifier et évaluer la dimension du problème. Parmi ces outils, figure l’Enquête nationale démographique et de santé du Mali (EDSM) qui, dans son rapport de 2018, indique par exemple que:
– 14,3 % des adolescentes de 15-19 ans étaient mariées ou en unions avant d’atteindre quinze (15) ans exacts. 36% des filles de 15-19 ans ont commencé leur vie féconde. Les enfants de mères jeunes (moins de 20 ans) courent généralement un risque plus élevé de décéder que ceux issus de mères plus âgées. Concernant les statistiques sur les autres formes de violences basées sur le genre, l’EDSM VI de 2018 indique que: 49% des femmes de 30-39 ans ont subi la violence physique ou sexuelle.
– 44 % des femmes mariées ou en union ont subi des violences physiques, sexuelles ou émotionnelles de la part de leur mari actuel ou le plus récent.
Ces différentes statistiques rendues publiques dans le rapport font froid dans le dos, mais elles sont néanmoins des références et des bases de plaidoyer pour amener les gouvernants et tous citoyens à ne pas rester immobiles. À travers ces statistiques, l’enquête met en lumière la présence insidieuse des Violences basées sur le genre (BVG) dans nos familles nos village et on observe aussi que les femmes et les filles sont les premières concernées par cette question de VBG dans notre milieu, même si quelque part des hommes sont souvent aussi victimes de harcèlements, de menaces ou de pressions de la part de leurs conjointes ou de femmes qui détiennent un pouvoir sur lui.
Rappelez cette histoire racontée par le célèbre chanteur ivoirien Daouda le Sentimental intitulée «La femme de mon patron». Comme quoi le phénomène est vécu des deux (02) côtés selon que l’on soit une femme ou un homme mais il dépend des relations de pouvoir sur l’autre. Parmi les problèmes de violences quasi endémiques qui retardent considérablement notre développement, figure la déscolarisation au profit du mariage des filles de moins de dix-huit (18) ans.
Par rapport à cela, voici l’histoire d’une jeune fille de la 6ème année qui aurait pu abandonner les bancs si son directeur et son maître encadreur ne s’étaient pas engagés à l’aider afin qu’elle poursuive ses études.
En 2022, une fille soninké de treize (13) ans, fréquentant la 6ème année, proposée au mariage, a pu poursuivre ses études grace l’action conjuguée du directeur d’école, du président du Comité de gestion scolaire (CGS), du maire et des notables.
Voici le récit de cette jeune fille: «un jour, patatras ! Quand je suis revenue de l’école, ma mère m’a fait appeler dans la chambre et m’annonce que mon père lui a chargé de me dire que les hommes sont venus pour demander ma main en mariage. Je lui ai répondis que je suis à l’école et personne dans notre famille n’a terminé les études, je suis la seule qui est arrivée à ce niveau, vraiment, maman, moi, je veux continuer mes études, faits quelque chose. Maman est restée sans répondre.
Et sachant qu’en de pareilles circonstances, maman m’aurais proposé une solution. Voyant son mutisme, j’ai compris qu’elle n’avait plus de solution. Chaque fois qu’elle me répétait la même phrase, j’étais désespérée, je ne savais plus quoi faire et ne savais plus à qui se confier quand ce sont mes propres parents qui agissent comme cela.
Depuis, j’ai décidé de changer de stratégie en faisant intervenir des personnes extérieures mais de façon subtile. Quelques jours après, quand j’étais en classe mon maître, ayant constaté mon changement d’attitudes et de comportements en classe, m’a interpellé. Alors, j’ai donc pris mon courage à deux mains et décida de lui raconter mon problème. Le maître et le directeur m’ont appelé et j’ai repris mon discours devant eux».
Après leur concertation, ils ont décidé d’informer le représentant d’une ONG l’APSEF et ont aussi informé le président du CGS et du président de l’Association des parents d’élèves (APE) de la localité. Ainsi, quand l’équipe de médiation a été constituée, les démarches et les négociations ont pu commencer. La jeune fille, qui était affectée moralement, a bénéficié de conseils et des premiers secours psychologiques de la part de l’ONG qui ont beaucoup contribué à l’apaiser et à lui redonner le courage de continuer à surmonter cet écueil.
Quelques mois après le début des négociations, la jeune fille nous a informé un jour que son projet de mariage a été finalement ajourné par ses parents, soutenant comme raison que la fille est encore jeune, et la fille elle-même soutient vouloir continuer les études. L’aboutissement des négociations a suscité un soulagement tant du côté de la fille que du côté du directeur d’école et de l’enseignant encadreur qui ont été des artisans très délicats afin que dans l’ombre les démarches puissent aboutir à l’ajournement du projet de mariage.
Ils ont tenu a remercié particulièrement les efforts inlassables des Organisations non-gouvernementales (ONG) intervenants dans la zone en particulier l’Association pour la promotion des droits et le bien-être de la famille (APSEF) qui s’est mobilisée pour entreprendre la médiation sociale avec l’ensemble des parties prenantes pour parvenir à une décision qui soulagerait la jeune fille. Comme si une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, lors de la remise des prix d’excellence dans son établissement, la jeune fille a bénéficié d’un prix d’excellence qui récompense les meilleures jeunes filles de la commune.
Soulagés, la maman de la fille et le président de la société civile se sont réjouis de cette décision salutaire qui va dans le sens de la promotion de la scolarisation des filles dans la commune.
Pour rappel, depuis la construction de cette école, dont l’ouverture était une promesse du premier président du Mali Modibo Keïta, lors de son passage à Tambacara, aucune fille n’est parvenue à terminer les études. Triste constat qui interpelle tous les responsables de la commune.
L’engagement de la jeune fille fait honneur à sa famille parce qu’elle a le mérite de briser la glace autour de cette problématique de la scolarisation, en général et, celle des filles, en particulier. Selon la représentante des femmes du village toutes les femmes d’ici souffrent en silence de cette gangrène mais ne savent pas comment y remédier.
La jeune fille, malgré son âge, a tenu des propos responsables invitant toutes les filles à prendre les études avec sérieux et détermination afin de sortir leurs mères de la pauvreté, qu’elles fréquentent une madrasa ou l’école classique peu importe, pourvu qu’on sorte de l’obscurité.
Aujourd’hui, beaucoup de jeunes filles regrettent d’avoir abandonné les bancs pour le mariage. «Je ne voudrais pas tomber dans cette erreur. Je suis très contente de pouvoir continuer mes études et je m’engage à tout faire pour réussir».
L’alerte, lancée par le projet sur le retrait des jeunes filles de l’école et les risques que peut encourir une jeune fille en cas de mariage d’enfant ou de déscolarisation, est en train d’être entendue par les communautés et les enfants eux-mêmes. Leurs actions permettent de coordonner et de faciliter l’agir ensemble en vue d’apporter un début de changement de mentalité dans l’environnement local pour vaincre les croyances, les pratiques néfastes et mettre en lumière les bonnes pratiques.
Fort heureusement, les actions en faveur de la réduction des Violences basées sur le genre (VBG) se sont multipliées ces dernières années et ont été soutenues par les efforts de l’État et de ses partenaires comme UNICEF, à travers l’Initiative Spotlight.
B.S
Et c’est pour quand la fin de l’excision ????
Et c’est pour quand la fin des mariages arrangés ????
Bravo au peuple Malien car qui ne respecte pas sa mere ne pourra respecter personne, la vertu et la morale viennent de nos mamans.
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