Violence urbaine: la rançon d’un État failli

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Un État failli qui s’enfonce chaque jour davantage dans une décrépitude indescriptible. C’est cela désormais le ‘’Mali nouveau’’, le programme ‘’Notre grand Mali avance’’ miroité, désiré et même fantasmé par les Maliens. Le réquisitoire est-il trop sévère ? Pas certainement à la lumière de l’affligeant spectacle présenté, le lundi dernier, n’enviant en rien certains chefs-d’œuvre hollywoodiens, méritant de ce fait la palme d’or.

Expédition punitive, descente musclée, tous les qualificatifs sont permis pour désigner la chasse à l’homme engagée par des étudiants de l’Université de Kabala contre les apprentis chauffeurs, à Kalaban-Coro, ce 29 juillet. Une riposte, à la hussarde, de forces paramilitaires qui font régner l’ordre et la discipline à Bamako ; surtout quand un des leurs est contrarié. Ils n’hésitent pas à étendre la terreur au-delà du domaine universitaire comme on l’a vu à Kalaban-Coro.  C’est cauchemardesque tout simplement.

L’origine des échauffourées entre les deux camps ?  Qui a raison, qui a tort ? Là n’est pas le propos, face à la psychose causée après les affrontements et les désagréments causés à la population sevrée de taxis, parce que la rive droite (en particulier Kalaban-Coro) a été déclarée ‘’zone de guerre’’. Aucun taximan ne prenait le risque de s’y aventurer, pénalisant les usagers qui n’ont rien fait pour mériter une telle punition.

Mais, nous ne sommes pas dans le Far-West ; nous sommes bel et bien dans la capitale malienne. La capitale du pays dont le Président promettait, en 2013, lors de sa prestation de serment : « (…) en tant que Président de la République, je m’attellerai sans relâche à restaurer l’Autorité de l’État. Nul ne sera au-dessus de la loi. Elle s’appliquera de manière égale à tous. Je mettrai fin à l’impunité, aux passe-droits qui sont à l’origine du dévoiement des institutions judiciaires et étatiques ». C’est la capitale du pays dont le Président assurait : ‘’la confiance, la grande, la très grande confiance placée en moi ne sera jamais galvaudée’’.

Où est l’autorité de l’État quand des citoyens lèvent une troupe pour aller sévir impunément contre d’autres citoyens ? Où est la sécurité quand des citoyens font usage d’armes à feu, dans une rixe, sans que cela n’interpelle outre mesure le pouvoir qui a longtemps fait l’option d’un gentleman agreement avec les étudiants ? Dans quel pays sommes-nous ou plus exactement, sommes-nous encore dans un pays ?

La situation alarmante se présente ainsi : au Nord, c’est la dictature des mouvements armés ; au Centre, c’est la dictature des jihadistes ; dans la capitale, c’est la dictature de l’impunité, du laxisme, du laisser-aller (…) dont l’incident de Kalaban-Coro de ce lundi n’est que l’une des multiples fâcheuses expressions.

Entre nous, il y a une urgence pour le pouvoir de reprendre la main, d’assainir l’espace universitaire, de rappeler que tout citoyen est un justiciable et de le faire valoir. Bien sûr, sauf que quand on fabrique un monstre, à un moment ou à autre, il est forcément hors de contrôle de son créateur. Alors, il devient un danger pour tout le monde. Les bémols dans les discours et autres circonlocutions cachent mal le traitement discriminatoire de l’Etat, cet Etat, réserve aux citoyens, en violation flagrante de l’article 2 de la Constitution du 25 Février 1992 : ‘’tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la religion et l’opinion politique est prohibée’’.

PAR BERTIN DAKOUO

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